En France, environ 4 millions de personnes sont sourdes ou malentendantes. Souvent cibles de moqueries et mises à l'écart, elles peinent à trouver leur place. L'éloquence des sourds, documentaire de Laëtitia Moreau, réalisé en 2017, ne résout pas ces difficultés mais dévoile la vision du monde de Virginie, narratrice et héroïne du film. Derrière ses yeux d'un bleu profond et son sourire enjoué, on découvre la face cachée de la surdité. Sensible et touchant, ce film est à voir ou revoir sur le site Arte TV (lien ci-dessous) jusqu'au 10 septembre 2018.
Une vie entre deux mondes
Virginie est une jeune mère, cadre dans une société d'assurances en tant que juriste, née avec un handicap : elle n'entend pas. Première avocate sourde profonde de naissance en France, celle qui n'a jamais plaidé par peur de ne pas tout comprendre et de ne pas être comprise, partage son parcours et ses combats pour arriver là où elle en est aujourd'hui. On s'émerveille de la vitalité et de la joie de vivre de cette femme qui nourrit de grandes ambitions pour elle et ses proches et surmonte les difficultés avec le sourire. Elle confie avoir « toujours vécu entre deux mondes », celui de ses parents et des autres « entendants » et le sien, qu'elle partage avec son frère, son mari, ses enfants et certains de ses amis, sourds également. Après une opération plus ou moins réussie lorsqu'elle avait 20 ans, elle conduit le téléspectateur dans son monde, fait d'images et de vibrations. Loin d'être fataliste, l'avocate est aujourd'hui épanouie dans sa vie professionnelle comme privée.
Un travail de titan
Cinquante minutes d'un documentaire poignant, pour découvrir le travail acharné, invisible et sans répit qu'effectuent les personnes sourdes et malentendantes. Un rythme de vie qui impose une concentration de chaque instant et une patience sans faille pour comprendre et appréhender le monde extérieur. Ce film constitue un exemple révélateur des limites de notre société peu inclusive qui demande à ceux qui sont en situation de handicap une multitude d'efforts. On y découvre surtout la diversité des formes d'expressions possibles : l'écriture, la langue des signes, la langue parlée complétée mais aussi la parole. Une voix parfois hésitante que Virginie n'a jamais eu le privilège d'entendre. Seule ombre au tableau, le film n'est pas entièrement sous-titré !
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