Ce n'est pas faute de s'alarmer depuis des lustres… Les réserves financières de l'Agefiph (Fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées dans le secteur privé) continuent de s'amenuiser et seront épuisées à la fin 2017, a affirmé le 23 mai 2017 Didier Eyssartier, son directeur général, à l'occasion d'une conférence de presse. L'effet ciseau -stagnation des ressources et hausse des interventions en faveur des travailleurs handicapés- est un casse-tête qui oblige à remanier le système en profondeur. Mais jamais la menace n'avait été formulée de manière aussi précise…
Collecte versus dépenses
En 2016, l'Agefiph a collecté 404,5 millions d'euros (+0,7%) de contributions (ou pénalités) versées par les entreprises d'au moins 20 salariés qui ne respectent pas l'obligation légale d'employer au moins 6% de travailleurs handicapés. Dans le même temps, elle a engagé 450,2 millions d'euros (-4,6%) pour financer des actions d'insertion dans l'emploi et pour son budget de fonctionnement. Et ce n'est pas la très légère hausse des contributions en 2016 de 0.7 % (soit environ 2 millions d'euros), expliquée en partie par la reprise économique et donc la recrudescence de créations d'entreprises qui ne se sont pas encore engagées dans la démarche, qui va tirer le Fonds de ce mauvais pas. « La collecte ne va pas progresser », affirme Anne Baltazar, présidente de l'Agefiph. Or « notre prévision est qu'à la fin de cette année (...), nos réserves nous permettront juste d'avoir le niveau minimal » pour assurer environ « trois mois de fonctionnement », a complété M. Eyssartier. Il est vrai que ces réserves ont été généreusement ponctionnées à trois reprises par l'Etat pour financer les contrats aidés : 29 millions d'euros en 2015, 2016 puis 2017 (article en lien ci-dessous). Ponctions qui sont venues s'ajouter à la saisie de 50 millions opérée par le gouvernement de Nicolas Sarkozy en 2008.
Recherche de solutions en cours
Selon Anne Baltazar, le « sujet est sur la table ». Avec le Fiphfp (son équivalent pour la fonction publique), qui partage la même problématique, le Fonds a demandé une audience à la nouvelle secrétaire d'Etat en charge du handicap, Sophie Cluzel. Le précédent gouvernement avait prévu d'engager une réflexion sur le modèle de financement des deux fonds. Selon Mme Baltazar, « des mesures correctrices » ont été envisagées avant la présidentielle dans le projet de loi de finances 2018 « pour que les deux fonds puissent fonctionner en 2018. Ce qui n'évite pas une discussion de plus grande ampleur ». Lorsqu'on lui demande si une contribution portant sur toutes les entreprises (et pas seulement celles de 20 employés et plus) est envisageable, la présidente répond qu'il ne faut pas « exclure de réfléchir à de nouveaux modèles, en mobilisant d'autres acteurs ».
Les inspections générales des affaires sociales (Igas) et des finances (IGF) viennent de démarrer une enquête conjointe sur le sujet qui devrait livrer ses conclusions à la fin de l'été. Il restera alors moins de quatre mois pour agir…
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