Savoir rassurer puis s'effacer pour favoriser les relations entre les enfants, c'est l'une des conclusions majeures de la recherche EPIL (Enfants à besoins particuliers, processus inclusif et liens aux pairs), un document de plus de 340 pages, qui a également fait l'objet d'un livret rempli de conseils pratiques. Menée durant 18 mois, portée notamment par la Firah (Fondation internationale de recherche appliquée sur le handicap), cette étude internationale vise à identifier des processus facilitant ou entravant le développement des compétences sociales des jeunes en situation de handicap.
4 livrets pour booster les relations
Trois autres livrets ont été publiés à l'issue de cette recherche (disponibles via le lien ci-dessous) : « Kiyan – Prendre le temps d'observer les enfants avant de jouer avec eux », « Louane – A la maison comme à la crèche, se construit le plaisir d'être avec les autres », « Myriam – De la peur des autres au plaisir de jouer à côté d'eux ». Objectif : permettre à leur famille et aux professionnels d'aider ces enfants à booster leurs relations avec les autres, principalement à l'école. Un sujet plus que jamais d'actualité après les propos polémiques du candidat à l'élection présidentielle 2022, Eric Zemmour, qui déclarait préférer « accueillir » les enfants handicapés dans des « établissements spécialisés », plutôt qu'en école ordinaire, se faisant le relais de la « souffrance » de ceux qui peinent à y trouver leur place (article en lien ci-dessous).
L'importance des relations intrafamiliales
Les recherches dans les lieux d'inclusion s'accordent à relever que les enfants handicapés éprouvent des difficultés à établir des relations avec leurs pairs qu'ils soient « valides » ou non. Ces jeunes sont souvent solitaires, à l'écart du groupe, en particulier dans les moments de jeux libres. Pour changer la donne, « il est donc essentiel de s'intéresser aux relations entre pairs dès le plus jeune âge, au moment de la construction des premiers liens, car ceux-ci vont colorer la qualité des relations aux autres au fur et à mesure de l'avancée en âge », explique la Firah. Selon elle, « prendre en considération le tissage des liens des enfants en famille, notamment, constitue un appui notable pour favoriser leurs relations en collectivité ». Les chercheurs se sont donc attelés à analyser plusieurs facteurs : climat familial, événements de vie, présence ou non de frères et sœurs, importance et nature des déficiences, climat du lieu de socialisation, présence ou non d'un adulte dédié auprès de l'enfant (comme un Accompagnant d'élève en situation de handicap)...
Le rôle central de la mère
Principale conclusion : plus les enfants « typiques » sont familiers avec le handicap, plus les liens se nouent facilement avec les enfants handicapés. L'étude met également en avant le rôle central de la mère dans le processus de socialisation de son enfant. « Plus ce dernier est dit confiant, sécure, se défendant davantage de l'intrusion de l'autre et de manière plus souple, plus il est décrit comme commençant à nouer des liens plus différenciés avec les adultes, et comme pouvant s'éloigner de lui pour 'se risquer' aux interactions avec les enfants 'non familiers' », détaillent les chercheurs.
Les enfants familiers, premier pas vers la socialisation
Mais, selon eux, l'aide des adultes, aussi bien intentionnés qu'ils soient, ne pourra pas se substituer à l'interaction avec d'autres jeunes et, en premier lieu, avec les « enfants familiers » (frères et sœurs, cousins...). Les liens qui se créent semblent véritablement préparer l'enfant aux relations sociales avec d'autres pairs moins connus. « Cela amène à considérer l'accompagnement des enfants en situation de handicap de façon beaucoup plus large que dans ses seuls aspects éducatifs, rééducatifs et thérapeutiques, et à laisser une place importante à ce qu'il peut construire et créer au sein de son milieu familial », concluent les auteurs de l'étude.