Par Jessica Lopez
Cheveux platine, coupe en brosse et doigts en « V » de victoire, la Belge âgée de 37 ans pose avec sa médaille d'argent décrochée le 10 septembre 2016 en athlétisme sur 400 m en fauteuil aux Jeux paralympiques de Rio. Atteinte d'une maladie rare qui lui paralyse les jambes, la Flamande a consacré son corps blessé au sport avec un franc succès : triple championne du monde en fauteuil (100 m, 200 m, 400 m) en 2015 et championne olympique sur 100 m à Londres en 2012, elle participe à Rio à ses derniers Jeux.
Le revers de la médaille
« Il y a deux côtés à cette médaille : la joie de l'un, mais aussi la douleur et les adieux qui arrivent de l'autre », explique-t-elle. Après Rio, elle rangera définitivement le fauteuil de course : « Je dois abandonner car ma maladie empire. C'est plus difficile de faire des courses qu'il y a quatre ans ». En août 2016, elle annonce dans la presse que ses papiers pour recourir à l'euthanasie sont prêts, car elle « souffre trop » et que son corps ne lui permet plus de faire du sport, « sa raison de vivre ». Des déclarations choc qui suscitent interrogations mais aussi compassion. Si les papiers sont prêts depuis 2008, « je ne veux pas mourir tout de suite », précise-t-elle lors d'une conférence de presse à Rio. Une mise au point « nécessaire » pour cette femme « rageuse » qui « aime la vie ». Elle se déclare toutefois « en paix », « tranquillisée » depuis que le recours au suicide assisté lui a été autorisé. « Quand le moment viendra, où il y aura plus de mauvais jours que de bons jours, alors j'aurai ces papiers en mains ».
Déjà une tentative de suicide
La Belgique autorise le recours à l'euthanasie, mais cela n'est « pas aisé », estime-t-elle. « Le processus est long, difficile, pour obtenir les papiers (article en lien ci-dessous). J'ai dû prouver que ma maladie progresse et qu'il n'y a aucune chance que cela s'améliore. Trois médecins ont dû en attester », ajoute-t-elle. La sprinteuse avait 14 ans quand sa « tétraplégie progressive » s'est déclarée. Son adolescence a été rythmée de rendez-vous « d'un docteur à un autre, qui ne savait pas ce que j'avais et m'annonçait des mauvaises nouvelles ». « J'étais très déprimée. Un jour, j'ai décidé que ça suffisait, qu'il fallait que je vive à nouveau », poursuit l'athlète qui a déjà tenté de se suicider.
Les mauvais jours s'accumulent
Malgré ses succès sportifs, les mauvais jours s'accumulent et les douleurs s'intensifient. Celle qui aime aller aux concerts et écouter très fort de la musique, dessinait encore avec une grande aisance l'année dernière, mais sa vue a subitement baissé. « Quand j'ai des crises de douleur, je perds conscience. Il m'arrive de dormir 10 minutes la nuit. Je peux à peine manger », décrit-elle. « La plupart des athlètes ici sont dans des fauteuils, car ils sont nés avec une maladie ou ils ont eu un accident. Ils peuvent se reposer, s'entraîner quand ils le veulent. Moi, je dois m'adapter à mon état de santé ».
Un musée rien que pour elle
En partageant son histoire, Marieke Vervoort aimerait « inspirer » d'autres pays pour qu'ils ouvrent le débat et que le suicide assisté ne soit plus « tabou ». « L'euthanasie ne veut pas dire meurtre pour moi, mais signifie repos », ajoute-t-elle. Aujourd'hui, elle n'a « plus peur de mourir » et elle voudrait qu'on se souvienne « d'une femme qui riait tout le monde temps, ne voyait que les bonnes choses de la vie sans se plaindre ». La liste de ce qu'elle aimerait encore faire est longue : de la voltige, un beau voyage au Japon et avoir un musée à son effigie. « J'ai tout collecté, les articles, les reportages télé, les lettres d'encouragement, mes équipements... Toute ma carrière dans un musée, c'est mon plus grand rêve », dit-elle.
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