Rupture de l'isolement, encadrement rassurant, maintien de l'autonomie, répit pour l'aidant… D'après une enquête APF France handicap-Unaf sur l'habitat inclusif et les aidants familiaux fin 2022, 57 % d'entre eux pensent que ces solutions, à la lisière entre l'établissement médico-social et l'habitat ordinaire, sont ou pourraient être adaptées pour leur proche. Cette alternative entre le tout collectif et l'individuel, dédiée aux personnes handicapées comme âgées, s'est consolidée en 2020 à la suite du rapport Piveteau/Wolfrom « Demain, je pourrai choisir d'habiter avec vous ». Trois ans après les fondements de cette nouvelle offre qui se veut « à taille humaine » et les premières mesures concrètes, l'Etat se dit prêt à passer à la vitesse supérieure. Un Comité interministériel composé de Jean-Christophe Combe, ministre des Solidarités, et de Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée aux Personnes handicapées, aux côtés des ministères du Logement et des Collectivités territoriales, s'est réuni le 21 février 2023 pour réfléchir au développement de l'habitat inclusif.
Un déploiement d'ampleur en 2022
« Il y a un enjeu à mettre à disposition des personnes concernées différentes possibilités, en particulier dans le choix de leur lieu de vie et des personnes avec lesquelles elles souhaitent vivre », précise Geneviève Darrieussecq. Premier constat à l'issue de cette réunion, l'année 2022 a connu un « déploiement d'ampleur de l'habitat inclusif ». Les quatre ministères investis dans ce chantier précisent que « la quasi-totalité des départements se sont engagés dans son développement et ont formalisé une programmation pluriannuelle de financement de cette nouvelle offre dans le cadre des Conférences des financeurs ». Des projets soutenus également par l'Aide à la vie partagée (AVP), créée par la loi de financement de la sécurité sociale en 2021. Elle est couverte à 80 % par l'Etat via la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie) et à 20 % par les départements volontaires. Désormais, le gouvernement souhaite accélérer la cadence.
Une poursuite en 2023
« La poursuite du développement de l'habitat inclusif est une ambition forte », estiment les quatre ministères. Le gouvernement annonce vouloir déployer 1 885 projets dans les « prochaines années », qui permettront de loger 18 070 personnes en situation de handicap ou âgées, avec une enveloppe de plus de 70 millions d'euros de financement annuel à l'horizon 2025. Autre objectif : la création d'habitats inclusifs très sociaux (PLAI), « au bénéfice des personnes les plus modestes », qui viendront compléter le parc de logements sociaux existants ou fléchés vers l'habitat inclusif après leur rénovation depuis 2021. Le gouvernement entend également « sensibiliser les préfets à cette forme d'habitat ». La ministre déléguée aux Personnes handicapées promet « progressivement (...) un panel de solutions pour que chacun puisse vivre comme il l'entend, en cohérence avec son parcours de vie ».
Des freins, aussi ?
En revanche, rien n'a été dit sur ses inconvénients, relevé dans l'enquête APF France handicap-Unaf, notamment son coût financier, considéré comme un frein pour 37 % des aidants interrogés, le manque d'intimité, l'éloignement géographique ou encore les difficultés de prise en charge de l'évolution de la perte d'autonomie de ses habitants. « Entre vacances scolaires, arrêts maladies, congés et jours fériés, il est quasi impossible d'avoir un accompagnement fiable et permanent assuré par des professionnels », déplore l'aidante régulière d'une personne déficiente motrice et intellectuelle vivant en logement partagé, accompagné. Des enjeux qui, faut-il l'espérer, seront évoqués lors de la prochaine Conférence nationale du handicap prévue au printemps 2023. Geneviève Darrieussecq assure « travailler de façon volontariste » pour « ne pas manquer ce rendez-vous ».
© Twitter Geneviève Darrieussecq