A quelques jours des élections départementales, Marine Le Pen s'adresse aux « acteurs des politiques du handicap » dans une lettre ouverte. Une chose est certaine, le Front National connait bien son dossier et sait viser juste. Rien ne manque dans ce florilège d'intentions, copier-coller des revendications des associations de personnes handicapées depuis plusieurs années.
10 % de français à séduire ?
L'électeur handicapé deviendrait-il un citoyen à part entière ? Le même jour, Jacques Toubon, Défenseur de droits, se fend d'une liste de recommandations envoyée à tous les maires de France pour leur rappeler que tous les bureaux de vote doivent être accessibles (article en lien ci-dessous). Si l'on considère qu'environ 10 % des Français sont en situation de handicap, c'est évidemment un électorat qu'on a tout intérêt à ne pas (plus ?) négliger. La présidente du FN semble l'avoir compris à travers cette lettre d'intention. Selon certains sondages, son parti aurait le vent en poupe et cette nouvelle échéance électorale lui donne l'opportunité de s'adresser au plus grand nombre en réactivant « les débats sur la nécessité d'une politique sociale et sanitaire plus juste pour tous les Français, en particulier les plus fragiles. » Quand d'autres font l'impasse sur ce thème, le FN dégaine !
Tous les points noirs passés en revue
En quelques lignes, sa présidente passe en revue tous les points, noir désespoir et rouge sang, qui alimentent la colère et le scepticisme des personnes handicapées : l'échéance d'accessibilité repoussée, l'ordonnance sur la mise en place des Ad'AP, les 87 millions d'euros ponctionnés depuis trois ans sur les réserves de l'Agefiph… Et puis évidemment le montant de l'AAH (allocation adulte handicapé), pierre d'achoppement de cet édifice fragile, qui cristallise souvent tous les enjeux ; Marine Le Pen ne promet pas sa « revalorisation substantielle afin de permettre aux personnes handicapées de mener une vie normale, couplée à un vaste plan de luttes contre la fraude sociale » mais rappelle qu'elle la « demande » depuis plusieurs années. Nuance ?
Se bercer d'illusions ?
Le package de promesses est rudement bien ficelé : lutter contre la maltraitance des personnes handicapées, mettre en place de centres d'accueil pour les enfants, réduire de manière drastique les délais d'application des décisions des MDPH, développer l'emploi, la présence d'AVS, le poids des ESAT, et même faire sauter la barrière d'âge pour l'attribution de la PCH (prestation de compensation du handicap). Le programme est alléchant, les serments terriblement pertinents, teintés d'un principe d'inclusion désormais dans toutes les bouches, évoquant « ces grands enjeux qui nous concernent tous » et rappelant qu'une « grande nation se construit avec tous ses citoyens, même et surtout avec les plus fragiles ».
Ce futur-là, toutes les personnes handicapées en ont rêvé ; mais elles savent plus que tout autre ne pas se bercer d'illusions. « Les promesses n'engagent que ceux qui les croient », disait Clémenceau. Par le passé, dans le présent, d'autres partis ont eux aussi, promis, martelé, rédigé, voté mais force est de constater qu'il y a parfois un principe de réalité qui n'est ni rose, ni bleu, souvent gris foncé....