"Le plus dur, ça a été la perte de mobilité. Le sport, ça m'a permis de me reconstruire et d'éprouver du plaisir". Le joueur de tennis fauteuil Michaël Jérémiasz portera le drapeau de la délégation française à l'ouverture des Jeux paralympiques le 7 septembre 2016 à Rio, un événement qui va "bien au-delà du sport".
Champion par "accident"
Le sourire toujours aux lèvres, ce sportif de 34 ans est de ceux qui ont fait des obstacles une force. Victime d'un accident de ski qui le laisse paraplégique à 18 ans, Michaël Jérémiasz découvre le tennis fauteuil un an plus tard et relève la tête. Seize ans plus tard, il s'est fait un nom et a contribué à faire connaître sa discipline. Cinq fois champion de France, champion du monde par équipe en 2016, il a également été quatre fois médaillé paralympique, notamment avec l'or en double à Pékin (2008). "J'ai toujours aimé et pratiqué le sport mais je n'ai jamais eu l'ambition d'être un champion. C'est arrivé par accident, c'est le cas de le dire", sourit dans un entretien à l'AFP celui qui s'apprête à vivre ses quatrièmes Jeux.
Vie de sacrifices
Le démarrage s'annonce compliqué, entre scandale de dopage, désintérêt des Brésiliens et manque d'argent. Mais le représentant de la France veut croire qu'à l'image des Jeux olympiques, "globalement réussis", les Paralympiques assureront spectacle et performances. "On peut discuter de l'engouement populaire, qui n'est pas à la hauteur, mais pour le reste on ne se prépare pas pendant quatre ans pour bien manger, bien dormir, s'amuser. On y va pour la gagne, pour le sport. Tout le monde va se défoncer pour qu'on ait les meilleurs Jeux possibles", défend-il.
Choisi comme porte-drapeau
Pour les athlètes, les Paralympiques vont "au-delà du sport", c'est la récompense d'une "vie de sacrifices" et "d'entraînements qui abîment le corps", plus rapidement et douloureusement encore que pour les valides. "Personne ne nous a obligé à faire du sport de haut niveau, on pourrait très bien avoir un fauteuil normal, une prothèse normale. Mais ça transcende. Des émotions comme les Paralympiques, c'est indescriptible", poursuit le sportif. S'il a été choisi pour porter le drapeau de la France, c'est en raison de sa maturité, de sa joie de vivre mais aussi de son côté frondeur, toujours prêt à défendre les oubliés. Ce rôle, qui lui a permis de découvrir les sites olympiques avec la star du judo Teddy Riner et François Hollande début août à Rio, il le voit comme "une reconnaissance" et l'assume avec "fierté". "Porte-drapeau, c'est être porte-parole et grand-frère", explique l'auteur de "Tant d'histoires pour un fauteuil".
Et après ?
Marié et jeune papa, Michaël Jérémiasz arrêtera le tennis professionnel après Rio et un dernier tournoi en novembre pour se consacrer à l'insertion des personnes handicapées dans les entreprises et à leur visibilité dans les médias. "Mon combat, c'est de rendre le handicap de plus en plus visible et pas tous les deux ans à l'occasion des Jeux d'hiver ou d'été. Il ne faut pas qu'il n'y ait que ça et le Téléthon à la télé", plaide-t-il. Selon lui, "40% des athlètes gagnent moins de 500 euros par mois", un ratio valable aussi bien pour les sportifs olympiques que paralympiques, "mais ceux qu'on dit 'riches' le sont beaucoup plus chez les valides", souligne-t-il. Question de méconnaissance mais aussi "de visibilité et de moyens car tout passe par le sponsoring". Lui se considère comme "un privilégié" car il vit de son sport, même s'il a créé deux entreprises tournées vers le handicap pour préparer sa reconversion. Il a également fondé avec sa femme et son frère une association pour accompagner les personnes handicapées les plus démunies (article en lien ci-dessous). Il l'a baptisée "Comme les autres", évidemment.
Par Jessica Lopez