A cent jours des Jeux paralympiques de Rio de Janeiro, qui se disputeront quelques semaines après les JO (7-18 septembre 2016), Andrew Parsons, président du Comité paralympique brésilien, par ailleurs vice-président du Comité international paralympique (IPC), reconnaît des difficultés dans le remplissage des stades mais estime que l'enjeu sociétal est fondamental pour les personnes handicapées du Brésil et, au-delà, du continent latino-américain.
AFP : L'IPC s'est inquiété des faibles ventes de tickets pour les Jeux paralympiques. Comment y remédier ?
Andrew Parsons : Nous devons prendre plus d'initiatives en termes de communication, en particulier pendant la période de transition (entre les Jeux olympiques et paralympiques). Nous aurons une dynamique forte grâce au parcours de la flamme olympique, puis aux Jeux. Mais nous devons viser les écoles et les églises, ainsi que des régions autres que Rio. Car les spectateurs ne seront pas des étrangers mais des Brésiliens. Nous avons plus de diffuseurs que jamais, nous avons une image qui se renforce dans le monde. Mais il est vrai que notre principale préoccupation, c'est la billetterie.
AFP : Que peut faire le sport pour l'intégration des personnes handicapées au Brésil ?
AP : Après avoir réussi à diffuser en direct l'intégralité des Paralympiques d'Athènes (en 2004), pour la première fois, nous avons eu des héros nationaux. Cela a considérablement aidé à modifier la perception de la société brésilienne. Cette nouvelle perception doit se traduire en actions concrètes mais j'en vois quelques-unes, comme la transformation du réseau de transports publics de Rio. L'an passé, une nouvelle loi s'est attaquée à de nombreux aspects de la vie des personnes handicapées, depuis le logement jusqu'à l'accès au marché du travail en passant par les transports. Le sport olympique les a exposées au grand jour au lieu de les cacher. Je vois les Jeux comme un catalyseur. Rio ne va pas devenir accessible à 100%, aucune ville dans le monde ne l'est, mais la situation s'est améliorée. Quand je montre de belles images de sport paralympique à des écoles ou des communautés et que je leur demande ce qu'ils voient, ils répondent : de grandes performances, de la vitesse, du dépassement de soi… Personne ne mentionne le handicap parce que, dans ce contexte, il n'est pas important. Le sport place le handicap en perspective.
AFP : Les Jeux paralympiques souffrent du très grand nombre de catégories, qui les rend complexes pour le public. Comment améliorer les choses ?
AP : Ce sont les mêmes principes quand vous séparez les hommes et les femmes (chez les valides). Vous avez aussi des catégories de poids en boxe et en judo. Bien sûr, on peut toujours essayer de simplifier mais c'est quelque chose que les médias doivent gérer. Cela ne freine pas le développement de l'image du sport.
AFP : Que vise le Brésil aux Paralympiques ?
AP : La 5e place au tableau des médailles, après avoir été 7e à Londres et 9e à Pékin. Mais la vraie référence sera de voir si plus de gens vivant avec un handicap se mettent au sport. C'est notre ultime objectif.
AFP : L'idéal ne serait-il pas un jour de fusionner les Jeux olympiques et les paralympiques ?
AP : D'un point de vue logistique, ce serait un défi, notamment pour mettre 15 000 personnes dans un village olympique. Le jour où l'on fusionnera les deux, l'un des deux sera réduit. Et ce ne seront pas les Jeux olympiques... Bien sûr, c'est encore nouveau ; cela a commencé à Rome en 1960, avec les deux Jeux dans la même ville, mais le modèle actuel avec un même comité d'organisation date d'Athènes (2004). Nous cherchons toujours l'équilibre. Il est toujours facile d'insister sur les Jeux olympiques parce que leur portée est supérieure et que le CIO est mieux structuré mais l'IPC dispose d'un bon modèle.
AFP : Londres a marqué l'histoire des Jeux paralympiques. Que restera-t-il de Rio ?
AP : Le fait de les organiser pour la première fois en Amérique latine. C'est une partie du monde où le sport paralympique est nécessaire. Les citoyens vivant avec un handicap dans nombre de ces pays ont beaucoup de chemin à faire avant d'être respectés. Une personne handicapée peut être un bon professionnel, un bon patron, une bonne épouse. Donc on ne peut pas lui dire : « Je te donnerai tout, tu as tous les droits, mais je vais te mettre là, dans le coin ».
Propos recueillis par Didier Lauras