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Lali, autiste Asperger à plein temps et maman tout autant

C'est à 43 ans que Lali apprend qu'elle est autiste Asperger. Ses 2 fils ado comprennent alors ses drôles de comportement, notamment l'incapacité à gérer les sous-entendus. Un diagnostic qui a permis d'apaiser leur relation.

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L'autisme de haut niveau (syndrome d'Asperger) se traduit classiquement, mais pas exclusivement,  par un trouble du sens social. Cette forme d'autisme reste mal connue du public, plus habitué à ce qu'on lui présente des exemples d'autisme sévère (comme l'autisme de Kanner), dont les manifestations parfois spectaculaires marquent naturellement les consciences. Or il existe « 700 000 nuances de bleu » (le nombre de personnes autistes en France et la couleur qui est associée à ce trouble). Certains imaginent qu'il est difficile pour une personne autiste de mener une vie de famille épanouie. Une femme autiste peut-elle être mère ? Quelles relations entretient-elle avec ses enfants ? Lali Dugelay répond à ces questions et se livre en toute sincérité sur son quotidien de maman Aspie…

Séduction involontaire

« Les Aspies passent leur vie dans l'ombre, peu ou mal reconnus, dans un effort de sur-adaptation de chaque instant à leur environnement, social, professionnel et familial. Pour vivre heureux, vivons cachés. Mais cela n'est possible que jusqu'à un certain point. A 23 ans, j'ai séduit -involontairement puisque mon diagnostic n'était alors pas encore posé- mon futur conjoint par ma fantaisie, mon côté toujours décalé, ma façon d'être plus connectée aux étoiles qu'aux humains et surtout mon déhanché sur la piste de dance d'un bal des pompiers. Car, oui, les autistes vivent et pensent souvent par la musique et la danse, moments de grâce où les frontières avec les neurotypiques n'existent pas, où le regard des autres ne compte plus, où l'on est soi, vraiment.

Et puis deux bébés

Puis est arrivée la maternité, à 27 et 31 ans. Des grossesses compliquées, où je me retrouvai alitée près de cinq mois. Très amoureuse de mon époux, je me demandais si je serais capable d'aimer autant mes enfants, sans que cela ne ponctionne un peu les sentiments que j'avais pour lui. La réponse fut une évidence à chaque naissance : oui. Rassurée sur ma capacité à aimer chacun des trois êtres les plus importants de ma vie, j'ai longtemps vécu une vie classique de maman surmenée. J'ai choisi d'exercer des métiers qui me laissaient la possibilité de rentrer à temps pour gérer le grand chambardement du soir : courses, devoirs, douche, repas, histoire du dodo, câlin. Jour après jour, à gérer les inscriptions à la crèche, à l'école, aux activités extra-scolaires, les appels de l'école quand l'enfant est malade et qu'il faut laisser en plan LA réunion professionnelle qu'il ne fallait justement pas rater. Ce fut un choix que je ne regrette en rien. Mon mari, papa moderne et businessman,  a toujours été présent autant que possible et n'a jamais cessé d'assumer avec entrain sa part des tâches ménagères et d'éducation. Il n'empêche que je me suis surinvestie dans ce rôle de maman, comme une mission qu'il me faut réaliser parfaitement, comme tout ce qu'entreprend un Aspie. Sauf qu'il n'existe pas plus de mère parfaite que d'enfant parfait…

Une maman bizarre mais cool

Mon diagnostic d'autiste n'était pas encore posé. Ils ont donc vécu avec une maman que je les entendais qualifier de « bizarre mais plus cool que les autres », grâce à cette fantaisie qui m'anime intrinsèquement. La maternité a aussi révélé mon côté maman lionne lorsqu'il s'agit de défendre mes « petits » dans des situations difficiles. On-ne-tou-che-pas-à-mes-en-fants ! Ils ont toujours su que j'étais prête à montrer les dents et qu'ils pouvaient compter sur mon indéfectible soutien en toutes circonstances. Un traitement aux antipodes de ce que j'inflige à ma propre personne, moi qui suis trop anxieuse à l'idée d'aller acheter une baguette de pain…

Adolescence, début d'incompréhension

Etant tous deux HPI (haut potentiel intellectuel), l'extraordinaire vocabulaire de leur enfance s'est peu à peu appauvri avec l'entrée dans l'adolescence. Il paraît que c'est normal. Sauf que nos difficultés relationnelles ont débuté à cette période. Autiste, je ne comprends pas les non-dits, l'implicite, les sous-entendus. Alors j'ai commencé à les reprendre. Souvent. Trop, à leurs yeux. Pas par malice mais parce que leur flemme à employer un lexique précis m'amenait à leur demander de préciser leur pensée presque à chaque phrase. Face à une terminologie qui laisse un doute, mon cerveau fonctionne comme un disque rayé qui ne peut pas reprendre sa mélodie tant qu'on ne l'a pas aidé à revenir sur les bons sillons. Insupportable ! Pour eux que j'exaspérais sans cesse, pour moi qui m'exaspérais de ne pas les comprendre, pour mon mari qui me sommait de faire preuve de plus de souplesse… L'adolescence était également synonyme de cachotteries, dissimulations, bêtises, claquements de portes, sautes d'humeur et plus ou moins gros mensonges ; j'avais l'impression de me trouver face à de parfaits inconnus, moi qui n'ai jamais fait de vagues cet âge-là, planquée dans mon coin, solitaire et obéissante.

Un diagnostic à 43 ans

Puis est venu le diagnostic en mars 2020. J'avais alors 43 ans et mes fils 16 et 11 ans. Je les avais informés que j'entamais cette démarche. Le soir même, je le leur ai annoncé, individuellement, pour recueillir leur impression, répondre à leurs questions et surtout leur expliquer les spécificités de l'autisme. Cette mise au point a détendu nos relations, chacun essayant désormais de s'adapter à l'autre. Aucun d'eux n'a exprimé de gêne ou de honte d'avoir une maman autiste. Accueillant ce diagnostic comme un véritable soulagement, je décidai de me libérer du carcan dans lequel je m'étais enfermée et de porter haut un message d'hymne à la joie de l'inclusion. J'ai changé d'employeur pour une entreprise plus inclusive qui a pris en considération mes spécificités et besoins et aménagé mon poste en conséquence. J'ai au préalable obtenu l'aval de ma famille car je savais que mes actions finiraient par être visibles, et je ne voulais pas qu'ils se sentent mal à l'aise si leurs camarades apprenaient que je suis autiste. Leur réponse a été « Eh ben, ça fait quoi ? Tu restes la même, on t'a toujours connue comme ça ! ». Voilà, c'est cela le bonheur d'être mère, être aimée par ses enfants pour ce que l'on est, quelles que soient nos spécificités. De « happy » à « Aspie » il n'y a qu'une lettre. Cela me définit pas mal. Je porte avec joie un handicap invisible que j'ai par chance apprivoisé depuis toujours et me permet de vivre une vie personnelle et professionnelle très épanouie. »

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