Quelle réponse apporter aux patients, souvent jeunes, dont la moelle épinière a été sectionnée dans un accident ? Hémiplégie, paraplégie, tétraplégie… Leur prise en charge s'effectue en deux temps : déterminer la cause et la traiter pour éviter l'aggravation, puis faire une rééducation adaptée et précoce pour récupérer les déficits. Mais une guérison totale reste encore difficile à envisager… Stéphane Vinit, maître de conférences, membre d'une équipe Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) au sein de l'unité END:ICAP -qui s'intéresse au handicap neuromusculaire- a misé sur une approche novatrice : des aimants pour réactiver les neurones.
Problème de locomotion
« 1 200 accidents de voiture laissent des patients paraplégiques, tétraplégiques ou entraînent des problèmes d'arrachage de connexion nerveuse au niveau des muscles, avec comme conséquence la section de la moelle épinière ou des nerfs périphériques », déplore l'enseignant-chercheur. Les conséquences sont multiples, à commencer par des problèmes de locomotion musculaire, qui limitent la capacité des personnes touchées à se déplacer. « Si on a des lésions beaucoup plus hautes, au niveau de la moelle épinière, cela induit des problèmes vitaux et notamment de respiration ». Pour ses travaux, il est parti du postulat que « lorsque la moelle épinière est sectionnée, les neurones qui se trouvent de part et d'autre immédiate de la lésion finissent par mourir ». « Nous nous sommes donc demandés ce qu'il en était de ceux légèrement plus éloignés et avons cherché à améliorer leur excitabilité afin qu'ils puissent recommencer à transmettre un influx nerveux », explique-t-il.
Quitte ou double
Avec son équipe, il a donc effectué des tests sur des rats puis des souris afin de réactiver ces connexions perdues. Pour ce faire, il a mis en oeuvre une technique innovante : des champs magnétiques appliqués sur le site même de la lésion et autour. « A ma connaissance, nous sommes les seuls au monde à utiliser la neuromodulation par stimulation magnétique répétée pour ce type d'application », assure-t-il. Un choix payant ; les résultats ont dépassé leurs espérances. « Sur le rat, nous avons doublé l'excitabilité des neurones alors qu'il y a encore quelques mois le pronostic de récupération sur nos animaux était de zéro, se réjouit Stéphane Vinit. On espère que cette hausse va conduire à des reconnections fonctionnelles. »
Couronné de succès
Le chercheur a également montré que l'activité respiratoire, affectée par la lésion, était en partie restaurée chez le rat, après traitement. Il poursuit actuellement ses travaux pour vérifier si la fonction locomotrice peut être, elle aussi, améliorée chez l'animal. Pour l'encourager dans ses études, la Fondation de France, qui consacre chaque année près de 30 millions d'euros pour faire avancer la recherche, lui a remis le « Prix Médisite en neurosciences ». Pour le 50e anniversaire de cette fondation, une édition spéciale de la Soirée de la recherche médicale avait lieu le 28 mars 2019, au Collège de France, à Paris.