« Notre tâche était de permettre aux personnes malvoyantes ou aveugles de voir ces tableaux tels qu'ils avaient été créés par les peintres », explique à l'AFP la commissaire de l'exposition Voir l'invisible (au musée des Beaux-Arts Pouchkine de Moscou), Olga Morozova. Les musées russes, qui se lancent dans l'expérience des tableaux tactiles plusieurs années après leurs confrères européens, ne proposaient jusqu'ici que quelques sculptures ainsi que des éléments de décor et d'architecture dans le cadre de programmes spéciaux, pour initier les visiteurs malvoyants aux beaux-arts, selon la même source.
Mieux comprendre les formes
« Avec la peinture, ce n'était pas facile ; il y a des tableaux où l'effet artistique est produit par un jeu d'ombre et de lumière ou encore par des coups de pinceau », remarque Mme Morozova. Pour l'exposition, les organisateurs ont retenu six tableaux, parmi lesquels Cheval attaqué par un jaguar d'Henri Rousseau, Vierge à l'enfant de Lucas Cranach père, l'Annonciation de Sandro Botticelli, Nature morte avec les attributs de l'art de Jean Siméon Chardin, Eh quoi? Tu es jalouse? de Paul Gauguin et Vieux juif avec un garçon de Pablo Picasso. Tous ces tableaux « ont des contours, des détails clairs qu'il est possible de sentir si on les touche, de comprendre leurs formes », précise Mme Morozova.
Un rendu précis
Reproduits grâce au recours à des technologies modernes d'impression en relief, ils cherchent à montrer les moindres nuances de couleur, la texture utilisée pour le vert foncé et le vert clair n'étant pas la même. Alors que les tableaux s'adressent en premier lieu aux personnes malvoyantes, les autres visiteurs peuvent également ressentir leur effet grâce à des lunettes noires, disponibles sur place. « Nous aimerions qu'en touchant ces tableaux, les gens se rendent compte de leur chance d'avoir une bonne vue, qu'ils comprennent ce que c'est de ne pas voir et qu'ils soient bons envers ceux qui n'ont pas cette chance », confie Olga Morozova.
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