Les personnes handicapées sont plus souvent victimes de violences, c'est ce qu'affirme une nouvelle étude (n°1156) rendue publique le 22 juillet 2020 par la Dress (Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques).
Plus que dans la population « valide »
Entre 2011 et 2018, les personnes identifiées comme handicapées ou ayant simplement quelques gênes ou difficultés dans la vie quotidienne ont répondu à l'enquête Cadre de vie et sécurité (dite « de victimation », qui est conduite chaque année depuis 2007) -cette dernière se limite aux ménages, excluant les personnes handicapées vivant en institutions-. Elles déclarent plus souvent que le reste de la population avoir été victimes de violences physiques, sexuelles et verbales au cours des deux années précédant leur interrogation, soit 25,2% (contre 22,7 % pour l'ensemble de la population âgée de 18 à 64 ans). 7,3 % ont subi des violences physiques et/ou sexuelles (contre 5,1 % pour celles ne déclarant pas de handicap), autant ont été exposées à des menaces (5,8 % pour les autres) et 15,4 % à des injures (une proportion comparable à la population n'ayant pas déclaré de handicap).
Les femmes en 1ère ligne
L'écart entre les personnes handicapées et le reste de la population est plus important parmi les femmes que les hommes. Ainsi, 9,0 % des femmes en situation de handicap disent avoir été victimes de violences physiques et/ou sexuelles au sein de leur ménage ou en dehors, contre 5,8 % de celles sans handicap. En particulier, elles sont deux fois plus nombreuses à avoir subi des violences sexuelles (4,0 % contre 1,7 %). Par ailleurs, elles rapportent plus fréquemment avoir été sujettes à des violences verbales : 18,1 % ont subi des injures et 8,2 % des menaces, contre respectivement 15,1 % et 5,7 % parmi les femmes dans le reste de la population. Ces chiffres sont à comparer à ceux fréquemment évoqués, notamment par l'association Femmes pour le dire, femmes pour agir (FDFA) qui, militant en leur faveur, affirme que 80 % des femmes en situation de handicap seraient victimes de violence, principalement au sein de leur domicile (article en lien ci-dessous).
Dommages physiques et psychologiques
Les personnes handicapées font également plus souvent état de violences ayant causé des dommages physiques ou psychologiques importants. Elles sont en proportion plus nombreuses à avoir présenté une ou plusieurs fractures ou blessures physiques visibles et à avoir été examinées par un médecin ou à avoir été hospitalisées à la suite de l'agression. Les victimes en situation de handicap sont deux fois plus souvent agressées chez elles ou à proximité de leur domicile et connaissent plus fréquemment leur agresseur. Un quart se sont déplacées au commissariat ou à la gendarmerie après avoir subi une atteinte contre un cinquième des personnes non handicapées, et deux tiers ont porté plainte. En 2018, on dénombre 7 300 victimes de crimes ou délits en situation de handicap en France : 29 % pour des violences physiques, 20 % pour des vols sans violence et 15 % pour des violences sexuelles. La plupart des atteintes concernent un peu plus d'hommes que de femmes, à l'exception de celles à la dignité (54 % de femmes) et surtout des violences sexuelles (77 %).
Les violences sexuelles
L'étude de la Dress s'est donc penchée sur les violences sexuelles à l'encontre des personnes handicapées à partir des données enregistrées par la police. C'est dans les établissements qu'elles sont commises le plus souvent, en particulier sur les personnes mineures. Ainsi, plus d'un tiers des 98 cas de harcèlements ou autres agressions sexuelles et des 95 cas de viols sur mineurs handicapés enregistrés sont commis dans des IME (institut d'éducation motrice). De leur côté, les foyers (y compris familles d'accueil) regroupent 21 % des 309 cas de harcèlements ou d'agressions sexuelles contre des majeurs. Il est à noter que ces délits sont principalement commis (à 37 %) par un autre résident (seulement à 13 % par un membre du personnel). Il n'en reste pas moins que c'est le domicile qui concentre le plus de menaces puisque que 43 % des viols sur personnes majeures handicapées y sont perpétrés (contre 27 % pour les mineurs).
Rappelons qu'une nouvelle loi sur les violences conjugales doit être définitivement adoptée au Sénat le 21 juillet 2020, permettant d'améliorer la protection des victimes et de leurs enfants. Quant à l'association FDFA, elle propose une ligne gratuite « Ecoute violences femmes handicapées » (01 40 47 06 06).
Insécurité chez soi ?
Enfin, le sentiment d'insécurité dans le quartier ou au domicile est plus fortement ressenti par les personnes handicapées. Ainsi, 17 % ont déclaré se sentir de temps en temps ou souvent en insécurité dans leur village ou leur quartier et 16 % avoir renoncé parfois ou souvent à sortir de chez elles pour des raisons de sécurité, soit des proportions supérieures au reste de la population (respectivement 11 % et 9 %). Mais cela concerne principalement les personnes qui ont été victimes ou témoins d'agression ou de violences.