« Le handicap est soluble dans l'eau », affirme Dominique Mignot, formateur et moniteur de plongée depuis plus de vingt ans. Pour les curieux qui souhaitent se lancer dans une nouvelle aventure, la plongée offrirait de multiples bienfaits aux personnes handicapées. Gestion du stress, dépassement de soi, création de lien social, développement de l'estime personnelle, découverte des fonds marins… Tous ces facteurs participent au bien-être du plongeur tant sur le plan psychologique que physique. Les clubs proposant la pratique Handisub sont disponibles partout en France.
Une activité encadrée et sécurisée
Contrairement aux idées reçues, les activités subaquatiques peuvent convenir à la plupart des handicaps : moteur, sensoriel, psychique, mental… Au club Handisub de Guingamp (Côtes-d'Armor), dix moniteurs encadrent cinq personnes en situation de handicap aux attentes totalement différentes. Elles bénéficient du même matériel que les « valides » et ce qui oblige les instructeurs à adapter la pratique. Lors de la première séance, les adhérents obtiennent leur baptême de plongée ; certains reviennent tous les mercredis pour améliorer leurs capacités et relever de nouveaux défis. Redoutées par certains, espérées par d'autres, les deux sorties en mer de l'année sont précieuses et permettent notamment de constater les progrès accomplis lors des séances en piscine. Des stages ciblés sur un handicap particulier sont également proposés et les plus chanceux peuvent participer à des voyages à l'étranger. Dominique Mignot garde des souvenirs inoubliables de son dernier séjour en Egypte, « mais c'est un sacré budget », avoue-t-il.
Différents palliés
La plongée Handisub est limitée à quarante mètres, contre soixante mètres pour les « valides ». Mais certains, comme les personnes avec un handicap psychique, cognitif ou mental, ne peuvent descendre en-dessous de six mètres. Des paliers fixés par les médecins du réseau, « qui manquent parfois de recul » selon Dominique Mignot. « Quoi qu'il en soit, l'objectif n'est pas de plonger le plus profond possible mais de prendre du plaisir en fonction des capacités de chacun, poursuit-il. Certains, lourdement handicapés, ne feront peut-être jamais de virée en mer mais qu'importe, du moment qu'ils se sentent bien dans l'eau. » Il revient à chacun de trouver un intérêt qui lui est propre. « Nous sommes tout à fait en droit de nous demander pourquoi une personne aveugle voudrait plonger ? En réalité, elle découvre la vie sous-marine sous un angle différent, touche, lorsque c'est autorisé, les différentes espèces, fait travailler sa mémoire et profite du calme absolu. » Avec les personnes déficientes visuelles, les moniteurs mettent en place un code tactile et leur décrivent tout ce qu'ils voient. Les personnes sourdes, quant à elles, sont particulièrement à l'aise. « Dans l'eau, on ne communique que par signes donc impossible de savoir qui du moniteur ou du plongeur est plus handicapé que l'autre, sourit Dominique. Chez les personnes avec un handicap sensoriel, la sensation d'apaisement est décuplée, ils ressentent tout de manière deux fois plus intense. »
Une parenthèse de bien-être
Pour les personnes avec un handicap psychique ou mental, la valorisation et la relation à l'autre sont essentielles. « Une symbiose s'installe entre les moniteurs et les plongeurs, il y a un courant très fort qui passe, sans vouloir faire de jeu de mots… Seule sous l'eau, la personne jouit d'une autonomie partielle mais fait également partie d'un groupe donc elle se sent à la fois unique et entourée », explique Dominique Mignot. Par ailleurs, la poussée d'Archimède facilite les mouvements et permet aux personnes en situation de handicap moteur de retrouver un semblant de motricité, le temps d'une plongée. « Elles n'ont aucune contrainte, vivent en 3D et sont portées par l'eau ». Une parenthèse enchantée qui permet d'oublier son fauteuil roulant et les contraintes qui en découlent.
Une rencontre à plusieurs niveaux
« Mais l'atout majeur de cette pratique reste de faire sortir les gens de chez eux. A cause du handicap, certains s'isolent », déplore Dominique Mignot. La plongée favorise la rencontre ; rencontre avec ses pairs mais aussi avec le monde aquatique et soi-même et les capacités inexplorées de chacun. « J'accompagne une jeune femme schizophrène depuis près de trois ans. Ça n'a pas toujours été facile, il a fallu s'appréhender, se faire confiance mais nous sommes parvenus à trouver un équilibre. Récemment, j'ai rencontré sa psychiatre qui m'a dit : 'Ce n'est pas possible, ce n'est plus la même…' Ses progrès sont fulgurants, c'est formidable, j'ai réussi ! », s'enthousiasme-t-il. Le club de Guingamp peut accueillir cinq personnes de plus. Alors, prêts à se jeter à l'eau ?