Le laboratoire UCB Pharma a été condamné le 29 septembre 2016 à verser 595 000 euros de dommages et intérêts à un enfant polyhandicapé par le tribunal de Nanterre, qui a estimé que l'exposition in utero de sa mère au Distilbène était la cause indirecte de ses lésions neurologiques. « Le lien de causalité, indirect mais certain, entre l'infirmité motrice d'origine cérébrale et l'exposition au Distilbène », qui a provoqué la rupture prématurée de la poche utérine et la prématurité, « conduit à retenir la responsabilité de la société UCB Pharma, en dehors de toute autre cause retrouvée », ont conclu les magistrats du tribunal de grande instance dans leur décision.
Trois générations dédommagées
Le laboratoire, qui ne commercialise plus le Distilbène depuis 1983, devra payer une provision de 400 000 euros de dommages et intérêts à Julien Le Cossec, aujourd'hui âgé de 18 ans. Le tribunal a également alloué 150 000 euros à chacun de ses parents, 30 000 euros pour son frère cadet et 15 000 euros pour sa grand-mère, patiente ayant pris du Distilbène. Une hormone de synthèse largement prescrite aux femmes enceintes jusque dans les années 1970 pour prévenir les fausses couches. L'état de santé de Julien, handicapé à 80%, n'étant pas encore stabilisé, les magistrats ont ordonné une nouvelle expertise pour déterminer l'étendue des pathologies avant une fixation définitive des indemnisations.
Victoire pour toutes les victimes ?
La mère du jeune homme, Sylvie Le Cossec, s'est félicitée de « la reconnaissance de l'erreur médicale du groupe UCB Pharma », symbole selon elle de « la victoire de toutes les victimes Distilbène 2e et 3e générations ». Le laboratoire contestait le lien entre l'exposition in utero de la mère à l'hormone de synthèse et les pathologies de son fils, mettant notamment en exergue « la complexité des causes possibles du handicap », lors de l'audience du 30 juin (article en lien ci-dessous). « Aujourd'hui, le tribunal a statué sur ce lien de causalité. UCB assumera sa responsabilité », a indiqué à l'AFP Jean-Michel Joubert, porte-parole du laboratoire, alors que l'avocat du groupe, François de Cambiaire, a reconnu « une décision qui peut sembler logique d'un point de vue compassionnel ».
Dépakine : autre scandale sanitaire
C'est la quatrième fois que la justice française reconnaît la responsabilité du Distilbène dans des pathologies survenues sur des petits-enfants de patientes ayant pris du Distilbène, après une jurisprudence élaborée en 2011 par la cour d'appel de Versailles. Le Distilbène, aujourd'hui commercialisé par les laboratoires Gerda, est encore prescrit à des patients souffrant de cancers de la prostate. Cette décision de justice intervient au moment où éclate un vaste scandale sanitaire lié à la Dépakine (article en lien ci-dessous) ; des juges d'instruction vont enquêter sur cet anti-épileptique et sa prescription à des femmes enceintes malgré des risques majeurs connus pour la santé du fœtus (malformations et troubles autistiques).