Claude Boulanger, le citoyen-candidat-handi qui veut innover

Claude Boulanger-Réijnen est l'un des rares candidats handicapés à se présenter aux élections régionales de décembre 2015. Des propositions, il en a plein sa besace. Du concret pour améliorer le quotidien des Franciliens handicapés. Campagne...

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Handicap.fr : Sur quelle liste vous présentez-vous ?
Claude Boulanger-Réijnen : Celle d'Europe écologie les Verts (EELV) dans le Val-de-Marne. Je suis en troisième position sur une liste de 25 candidats, éligible au titre de la société civile. Nous espérons faire entre 10 et 15% dans le 94.

H.fr : Ce qui veut dire que vous n'êtes pas un élu ?
CBR : Non, je suis consultant en management d'entreprise. EELV a fait le choix d'ouvrir ses listes à tous les citoyens depuis 6 ans. C'est la seule liste qui le fait, en tout cas de manière ouverte. Sur celle des Républicains, par exemple, tous sont maires ou maires adjoints, sur la liste du Val de Marne en tous cas.

H.fr : Vous êtes l'un des très rares candidats en situation de handicap…
CBR : J'ai une maladie génétique qui me contraint à de lourds traitements. Et je suis ce qu'on appelle semi-marchant, souvent en fauteuil roulant. Ma situation s'est encore aggravée en 2008, quand j'ai été renversé par une voiture, avec ma mère. Elle en est morte. Au procès, le conducteur a dit qu'il était pressé…

H.fr : De quelle manière ce handicap visible impacte-t-il vos rencontres avec les électeurs, sur le terrain ?
CBR : Pour tout vous dire, je sors d'une phase de soins et je ne suis donc pas allé sur tous les marchés pour faire campagne. Mais, sur la photo de groupe, est-ce qu'il faut nécessairement que le handicap soit visible pour interpeler les électeurs ? Moi, je n'ai pas le choix ; j'ai mon carrosse.

H.fr : Mais n'est-ce pas un avantage d'être en situation de handicap pour défendre correctement les droits et intérêts des personnes handicapées ?
CBR : C'est sûr que ça aide, cela permet d'avoir une plus grande compréhension des problèmes auxquels nous sommes confrontés. Mais ce n'est en aucun cas une valeur ajoutée s'il n'y a pas un discours constructif derrière. C'est parce que j'ai mis les mains dans le cambouis que je suis devenu un acteur associatif légitime.

H.fr : Etes-vous en quelque sorte cantonné à porter les questions relatives au handicap ?
CBR : Bien sûr que non ! Je souhaite intervenir sur tous les champs de l'action sociale, la petite enfance, les personnes âgées mais aussi sur les transports, la formation professionnelle ou les questions européennes… Il y a même des élus handicapés qui veulent aller contre les préjugés et surtout ne pas s'occuper de l'action sociale. Et puis, il y a ceux qui le sont de manière temporaire ; Julien Dray, candidat PS, qui s'est déchiré le talon d'Achille, a annoncé qu'il ferait campagne en fauteuil roulant. Il a déclaré à Gala qu'il pourrait ainsi expérimenter l'inhumanité de la vie des personnes handicapées.

H.fr : Ces dernières semblent bien absentes dans le discours des partis lors de cette campagne, à part la profession de foi de Valérie Pécresse sur cette question.
CBR : Oui, qu'elle titre « La problématique des personnes handicapées ». Ce jour-là, j'ai appris que j'étais une « problématique » et pas une personne. Moi je dis : « Zéro pointé ! ». D'autant que son programme n'apporte rien de nouveau.  Mais il est vrai que les attentats du 13 novembre ont bouleversé nos cœurs mais aussi la campagne. La question est de savoir quand nous allons pouvoir discuter et échanger entre candidats.

H.fr : Quelles sont vos principales propositions ?
CBR : Nous en avons une trentaine… Notre mesure phare, c'est le dézonage des PAM (transport pour personnes à mobilité réduite à la demande) que l'on propose de passer sous Navigo. En d'autres termes, plus de différences selon les zones et les départements.

H.fr : Et la seconde, c'est la déclinaison de l'Agenda 22 sur les territoires, de quoi s'agit-il ?
CBR : L'Agenda 22 (article en lien ci-dessous), mis en place par la région Ile-de-France en 2012, c'est le Plan régional pour l'égalité entre personnes en situations de handicap(s) et valides. Il s'agit du nom donné aux 22 règles standard sur l'égalité des chances des personnes handicapées adoptées par l'ONU en 1993. Nous souhaitons que cet Agenda devienne un outil à l'échelle des petites intercommunalités, une plateforme locale où tous les acteurs engagés dans ce champ pourraient se réunir de manière profitable.

H.fr : Mais, concrètement, ça apporte quoi ?
CBR : Je vais vous donner un exemple : permettre à un foyer d'accueil médicalisé qui voudrait proposer de la nourriture bio à ses résidents de rencontrer un maraîcher local. C'est ailleurs ma troisième proposition : dynamiser la filière agro-alimentaire pour les personnes âgées ou handicapées en établissements afin de les nourrir plus sainement. On le propose bien dans les écoles…

H.fr : Il y a une autre proposition qui nous a interpelés… Des maisons de répit.
CBR : Oui, l'idée serait de créer des maisons de répit dans les douze bases de loisirs de la région. Elles proposeraient, du jeudi soir au dimanche, un cadre reposant pour les familles ayant un proche handicapé, avec une prise en charge adaptée. Pour passer du temps ensemble en soufflant un peu. Certains acteurs du médico-social m'ont regardé d'un air étonné et c'est pourtant une proposition très sérieuse, soutenue par le bureau d'EELV. Notre slogan, n'est-il pas « Changeons d'air ! » ?

H.fr : Vous siégez également au CESER (entité régionale du Conseil économique, social et environnemental). Avec quelle mission ?
CBR : Oui, c'est mon 2e mandat au titre de représentant des associations du champ du handicap. Je suis membre également  de la mission de préfiguration métropole Grand Paris. En fait, je m'investis dans de nombreuses instances et conseils de la République.

H.fr : Vous êtes également  responsable politique régional de l'AFP (Association des paralysés de France) et départemental pour le 94. Le 22 octobre 2015, un représentant de l'APF 75 rencontrait la tête de liste du FN, Wallerand de Saint-Just, ce qui avait suscité quelques remous (article en lien ci-dessous). Qu'en pensez-vous ?
CBR : Que c'était une décision personnelle de ce monsieur et qu'il n'y avait pas eu de concertation interne. A la suite de cette entrevue, Pierre Sachet et son suppléant ont été suspendus de l'exercice de leur mandat le temps de la procédure.

H.fr : Après tout, pourquoi pas le FN, un parti « comme un autre » ?
CBR : Rencontrer un parti et sa tête de liste quelle que soit son obédience, ce n'est pas le problème mais il aurait été habile d'en informer les responsables de l'APF 75. Le deuxième point, c'est que la priorité, dans la cadre de ces régionales, est de rencontrer les équipes sortantes pour dresser un bilan. Or le FN n'a aucun bilan, aucun maire parmi les 1280 en Ile-de-France et n'a donc jamais subventionné aucune action sociale par exemple. C'était donc une faute politique grave à la fois interne et externe au regard des valeurs d'exclusion portées par cette formation extrémiste.

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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