L'histoire de Philippe Ribière, c'est celle d'un parcours au sommet. Il voit le jour en 1977 en Martinique. Atteint d'une maladie congénitale qui déforme, notamment, ses mains et ses pieds, il est abandonné par ses parents à la naissance. Il passe les quatre premières années de sa vie dans un orphelinat, rythmées par les opérations chirurgicales qui lui permettent de récupérer un peu de mobilité. Il est adopté par une famille en France à l'âge de quatre ans.
Passion escalade
A l'adolescence, il découvre l'escalade qui, contre toute attente, devient sa passion. Philippe est à l'origine de « l'handi-escalade », milite pour la création d'une catégorie paralympique, fonde l'association Handi-grimpe et organise un tour d'Europe avec la volonté de mettre cette discipline sur le devant de la scène. En 2012, le long-métrage Wild One retrace l'histoire de sa vie. En 2013, il arrête la compétition mais ne renonce à aucun défi. Cette volonté farouche de faire face à l'adversité, d'oser où personne ne l'attend et de repousser sans cesse ses limites le pousse aujourd'hui à défier un site mythique, le rocher Es Pontàs de Majorque, dans sa discipline de prédilection, le « bloc ». Cette arche naturelle dominant la mer d'une vingtaine de mètres est considérée comme la voie la plus emblématique et la plus difficile au monde dans ce style d'escalade.
Le bloc, discipline à haut risque
En escalade, il existe plusieurs spécialités : l'alpinisme, les grandes voies, l'escalade sportive et le bloc. Pour les trois premières, l'usage d'une corde est nécessaire afin de limiter les risques, ce qui n'est pas le cas pour la dernière. Le bloc servait à l'origine d'entraînement pour les alpinistes préparant une ascension, et permettait de tester les mouvements difficiles, de développer l'endurance et d'augmenter la force des doigts. Dans les années 90, avec l'apparition de nouveaux équipements comme le crash-pad pour amortir les chutes au sol, il devient une discipline à part entière. Il connait un formidable essor dans les années 2000, et le premier championnat du monde est organisé en 2001. Depuis quelques années, une variante émergeante, souvent extrême, appelée « Deep water soloing » (en français : escalade solitaire au-dessus de l'eau), consiste à grimper des falaises en bord de mer sans autre sécurité que l'eau.
Es Pontàs, au-dessus des eaux
C'est dans ce contexte, dominant la Méditerranée, que le 29 ou le 30 août 2018 (selon la météo), Philippe Ribière fera cette folle tentative en gravissant la falaise d'Es Pontàs par la face ouest. Située à gauche de la voie principale, elle est réputée plus facile et, de ce fait, s'avère plus adaptée à la morphologie de Philippe. Il est le premier handi-escaladeur à oser cet exploit, d'autant plus incroyable qu'il ne dispose que de 20% de force dans ses avant-bras par rapport à un grimpeur valide. Il devra faire face à une difficulté majeure, la fragilité du calcaire, particulièrement friable, qui peut à tout moment céder sous ses prises, mais également à la hauteur et, en cas de chute, au risque de mauvaise réception dans l'eau. Le défi est donc immense pour cet escaladeur hors-pair qui, à chacune de ses tentatives, force le respect du grand public. Récemment, une vidéo tirée de l'émission de télé Riding Zone a relayé l'extrait d'un documentaire qui lui était consacré (vidéo ci-dessous). Elle a cumulé plus de 10 millions de vues !