* Défenseur des droits
Triste constat pour le handicap… Pour la deuxième année consécutive, il reste la principale cause de discriminations (22,8 %), « largement » devant l'origine (14,9 %) et l'état de santé (10,5 %). Elles sévissent principalement dans le domaine de l'emploi, aussi bien à l'embauche que tout au long de la carrière.
Discriminations en hausse
Le 12 mars 2019, Jacques Toubon, le Défenseur des droits (DDD), remet son cinquième rapport annuel d'activité. Au global, 95 836, c'est le nombre de dossiers de réclamations reçus en 2018, en augmentation de 6 % par rapport à 2017. Parmi eux, 5 631 concernaient des actes ou situations discriminatoires. « La persistance des discriminations a un haut niveau de prévalence s'explique par le jeu des systèmes économiques et sociaux mais aussi par la faiblesse d'une politique globale de lutte contre les discriminations », explique Jacques Toubon. Conclusions : pour les personnes handicapées, « l'année 2018 n'a pas été positive, notamment avec la loi ELAN ».
Services publics défaillants
« Notre but c'est l'égalité », annonce-t-il en préambule. Pour y parvenir, il faut notamment que « l'accès aux droits par les services publics soient assurés pour tous ». « C'est le nœud de notre travail, poursuit-il. La République ne peut pas accepter de faire des laissés pour compte de l'action administrative ». Le nombre de réclamations concernant les services publics a explosé : près de 56 000, soit une augmentation de 10,3 % en un an. Principale difficulté : la relation avec les usagers. Pour lui, cette hausse traduit « le recul » et « la défaillance » des services publics, « source de défiance, d'inégalités et de mise en cause des droits ». Si des réformes sont indiscutables, selon lui, elles doivent être faites « en pensant à ceux et à celles auxquelles elles s'appliquent et non pas uniquement en fonction des impératifs budgétaires et techniques des services qui mènent ces réformes ».
MSAP à développer
Pour faire face à ce « recul » et répondre aux besoins des citoyens éloignés, de par leur situation géographique ou physique, des MSAP (Maisons de services au public) ont fleuri un peu partout sur tout le territoire. « Ce mouvement est bon et correspond tout à fait à l'idée que l'on refuse la fatalité de la réduction géographique et humaine des services publics. » Encore faut-il qu'elles remplissent leurs obligations ? Jacques Toubon constate qu'aujourd'hui, « la moitié des MSAP sont de simples services d'accueil ». Son souhait : « avoir des organismes sociaux à proximité » ou disponibles par « visio-conférence », de sorte de pouvoir répondre aux questions des usagers.
Plus d'humain
« Nous demandons de l'humain, que les services publics soient hospitaliers et appréhendent chacun d'entre nous comme des personnes potentiellement en difficulté et pour lesquelles ils sont souvent le dernier recours pour l'accès aux droits », réclame le DDD. Dans son rapport sur la dématérialisation des services publics, rendu public le 17 janvier dernier, il s'inquiétait déjà de leur impact pour les personnes situées dans des zones blanches ou en situation de handicap (article en lien ci-dessous). Il demandait alors une « alternative systématique » à la procédure en ligne et un « accompagnement des personnes les plus en difficulté ». Des recommandations qui auraient, selon lui, été prises en compte par le président de la République, Emmanuel Macron.
Surmonter ces difficultés
Optimiste, le DDD croit à la « volonté des pouvoirs publics de prendre en considération ces besoins » et de « surmonter ces difficultés, par exemple dans la mise en œuvre d'obligations légales d'accessibilité ». Il en profite pour rappeler que l'accessibilité n'est pas seulement « physique » mais peu aussi concerner « le langage ». Pour favoriser une information compréhensive par tous, il prône la publication de textes en facile à lire et à comprendre (FALC). Pour l'avenir, il se veut rassurant : « Notre comité d'entente des personnes handicapées est extrêmement actif ». Il ambitionne également de mettre en place un comité d'entente pour avancer sur les discriminations liées à la perte d'autonomie, notamment pour les personnes âgées. Autre hausse, celle des réclamations concernant la situation des enfants malades et handicapés (18, 4 %).
Plus d'égalité territoriale
« L'accessibilité universelle a reculé et nous constatons toujours des problèmes d'inclusion, notamment scolaire », déplore le DDD. Il déplore par ailleurs un recul dans le domaine de la santé, en référence aux déserts médicaux et aux refus de soin (article en lien ci-dessous). Il pointe également du doigt une « insuffisance en matière de protection sociale », provoquée, entre autres, par « la décentralisation qui crée des inégalités territoriales ». Pour y faire face, le 11 février 2019, il a signé une convention avec la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) qui a pour objectif de favoriser l'accès aux droits et l'égalité de traitement sur l'ensemble du territoire, de toutes les personnes handicapées ou en perte d'autonomie.
Quelques avancées
Jacques Toubon tient tout de même à saluer « toute une série de mesures en faveur des majeurs incapables » -thème qui avait fait l'objet d'un rapport trois ans auparavant- et notamment l'autorisation du droit de vote pour les personnes sous-tutelle récemment instauré. A l'issue de ce rapport, il formule trois recommandations : garantir une présence humaine dans les relations des services publics avec leurs usagers, assurer l'accompagnement des personnes en situation de vulnérabilité, de précarité ou d'éloignement et retrouver l'esprit d'hospitalité et de solidarité qui est, selon lui, « la substance même de la République française ».