Maux de tête, douleurs au ventre, paralysie chronique… Parfois, les douleurs n'ont pas d'explication médicale mais ce n'est pas pour autant qu'elles n'existent pas. Au fil du temps, la liste des symptômes s'allonge et certaines personnes sont persuadées d'avoir un cancer ou une maladie rare. Elles passent de médecins en médecins, d'hôpitaux en hôpitaux, font d'innombrables prises de sang pour trouver l'origine de leurs maux mais en vain. Les docteurs sont unanimes : « Tout va bien ». Un verdict qui, plutôt que de satisfaire les patients, les inquiète. « Mais, bon sang, d'où viennent ces douleurs alors ? » Un jour, le diagnostic tombe : troubles somatoformes. Leur souffrance est bien réelle mais n'a aucune explication médicale, elle est d'origine psychologique.
Une maladie méconnue
« C'est dans la tête ». Cette phrase fait l'effet d'un coup de poignard pour de nombreux patients. « J'ai vraiment mal ! », se sentent-ils contraints d'insister. Mais cette douleur est souvent assimilée à un besoin d'attention, un manque de confiance en soi. Les personnes présentant des troubles somatoformes sont nombreuses à avoir un jour entendu cette phrase cash de la part de médecins surchargés ou simplement démunis. La méconnaissance de cette pathologie entraîne une mauvaise, voire une absence totale de prise en charge. Certains professionnels de santé renvoient simplement les patients chez eux lorsque l'analyse de sang est « correcte ». Cette attitude renforce la sensation d'incompréhension chez les jeunes, particulièrement touchés par cette pathologie, qui vont frapper à d'autres portes... Pendant ce temps, les symptômes évoluent. Les patients continuent leur investigation, font toujours plus d'examens et, finalement, le diagnostic de troubles somatoformes enfin posé est loin d'être celui attendu.
Un verdict au goût amer
« Encore un médecin qui prend mes symptômes à la légère ? » Cette réaction, légitime à l'annonce du verdict, finit par laisser place à l'acceptation, une fois le choc passé.
Les troubles somatoformes est une maladie mentale caractérisée par des symptômes physiques dont on ne connaît pas l'origine et qui persistent malgré les bilans positifs des médecins. Selon le DSM-5, le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, il en existe plusieurs : la somatisation, le trouble de conversion, le trouble douloureux, l'hypocondrie et la dysmorphobie corporelle (préoccupation exagérée d'un défaut imaginaire ou très léger). Aucun d'entre eux n'est produit intentionnellement. Les résultats des tests médicaux n'indiquent rien d'anormal et n'expliquent pas les douleurs ; les patients s'inquiètent pour leur santé car « aucun médecin ne semble capable de les soigner ». Ils peuvent alors être en proie à un stress intense et développent parfois des troubles psychiques comme la dépression.
Des troubles sévères
En général, les patients sont diagnostiqués avant l'âge de 25 ans. Les jeunes filles sont particulièrement touchées (70 %). Les symptômes varient selon le sexe : les garçons ressentent souvent une fatigue intense et les filles des maux de tête. Dans ce cas, il n'est pas question d'un léger stress avant un examen ou d'une douleur au ventre à l'idée de parler en public… Les adolescents désertent parfois les bancs de l'école pendant plusieurs mois et peuvent avoir des dysfonctionnements au niveau des organes, de la marche et du sommeil. Certains sentent même leurs membres se paralyser. Ces douleurs chroniques peuvent, à terme, entraîner des ruptures sociales. Des proches qui banalisent leur souffrance, des enseignants qui s'impatientent face aux absences à répétition, des amis qui les trouvent « bizarres »… Ce sentiment de rejet ne fait qu'accentuer leurs symptômes et poussent certains à se refermer sur eux-mêmes. Or l'isolement n'est pas la solution, bien au contraire.
L'approche des « trois P »
Les pédiatres encouragent la pratique d'activités physiques pour adopter une hygiène de vie saine et maintenir le lien social. Une alimentation équilibrée avec trois repas par jour et l'absence de drogue et d'alcool sont également recommandées. En parallèle, les spécialistes demandent aux parents de réduire leurs attentes envers leur enfant et « de ne pas exiger davantage que ce qu'il est en mesure d'accomplir ». Une source de stress trop intense ne fera qu'amplifier leur mal-être. Des médicaments peuvent être prescrits pour soulager les douleurs mais, seuls, ils ne représentent pas une solution adéquate sur le long terme. Les psychologues préconisent l'approche des « trois P », particulièrement utilisée au Québec : psychothérapie, physiothérapie et pharmacologie, qui permet au patient d'être pris en charge intégralement, de la tête aux pieds.
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