Les maladies mentales, 1ère cause de handicap dans le monde à l'horizon 2020. Pour quelles raisons ? « Il a été établi que ces maladies sont la conséquence de l'interaction entre des facteurs génétiques et environnementaux multiples », explique la fondation FondaMental. Mais, selon elle, en Europe, on compte deux fois plus de personnes atteintes de schizophrénie en milieu urbain qu'en milieu rural. Suggéré dès le début du XXème siècle, le niveau d'urbanicité (c'est-à-dire le fait de naître, de grandir et/ou de vivre en ville) dans le déterminisme des pathologies mentales suscite un regain d'intérêt depuis le début des années 2000. Fin novembre 2019, dans le cadre des Future Days, l'événement du Grand Paris sur les villes de demain, la Fondation organisait une table ronde afin de présenter les pistes de réflexion actuelles.
Risques accrus en ville ?
De nombreux travaux ont ainsi mis en évidence le fait que les personnes vivant en ville ont d'avantage de risque de développer des troubles psychiatriques (dépression, troubles du spectre de l'autisme (TSA), schizophrénie ou encore troubles anxieux) et que ce risque varie en fonction du quartier de résidence et de ses caractéristiques, avec parfois un effet-dose (plus la densité de population est importante, plus le risque de développer une pathologie psychiatrique est élevé). Cependant, ces mécanismes demeurent mal connus et, pour le Pr Marion Leboyer, directrice de la fondation FondaMental, « c'est une voie de recherche insuffisamment explorée. » Pourtant, des pistes se dessinent, notamment pour définir ce que serait une « ville bonne pour la santé mentale », permettant de mettre en œuvre des mesures de prévention.
Pollution en cause
L'influence de la pollution atmosphérique sur les troubles psychiatriques, facteur de risque connu de différentes maladies physiques telles que pulmonaires et cardio-vasculaires, serait également en cause, or elle a été jusqu'ici peu étudiée. Pourtant, il est avéré que la neurotoxicité des microparticules peut avoir une influence sur le développement psychomoteur. « On sait aussi que des maladies neurologiques, telles que la sclérose en plaques ou les tumeurs cérébrales, sont associées à la pollution atmosphérique », assure FondaMental. Selon cette dernière, des études ont montré que le suicide est corrélé aux pics de pollution. « L'exposition vie-entière à la pollution est associée au risque de schizophrénie tandis que l'exposition pendant la grossesse et la petite enfance est associée au risque de TSA, poursuit la Fondation. Par ailleurs, la proximité des axes routiers a été impliquée dans le risque de troubles du spectre de l'autisme ou de démence. » Pour aller plus loin, elle entend mener un projet pour rapprocher les cohortes de patients schizophrènes ou autistes de la cartographie de la pollution atmosphérique depuis 1990, en étudiant en parallèle l'impact de l'exposition de ces polluants dans des modèles animaux au cours du développement.
Une application dédiée
L'analyse des effets de l'urbanicité implique de mesurer ce qu'on appelle « l'exposome », c'est-à-dire l'impact des facteurs environnementaux sur la santé d'un individu de sa conception jusqu'à sa mort. Mais une telle démarche requière un nombre considérable de données parfois difficiles à récupérer. Dans ce contexte, Meersens a développé une application mobile et un objet connecté afin de faire le lien entre l'environnement d'un individu (air, eau, UV, bruit, alimentation, etc.), ses habitudes de vie et les pathologies qui en découlent. Ces outils permettent, par exemple, de suivre une cohorte de patients vivant en ville avec des modes de vie générant un stress chronique et déjà sujets à une dépression, et ainsi de visualiser dans le temps l'ensemble des évolutions. Les risques de développer une maladie mentale peuvent ainsi être calculés. L'appli propose alors des solutions et conseils pour rendre l'utilisateur proactif et lui permettre d'adopter une démarche préventive.