« Autisme sévère ». Lorsque le diagnostic est tombé, Jules avait six ans. Ses parents avaient détecté des signes mais, comme de nombreuses familles, ils ont dû se battre pour que le trouble neuro-développemental de leur enfant soit identifié et pour trouver une prise en charge qui l'aide à sortir de son enfermement. « Hyperactif, Jules a cessé de parler à deux ans et demi, relate sa maman à l'AFP avant la journée mondiale de sensibilisation à l'autisme, le 2 avril 2017. Il était dans son monde, mais les médecins disaient qu'il n'était pas autiste. On s'est battus pour lui faire passer des tests, avoir un bilan. »
Nouvelle méthode de prise en charge
Après le diagnostic, Jules a été scolarisé dans un IME (Institut médico-éducatif) mais la situation ne convenait pas. Ses parents l'ont gardé à la maison. La mère, magasinière, a quitté son emploi pour s'occuper de lui, et a essayé plusieurs approches qui n'ont « pas marché », jusqu'à ce qu'elle trouve sur internet la méthode des 3i (intensive, individuelle, interactive). Le garçon, qui a aujourd'hui 9 ans, passe depuis deux ans ses journées au centre Lud'Eveil de Courbevoie (Hauts-de-Seine). La petite structure accueille quatre enfants autistes et applique cette méthode innovante, basée sur le jeu. Née aux Etats-Unis, 3i est promue en France par l'association AEVE (Autisme Espoir vers l'École), qui encourage les parents à l'utiliser à plein temps chez eux, avec l'aide de bénévoles qui se relaient auprès de leurs enfants.
Pas encore recommandée
Selon sa mère, Jules a fait beaucoup de progrès. Au sein de Lud'Eveil, il participe également à des ateliers Montessori. La méthode des 3i, qui implique une trêve scolaire, n'est pas recommandée par la Haute autorité de santé (HAS). L'association espère qu'elle le sera lorsque la HAS actualisera ses recommandations, qui datent de 2012. Selon AEVE, 55% des 194 enfants ayant suivi la méthode rigoureusement pendant trois ans ont pu retourner à l'école ou être scolarisés à la maison.
Nouveau Pôle de compétences
« Les parents vont là où ils peuvent trouver un peu d'aide, d'espoir », souligne Danièle Langloys, présidente d'Autisme France qui, comme d'autres associations, préfère des programmes personnalisés basés sur des approches éducatives et comportementales (ABA, Denver, Teacch), recommandées par la HAS. Pour aider les parents d'enfants handicapés à financer des intervenants spécialisés (psychologues, psychomotriciens, ergothérapeutes ...), non remboursés par la Sécurité sociale, le gouvernement avait annoncé il y a un an la création de pôles de compétences et de prestations externalisées, suscitant de grands espoirs.
Trop peu de financement ?
Pourtant, les parents ont l'impression d'avoir été floués. « Le financement n'est pas à la hauteur des besoins », constate Mme Langloys. La mise en œuvre de ces pôles est progressive avec une quinzaine en fonctionnement, explique-t-on au cabinet de Ségolène Neuville, secrétaire d'État chargée du handicap. La querelle entre partisans des méthodes innovantes d'une part, d'une approche psychanalytique d'autre part, a été relancée en mai 2016 par une circulaire conditionnant le financement des établissements médico-sociaux à l'abandon du packing. Cette technique, consistant à envelopper étroitement les enfants dans des draps froids et humides, est assimilée à de la maltraitance par l'ONU et par les autorités sanitaires françaises, tandis qu'elle est défendue par certains psychiatres pour des cas très lourds (lire article en lien ci-dessous). Mme Langloys regrette pour sa part que la circulaire ne vise pas le secteur sanitaire, qui regroupe les hôpitaux de jour et les centres médico-psychologiques.
Direction la Belgique
Faute de prise en charge adaptée en France, certaines familles sont contraintes d'envoyer leurs proches ayant des handicaps complexes, comme l'autisme, dans des établissements en Belgique. Un plan destiné à stopper ces départs, doté de 15 millions d'euros en 2016, devra être poursuivi pendant plusieurs années pour avoir un effet, a prévenu l'Inspection générale des Affaires sociales (Igas) dans un récent rapport. Selon plusieurs associations, 650 000 personnes en France seraient atteintes d'un trouble du spectre de l'autisme (TSA). Alors que le troisième plan autisme s'achève fin 2017, les familles interpelleront les candidats à la présidentielle lors d'une « Marche de l'espérance » le 2 avril à Paris.
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