On subit tous le DALC ! Le Difficile à lire et à comprendre. Un texte de loi, un contrat d'assurance, un mode d'emploi… Combien sommes-nous à nous heurter à la complexité du discours officiel ou professionnel ? Pour tenter de ménager nos neurones, certains ont donc mis au point le FALC, le Facile à lire et à comprendre. Cette sorte de langage universel permet l'accès à la compréhension des personnes avec un handicap mental. Mais pas seulement ! Le bénéfice est manifeste pour le plus grand nombre…
Un objectif européen depuis 2009
Le FALC peut en effet faciliter la lecture de personnes dyslexiques, malvoyantes mais aussi de personnes étrangères maîtrisant mal une langue, illettrées, de personnes âgées, d'enfants du primaire. Sa portée ne doit donc pas seulement être vue par le seul prisme du handicap. Les profils des usagers potentiels sont certes différents, éparses mais, dans ce langage commun, simplifié, les facteurs qui unifient ces groupes sont bien plus nombreux que ceux qui les séparent. L'Europe s'est donc engagée dans le FALC dès 2009 avec la mission de réduire la fracture sociale liée au langage. On l'appelle en anglais « Easy to read ». C'est à Inclusion Europe que revient la responsabilité de définir une méthodologie commune, portée en France par l'Unapei et Nous Aussi, première association gérée par des personnes handicapées mentales dans notre pays.
5 grandes règles à respecter
- Utiliser des mots d'usage courant. Par exemple, mouchoir « à usage unique » est remplacé par « papier ».
- Faire des phrases courtes.
- Toujours associer un pictogramme au texte.
- Clarifier la mise en page et la rendre facile à suivre à travers des typographies simples, des lettres en minuscule, des contrastes de couleur…
- Aller au message essentiel.
Le message ainsi « adapté » doit ensuite être testé par les usagers concernés, quitte à revoir certains mots ou phrases complexes ou formes inappropriées. Le rédactionnel est réalisé ou transmis à un groupe de travailleurs handicapés d'Esat (Etablissement et service d'aide par le travail) qui se charge d'appliquer le « tampon » du label européen « Easy to read » pour validation. Le FALC s'applique à tous les documents écrits, audio, audiovisuels, électroniques, internet...
Un choc de simplification
Le FALC s'inscrit pleinement dans le « choc de simplification » engagé par la France depuis 2013. Un tiers des Français juge en effet que la relation avec les administrations est trop complexe. Deux cent mesures ont ainsi été lancées par le Gouvernement, dont une douzaine concerne les personnes handicapées (article en lien ci-dessous). Celle relative au FALC porte le numéro 30 et prévoit que les avis rendus par les CAF et MDPH, souvent techniques et complexes, seront désormais rédigés en « facile à lire et à comprendre » ; elle devait entrer en vigueur fin 2015. Corine Daver, avocate spécialiste en droit de la santé, en convient : « Nous sommes démunis pour rendre accessible ce qui est déjà très difficile à comprendre par le plus grand nombre, par exemple la loi d'adaptation de la société au vieillissement. Nous avons mis près d'une semaine à faire ce travail de synthèse. ».
Une centrale nucléaire pilotée par un Esat ?
Six ans après sa mise en œuvre, ce dispositif reste encore trop confidentiel. Pourtant, ses champs d'application sont vastes (juridique, voyage, santé, éducation…) et vont bien au-delà de la seule compréhension des personnes handicapées. Lors d'une conférence sur ce thème organisée le 1er octobre 2015 à Paris (article en lien ci-dessous), Christian Roux en donnait une illustration assez inattendue : la sécurité des centrales nucléaires. Prenant l'exemple de la catastrophe de Fukushima, au Japon, il explique qu'il faut mettre en place des procédures extrêmement simplifiées pour que même un jardinier soit en mesure de la commander en cas de danger. Les consignes sont données de manière très didactiques avec un minimum de texte, des photos des équipements, une police sans fioriture, en minuscule, en gros caractères et pas plus de deux couleurs en plus du noir et blanc. Ça vous fait penser à quoi ? Le FALC a donc toute l'apparence et les qualités d'un langage universel ; il en va de même en matière d'accès à l'information que du bâti, ce qui convient à une minorité rend la vie plus « easy » à tous. Alors à quand un réacteur piloté par un Esat grâce au FALC ?