Un rapport de l'Observatoire national des aides humaines, porté par Handéo, publie en septembre 2016 ses conclusions sur ce qui pousse un Service d'aide à domicile (SAAD) à arrêter ou refuser une intervention chez un usager. Neuf études ont été menées dans le cas d'un accompagnement auprès de personnes âgées de 4 à 65 ans, toutes porteuses de handicaps différents (myopathie, sclérose en plaques, maladie de Parkinson, polyhandicap…). En parallèle, un questionnaire a été remis à 256 services d'aide à domicile.
Peu de refus d'accompagnement
Les questions posées portent, entre autres, sur le type d'aide apportée, le niveau de salubrité du logement, les horaires de passage, la nature des comportements des personnes accompagnées ou encore les éventuels conflits apparus au cours des interventions. L'observatoire conclut que les services refusent rarement d'intervenir ou de mettre un terme à l'accompagnement proposé. Selon lui, certaines situations restent contraignantes mais pas nécessairement problématiques. « Dans d'autres cas, la rareté de la situation n'enlève rien au drame qui se joue pour la personne accompagnée et ses proches aidants, qui peuvent se retrouver en souffrance », relèvent les auteurs de l'enquête.
Des intervenants épuisés
Les arguments invoqués par les SAAD concernent, entre autres, les relations entretenues avec la personne accompagnée ou sa famille, et les risques encourus face à certains comportements. Dans trois des situations étudiées, les auxiliaires de vie ont cessé d'intervenir à cause d'un sentiment d'épuisement. C'est ce qui se passe, le plus souvent, lorsque les intervenants doivent faire face à des situations imprévues, si la personne refuse systématiquement une aide technique ou si les gestes effectués ne correspondent pas à ceux attendus. Pour une des auxiliaires interrogées, la pression était trop grande. « J'étais stressée parce que j'avais toujours peur de ne pas faire le bon geste et de faire mal à la personne, explique-t-elle. Peut-être me manquait-il une formation sur la gestuelle à adopter. »
Certains comportements à risque
Mésentente avec la personne accompagnée ou la famille, comportements risqués, voire violents, constituent également les motifs d'un arrêt. Selon Handéo, « l'intervention est interrompue plus fréquemment lorsque la personne accompagnée souffre de troubles du comportement ». C'est le cas de Farid, 25 ans, atteint de troubles autistiques. Il se déplace désormais en fauteuil roulant à cause de capacités physiques réduites. Régulièrement, il insulte les infirmières et les auxiliaires de vie qui viennent apporter une aide aux parents du jeune homme, inquiets pour son avenir : « Tout le monde n'aime pas faire ce travail, confie son père. S'occuper de quelqu'un comme mon fils, c'est spécial. En plus, il y a des déplacements, du stress, c'est difficile et souvent mal payé. »
Développer les capacités d'action
L'aspect juridique pèse également dans la balance. En cas d'actes risqués ou inadaptés, de durées d'intervention non conformes, ou de soins à prodiguer qui relèvent habituellement d'autres interventions, l'auxiliaire de vie met fin à ses missions. Pour ces raisons, Handéo pointe du doigt la nécessité de renforcer les capacités d'intervention des services, en termes de législation, de financements et de soutien de la part d'autres professionnels. Selon l'association, la lisibilité de l'offre de formations handicap pour les services d'aide à la personne reste également limitée (lire article en lien ci-dessous), l'objectif étant de pouvoir répondre à tout type de besoin, y compris en cas de troubles comportementaux. C'est là le prochain grand défi de la profession : identifier les personnes sans solution afin de mieux les guider, notamment dans le cadre d'un accompagnement global.
© JPCPROD / Fotolia