Handicap.fr donne la parole à Madame Régine Salvat, maman de Rémy dont le suicide a défrayé la chronique cet été. Vous pouvez réagir à son témoignage. Le sujet est sensible et ouvert à la polémique.
"27 ans d'amour et de soins prodigués par une maman, Lydie Debaine, à sa fille Anne-Marie, lourdement touchée par la maladie dès sa naissance. Un dévouement sans faille que la défense a su mettre en avant... Lydie Debaine l'a répété aux jurés « Vous savez, ce n'est pas parce que Anne-Marie était handicapée que j'ai eu ce geste. C'est parce qu'elle souffrait trop depuis quelques mois. C'était insupportable de la voir tant souffrir. Il n'y avait pas de solution... Elle me manque tant ! »
Acquittée en première instance
Jugée en 1ère instance, Lydie avait été acquittée. Le jury citoyen a pris une décision, en son âme et conscience. C'était son droit absolu. Il n'a pas jugé cette mère en « assassin ». Les jurés ont compris la profondeur de leur rôle, rappelée par Maître Caty Richard, l'avocate de la défense « Vous êtes là pour rendre la justice et non un jugement. » Ils ont rendu justice sans suivre aveuglément la loi, comprenant le sens de leur mission dans une démocratie : la loi peut-être inepte dans certaines situations. Les jurés ont apprécié les faits, au-delà des apparences. Ce faisant, par leur acquittement, ils ont renvoyé notre société à ses responsabilités, sa propre culpabilité : Lydie et Anne-Marie ont été reconnues les victimes d'un système coupable de défaillances majeures. Admirable compréhension, associant la raison et le cœur face à une indéniable réalité.
Le déni de la douleur
Une structure inadaptée (une Maison d'Accueil Spécialisée non médicalisée) a proposé (avec des restrictions) d'accueillir Anne-Marie ! Une MAS non médicalisée... Toutes les familles confrontées à la prise en charge d'un proche lourdement polyhandicapé savent ce que ce terme signifie ! Comment laisser son enfant dans une telle structure (l'unique proposée), non adaptée ? « Propre et neuve », dira l'enquêteur entendu...
Et que dire de l'absence totale de prise en charge de la douleur d'Anne-Marie ? Des souffrances indicibles que « seule la morphine aurait pu soulager » expliquera l'expert médecin légiste. Elle a constaté l'énorme pression intracrânienne que subissait Anne-Marie « plus d'un demi-litre de liquide non drainé détruisait le cerveau. » Le médecin neurologue n'a rien proposé. Rien de rien, tandis qu'Anne-Marie déclinait dans une lente agonie, une inéluctable aggravation de son hydrocéphalie devenue inopérable. L'abominable douleur, la fin de vie... Le corps médical n'a proposé aucune solution ! Infâme réalité...
Un procès orienté
Les fautes lourdes de notre société, le parquet la représentant n'a pas voulu les reconnaître. Il a fait appel de la première décision. Un appel que le hasard a confié a la Cour d'Assise de Versailles... Un appel dans lequel le hasard a désigné une Présidente de Cours dont l'unique objectif, au cours de ces 2 jours de procédure, était flagrant : accuser et faire condamner madame Debaine. Comment comprendre autrement l'acharnement de cette magistrate à orienter ses questions vers un unique but : accuser cette maman de n'avoir pas eu d'aide et même de l'avoir refusée !? Tous ceux qui ont assisté aux débats en ont eu l'intime conviction : la présidente n'a eu qu'une volonté, orienter la décision des jurés en faussant les données. Elle a rempli la fonction d'Avocat Général ! Que dire des visages des jurés ? Fermés, impassibles, glacés... De quoi faire frémir l'assemblée, composé de public et de journalistes. L'humanité ? Elle a filtré chez un seul homme digne de respect : l'Avocat Général, qui a même finit son réquisitoire en larme. Un comble assurément.
Quelle injustice !
Un sentiment de profonde injustice nous submerge à l'annonce du verdict. Lydie Debaine a été déclarée « coupable d'assassinat ». Quelle que soit la peine assortie à ce jugement (deux ans et demi avec sursis), il en ressort un indéniable constat : la véritable coupable, notre société française représentée par nos élus et l'Etat, n'a pas été condamnée. Les jurés ne lui ont pas réclamé un « examen de conscience »... L'Etat s'est défaussé de ses responsabilités et des débats nécessaires à l'évolution d'une société humaine et responsable digne de ce nom. La coupable véritable n'a pas été jugée !"
Régine Salvat, présidente de l'Association « Action Rémy »