Le 6 va-t-il devenir le chiffre de ralliement dans le milieu du handicap. 6% comme le quota de salariés handicapés imposé aux entreprises. Mais voilà qu'un autre 6 fait son entrée : 6% de militants handicapés inscrits sur les listes des partis politiques lors des élections. A eux deux, ils ne font pas la paire mais la douzaine. En dehors de toute ironie, cette démarche est le cheval de bataille de Handi Pop'. Cette association, créée en 2006, milite pour que la représentation nationale soit davantage à l'image des 10% de citoyens en situation de handicap en France. Son président, Frédérique Bouscarle, lui-même malentendant, profite de la cohue de la Conférence nationale du handicap, en juin dernier, pour faire le plein de supporters.
Une contrainte nécessaire ?
Il n'a qu'une question en tête : « Que pensez-vous de cette idée d'un quota en politique ? ». L'assemblée du jour lui est a priori acquise. Cette deuxième conférence n'est-elle pas placée sous le patronage du Ministère des solidarités et de la cohésion sociale ? Frédéric Bouscarle reste néanmoins prudent, dans le dialogue, certainement conscient que les contraintes imposées dans tous les domaines vont finir par exaspérer. Il dit n'avoir recours à cette solution que « faute de mieux » : « Je reconnais que c'est regrettable de toujours parler de quotas mais j'ai bien peur que la contrainte ne soit nécessaire pour faire évoluer les mentalités. » Son point de vue peut évidemment prêter à polémique. A trop vouloir instaurer des contingents, que certains ne manqueront pas de considérer comme des passe-droits, ne risque-t-on pas de retourner l'opinion publique contre ses bénéficiaires ? Surtout à une époque où la méritocratie a force de loi...
UMP : peut mieux faire !
Le président Sarkozy vient à peine de quitter la salle de la Conférence que le président Bouscarle s'empare à son tour du micro pour répondre à une interview télévisée. Il a beau être de la même « maison » (c'est un militant UMP), il a des choses à dire. « Le regard que porte mon parti sur le handicap n'est pas négatif mais je me bats pour que des élus handicapés soient proposés sur nos listes, en position éligible, et qu'ils aient enfin le droit de s'impliquer dans le débat politique. » Il ose proclamer « Le gouvernement a obtenu des résultats positifs mais il faut aller encore plus loin. Nicolas Sarkozy déclare que « le fait que les enfants soient intégrés dans le milieu ordinaire, c'est nécessaire. » Et bien, il en va évidemment de même dans la « classe » politique. »
Trop fragiles ?
Mais pourquoi un citoyen handicapé serait-il moins éligible qu'un autre ? On connaît la réponse comme un ressac incessant. Toujours le même écho. Peur de l'autre, du handicap, de la différence. Indignes de l'écharpe tricolore ? « Il est vrai que le schéma politique aime les icônes en toute puissance, déplore Frédéric. » Ajoutons à cela un autre argument : « Nos citoyens ont également peur qu'un élu handicapé ne soit réduit à ne s'intéresser et à ne favoriser que les questions de handicap. Cela n'a pas de sens ! Il faut en finir avec cette image réductrice et nous laisser la possibilité de montrer ce dont nous sommes capables. On dit souvent que les personnes handicapées, qui ont surmonté mille obstacles, ont une grande force et une immense volonté. Cela ne vous semble-t-il pas suffisant pour leur donner leur chance ? On craint notre fragilité alors que c'est tout le contraire ! »
0.1% d'élus handicapés
N'y-a-t-il donc pas quelques élus handicapés pour se donner bonne conscience ? Frédéric a beau chercher dans ses « archives », la liste est définitivement, honteusement laconique : Eric Molinié, myopathe, devenu président de la Halde, ou Damien Abad, le benjamin des eurodéputés, atteint d'arthrogrypose congénitale. Hervé Morin, président du Nouveau centre, n'avait-il pas dit, à propos de ce dernier, « Pour moi, c'est un symbole, en raison de la force de caractère que lui donne son handicap. » Frédéric Bouscarle était lui-même inscrit sur la liste de Chantal Jouanno (ministres des sports) lors des régionales Ile de France en 2010, mais pas en position éligible. Rien d'autre ? Vraiment ? Moins de 0,1% d'élus sont en situation de handicap. Dans ces circonstances, l'idée du quota, ça pousse évidemment à réfléchir. Et Frédéric de déplorer : « Il n'y a aucun député handicapé à l'Assemblée nationale, qui n'est, de toute façon, pas accessible ! On ne cesse de nous parler de citoyenneté, mais il faudrait commencer par s'occuper de toutes nos instances. »
Une loi en projet
Handi Pop' est sur ce front, mu par un président tenace et déterminé : « Mon combat durera le temps qu'il faut... » Il envisage de lancer une enquête sur le recensement des citoyens handicapés dans le paysage électoral. Dans un second temps, soutenu par quelques députés, à force de lobbying dans les rangs de l'Assemblée, il entend déposer un projet de loi. « La société française ne saura véritablement intégrer les différences que lorsqu'une partie de ses dirigeants sera issue de la population qui vit le handicap au quotidien ». En attendant, et dans la perspective des prochaines échéances électorales, Handi Pop' assure d'ores et déjà son soutien à tous les candidats en situation de handicap ou favorables à une meilleur représentation du handicap dans la sphère politique.
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Plus d'élus en situation de handicap : Handi pop' milite !
Handi Pop' entend déposer un projet de loi pour instaurer un quota de citoyens handicapés inscrits sur les listes des partis politiques lors des élections. Une démarche à double tranchant à manipuler avec précaution...