1è en Normandie : 4 élèves polyhandicapés au sein de l'école

En Normandie, une unité externalisée accueille des enfants polyhandicapés au sein d'une école élémentaire. Ce dispositif inédit dans la région conjugue enseignement spécialisé, accompagnement médico-social et inclusion scolaire.

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Un enfant polyhandicapé sourit dans une salle de classe près d’une femme adulte.

Dans la cour de l'école Jean-Cavaillès, au Grand-Quevilly (Seine-Maritime), des élèves de CM1 jouent aux côtés de quatre enfants en situation de polyhandicap. Adeola, Ania, Aïden et Shaïna, âgés de 7 à 9 ans, ont fait leur rentrée le 1er septembre 2025 au sein de la première Unité d'enseignement externalisée polyhandicap (UEEP) de Normandie. Pour ces jeunes venus de l'EEAP (Établissement pour enfants et adolescents polyhandicapés) Tony-Larue, c'est une plongée progressive dans la vie scolaire ordinaire ; pour leurs camarades, une rencontre concrète avec la diversité et une autre manière de tisser des liens.

Des moments partagés

Cette proximité se prolonge bien au-delà de la récréation. Chorales, lectures à voix haute, repas, activités sportives ou culturelles… L'UEEP multiplie les occasions de rencontre. « Chaque vendredi, les enfants participent aussi à des séances de sport adapté, comme la boccia, avec leurs camarades de l'école », souligne Bénédicte Alexandre, directrice adjointe de l'EEAP Tony-Larue. L'inclusion prend ici, selon elle, une forme tangible et quotidienne, au bénéfice de tous.

« L'école est le lieu où l'on apprend la tolérance »

Cette rentrée marque la deuxième année d'existence de l'UEEP à l'école Jean-Cavaillès. Six places sont ouvertes, dont quatre occupées depuis le 1ᵉʳ septembre, grâce à un partenariat entre l'EEAP Tony-Larue, la mairie, l'Éducation nationale et l'Agence régionale de santé. L'objectif est double : « offrir de véritables temps d'apprentissage à ces enfants, mais aussi favoriser l'interconnaissance avec les autres élèves, car l'école est le lieu où l'on apprend la tolérance », souligne Bénédicte Alexandre. « Ce n'est pas seulement un dispositif de plus, il s'agit d'une promesse tenue : celle du droit fondamental à l'éducation pour tous les enfants, quel que soit leur handicap, y compris le polyhandicap », ajoute l'Apajh, association gestionnaire de l'EEAP, qui met à disposition les professionnels médico-sociaux intervenant auprès des élèves.

Des aménagements sur-mesure

À l'intérieur, deux salles de classe ont été transformées. Mobilier ajusté, matériel pédagogique simplifié, supports sensoriels : tout est pensé pour faciliter la participation. Des tables avec une hauteur modulable, un plan incliné permettant le travail en position verticale ou encore des pinceaux et crayons adaptés sont notamment proposés. « La mairie a réorganisé l'école pour mettre ces locaux à disposition au rez-de-chaussée afin d'en faciliter l'accès, malgré la présence d'un ascenseur. L'UEEP dispose ainsi d'une classe principale et d'une salle annexe dédiée aux temps calmes et aux soins du quotidien », détaille Mme Alexandre.

Autre adaptation : des séquences d'apprentissage courtes - 45 à 90 minutes - pour tenir compte de la fatigabilité des élèves. Par ailleurs, pour favoriser un apprentissage « sur-mesure », chaque enfant bénéficie d'un Projet personnalisé de scolarisation (PPS), élaboré avec sa famille et l'équipe médico-sociale.

Une journée type à l'UEEP

L'emploi du temps est réparti sur quatre jours. « Chaque matin, les enfants arrivent en taxi entre 8h30 et 8h40. Après un rituel d'accueil (appel, météo), ils enchaînent sur des activités pédagogiques de niveau prérequis maternelle (apprentissage des couleurs, attention, concentration) », développe Bénédicte Alexandre. Les apprentissages sont assurés par une enseignante spécialisée, épaulée par une éducatrice et une aide médico-psychologique. L'équipe peut aussi compter sur l'appui régulier de kinésithérapeutes et de psychomotriciens. « C'est un travail d'articulation entre école, soins et inclusion sociale », résume Bénédicte Alexandre. Les élèves profitent ensuite de la récréation pour retrouver leurs camarades, avant de repartir à 11h30 pour déjeuner et poursuivre l'après-midi à l'EEAP, où ils pourront bénéficier de repas adaptés et de temps de rééducation (kinésithérapie, psychomotricité) et éducatifs.

Une expérience pionnière plébiscitée par les parents

Au-delà de l'expérience locale, cette unité externalisée fait figure de pionnière. Les parents, régulièrement conviés à des rencontres et des sorties scolaires (spectacles musicaux au Zénith, au Trianon…), se disent très satisfaits de cette expérience qui « ouvre des portes que l'on croyait fermées », témoigne Bénédicte Alexandre. « Nous sommes fiers de cette réalisation, mais n'oublions pas les milliers d'enfants qui sont à l'école de manière fractionnée ou en attente de rejoindre leurs camarades », rappelle l'APAJH. 

Un modèle à essaimer

Si l'UEEP de Grand-Quevilly est la première en Normandie, d'autres unités similaires ont vu le jour dans plusieurs régions : en Île-de-France (Essonne, Seine-Saint-Denis, Seine-et-Marne, Yvelines…), en Provence-Alpes-Côte d'Azur (Marseille, Bouches-du-Rhône) ou encore en Mayenne. Ces ouvertures sont le fruit d'une stratégie nationale impulsée depuis 2020, avec l'objectif de mettre en place une UEEP par département. Elles traduisent une volonté de rapprocher école publique et établissements médico-sociaux, pour que la scolarisation des enfants polyhandicapés en milieu ordinaire cesse d'être une exception et devienne une évidence.

© FatCamera de Getty Images Signature

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Cassandre Rogeret, journaliste Handicap.fr"
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