Une douleur constante accompagnée de fourmillements, sensation de brûlures, œdèmes, raideurs, troubles vasomoteurs et une peau très sensible au point de ne pas supporter un vêtement... Ce n'est qu'un échantillon des symptômes provoqués par l'algodystrophie. Cette maladie rare, également appelée syndrome douloureux régional complexe (SDRC), est due à une mauvaise circulation sanguine et se caractérise par une inflammation anormale sur une région du corps située à proximité d'une articulation (poignet, épaule, pied, genou...), qui survient souvent à la suite d'un « traumatisme », comme une intervention chirurgicale ou une entorse. Selon les estimations, environ 50 000 Français seraient concernés. Si, la plupart du temps, elle guérit spontanément, certains patients ne comptent plus le nombre d'années passées à la combattre. Leur point commun ? Un manque, voire une absence totale, de prise en charge.
Signal d'alarme actif en permanence
Tout est dans le nom... « Algo » du grec « douleur » et « dystrophie », qui s'apparente à un trouble du développement ou à une altération cellulaire. « La douleur est un message nerveux transmis au cerveau par les nerfs via la moelle épinière. C'est un signal d'alarme qui permet de prendre conscience qu'une partie du corps est agressée et qu'il faut réagir de façon appropriée. Pour des raisons inexpliquées, dans l'algodystrophie, le message de douleur est continu et on ne sait pas encore ce qu'il faut faire pour que cesse l'agression de la partie du corps concernée », explique l'association Algodystrophie France. De même, pour fonctionner, nos cellules ont besoin de carburant, c'est le rôle du sang, qui apporte tous les éléments nécessaires au bon fonctionnement du corps humain. « Chez les personnes touchées par le SDRC, le sang arrive difficilement car les veines ne se dilatent pas et ne se contractent pas normalement. Cela entraîne des lésions diverses qui peuvent être graves et entraîner une invalidité définitive », poursuit-elle.
Deux types de SDRC
Il existe deux types d'algodystrophie. Dans le premier, le plus fréquent, anciennement appelé algoneurodystrophie, aucune lésion nerveuse n'est à déplorer. La douleur survient à la suite d'une blessure et se répand sur une zone importante du corps, voire sur la totalité d'un membre, et se manifeste par des troubles de la circulation (gonflement, sudation), des rougeurs sur la peau ou encore une décalcification osseuse (diminution de la teneur en calcium). En cas d'« algo » de type 2, un nerf endommagé localement provoque une hypersensibilité des tissus environnants. Le hic, c'est que, bien souvent, aucun signe clinique n'apparaît au départ... Un vrai casse-tête pour les professionnels de santé qui peinent à identifier la maladie. Résultat : une errance médicale qui peut coûter cher... « J'ai commencé à avoir mal à la cheville gauche en novembre 2015 mais l'algo n'a pas été diagnostiquée immédiatement », explique Céline, 36 ans. Deux opérations et trois ans plus tard, la maladie est toujours là et contraint parfois la jeune femme, qui a dû cesser son activité professionnelle, à se déplacer en fauteuil roulant.
Isolement social
Lorsque cette pathologie s'installe dans la durée, elle peut provoquer des troubles du sommeil et de la concentration, de l'anxiété, de l'irritabilité, une grande fatigue et un isolement social, comme en témoigne Siana, 10 ans : « L'algodystrophie me fait passer presque toutes les semaines en béquilles. Du coup, je ne peux plus du tout faire de sport. Oubliés mes cours de danse classique et de gym, alors que j'adorais ça ! Oubliés les anniversaires de mes amies aussi... La plupart proposent des activités physiques ou des choses que je ne peux pas faire », déplore la fillette. Sans parler du sentiment de « honte » que certains développent en cas de gonflement disproportionné d'un membre... A noter que le SDRC peut survenir à tout âge et, selon les études, affecte plus fréquemment les femmes que les hommes, avec un ratio de quatre pour un. La durée d'évolution de la maladie varie entre six mois et deux à trois ans, en fonction de la localisation de la douleur. Les membres supérieurs (près de 60 % des cas) seraient davantage touchés que les inférieurs, en particulier après une chirurgie des extrémités (canal carpien). En général, le patient traverse trois phases : chaude (inflammatoire), froide (membre froid et pâle) et, enfin, la guérison.
Origine inconnue
Si de nombreux traitements sont proposés aux patients, aucun n'aurait démontré une efficacité incontestable. Il est, cependant, possible d'atténuer les douleurs avec une prise en charge pluridisciplinaire, et, plus elle est précoce, mieux c'est. Ainsi, le traitement le plus efficace associerait le repos, la kinésithérapie et la prescription de médicaments. L'hydrothérapie, les bains écossais (qui alternent des températures hautes et basses), la neurostimulation (TENS) ou encore les cataplasmes d'argile et un apport en vitamine C ont également fait leurs preuves. Malgré les progrès de la médecine, l'origine de l'algodystrophie reste, pour l'heure, inconnue. Ce qui est certain, en revanche, c'est que « personne n'est à l'abri », souligne Algodystrophie France. Pour démystifier cette maladie complexe, améliorer sa prise en charge et faire progresser la recherche, l'association mène différentes actions de sensibilisation. Son credo : « Beaucoup plus fort ensemble ».