« La France maltraite-t-elle ses citoyens en situation de handicap ? » C'est la question posée par un collectif de parents. Plus qu'une interrogation, un « constat » malheureux, selon ces familles. De guerre lasse, elles se sont réunies pour appeler à un grand rassemblement national devant toutes les MDPH de France, « une première nationale », selon elles. Leur credo : « Un droit n'est pas une faveur ! ». La date est fixée au 11 février 2020. Tout un symbole puisque ce sera à la fois l'anniversaire des quinze ans de la loi handicap de 2005 et la Conférence nationale du handicap, réunie à l'Elysée autour d'Emmanuel Macron (article en lien ci-dessous). « C'est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase, explique Charlotte Langlois, maman de deux enfants en situation de handicap, membre du collectif. A grand renfort de communication, le gouvernement veut nous convaincre que tout va bien. L'impatience générale a été précipitée par l'annonce de cet événement. Alors, ce jour-là, nous serons aussi à pied d'œuvre. »
Un mouvement citoyen
Qui est aux manettes de cette mobilisation ? « Ce mouvement citoyen est initié par et pour les personnes concernées par le handicap, leurs aidants potentiels, leurs proches, par une quinzaine de citoyens engagés », répond l'une d'elles, Lucie Michel, maman d'un garçon autiste et épileptique sévère, qui a prévu de manifester devant la MDPH d'Orvault (44). « Depuis l'annonce de cet appel à manifester, nous avons reçu des milliers de témoignages concordants », assure cette maman rappeuse qui a, elle-même, a attendu « quatre ans, une chanson et un battage médiatique » pour recevoir, enfin, une notification (article en lien ci-dessous). Ce collectif entend « alerter les pouvoirs publics sur la situation » et « dire STOP ! » aux « défaillances d'un système dont les rouages ont sauté au détriment des droits des usagers ». « Nous pensons que c'est en se mobilisant tous ensemble que nous pourrons y parvenir ! », ajoute ce collectif.
Revendications multiples
Ses revendications sont multiples, qui remettent en cause l'efficience de ces Maisons en dépit du chantier de transformation et de simplification engagé par le gouvernement, visant, notamment, à permettre des attributions à vie pour désengorger les services et à uniformiser les procédures et les décisions d'attributions au niveau national pour plus d'équité (article en lien ci-dessous). Les requêtes du collectif portent également sur le « respect de l'orientation choisie par l'autorité parentale comme l'indique la loi ». Il dénonce par ailleurs des changements de régimes ou de droits sans que les raisons ne soient motivées ni la famille conviée aux commissions et réclame une meilleure prise en compte des besoins d'accompagnements scolaires, ainsi que le remboursement en urgence des frais de scolarité des « sans solution » ou encore une meilleure évaluation pour un financement de matériel indispensable plus juste et équitable (véhicule, tablette de communication adaptée...).
Des familles acculées
« Vices de procédures », « manipulations grossières pour faire traîner les dossiers » entravent, selon ses militants, l'accès aux droits. Le collectif évoque « des vies particulièrement malmenées, des procédures bafouées par les MDPH elles-mêmes, des dépassements de délai ayant pour conséquence des ruptures de droits dramatiques ». Face à des « recours administratifs de plus en plus complexes », les familles seraient « acculées » et « abandonnées par les politiques », au mépris des « législations pourtant en vigueur ». Un constat somme toute partagé par Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat au Handicap, qui, à l'occasion de son tour de France des MDPH -elle visite le 30 janvier celle de l'Yonne-, confirme que « les délais de traitement sont variables, et parfois beaucoup trop longs, tout comme les taux d'attribution ». Elle juge même certaines démarches administratives « inutiles et indignes » pour les personnes dont le handicap n'est pas susceptible d'évoluer favorablement.
« L'objectif, poursuit Charlotte Langlois, c'est que les familles puissent se réapproprier leurs droits et n'attendent plus des mois que leur sort soit fixé. Les associations font le job mais l'idée c'est que les citoyens se tiennent aussi prêts à monter au créneau. » Elle dit avoir elle-même subi de nombreux dysfonctionnements pour ses deux enfants, au point de devoir saisir la justice.
30 départements mobilisés
Dans ce contexte, un coordinateur dans chaque département est chargé de l'organisation de cette manifestation, qui se veut « non violente », par le biais de leur page Facebook (MDPH mobilisation nationale). Une pétition est, par ailleurs, en ligne qui a recueilli 666 signatures. « Des départements s'en emparent plus que d'autres », constate Charlotte Langlois. Une trentaine est déjà mobilisée mais une liste définitive sera publiée six jours avant l'échéance. Le jour J, Charlotte sera devant les portes de la MDPH d'Annecy. « Mais notre mobilisation ne s'arrête pas au 11 février, promet-elle. Ce n'est que le début ; le ras-le-bol est tel qu'il y aura un après… » « Avec l'objectif de faire remonter les situations problématiques aux ARS (Agences régionales de santé) », complète Lucie Michel, qui consent que « les MDPH font avec leurs moyens même si certaines abusent de leur pouvoir ».
Dans le même temps, les grosses associations du champ du handicap ont également choisi le « collectif ». Le 28 janvier 2020, 47 d'entre elles annoncent la création du Collectif Handicaps (article en lien ci-dessous). Même volonté, autres moyens avec pour objectif commun : faire entendre leur voix et respecter les droits !
© Photo d'illustration générale d'une action menée dans le 74 en 2017