"Ludique et stimulante", Emoface aide à l'insertion des personnes autistes "qui ont des difficultés à reconnaître, à exprimer des émotions et à gérer des situations sociales", explique à l'AFP sa créatrice roumaine Adela Barbulescu, 31 ans, chercheuse en informatique à l'Université Grenoble Alpes.
Un avatar sur tablette
Sur une tablette, Greg, avatar de jeune garçon en 3D, imite en temps réel les expressions de celui qui manipule l'application. C'est la fonction "miroir virtuel". L'utilisateur peut aussi apprendre les expressions faciales en modifiant celles de l'avatar : hausser les sourcils, le faire sourire, froncer le nez... Un jeu propose de déterminer quelle émotion éprouve l'avatar, et le joueur reçoit des "félicitations" s'il y parvient. L'application permet aussi d'étudier des situations sociales (aller dans un commerce, demander de l'aide, se présenter...). Le prototype, testé depuis plus d'un an et issu du laboratoire de recherche GIPSA-lab (CNRS, Grenoble-INP et Université de Grenoble Alpes), est basé sur six émotions (colère, joie, tristesse, peur, surprise, dégoût), 16 autres plus subtiles sont prêtes (jaloux, ironique, incrédule, scandalisé...) et l'application s'enrichit sans cesse.
Un atlas des émotions
Adela Barbulescu s'inspire notamment des travaux de Simon Baron-Cohen, un chercheur en psychologie de Cambridge, spécialiste de l'autisme, qui a recensé 412 émotions différentes. "J'aimerais créer un atlas des émotions, explique-t-elle, mais je ne sais pas si elles seront toutes traduisibles par un avatar". L'application bénéficie du soutien d'un incubateur, Linksium, et repose aussi sur une designeuse graphique, Mayra Lima. Un modèle de personnage trisomique est en préparation. Le prototype est utilisé notamment depuis le début de l'année scolaire à Grenoble auprès de 21 enfants et adolescents de la première unité consacrée en France à l'autisme par APF France handicap. Selon son directeur, Dominique Dossena, l'application est "innovante et adaptée" à "une génération d'enfants aimant les tablettes", et c'est "un excellent complément à notre pratique".
10 millions de téléchargements espérés
Il remarque que l'application est rassurante car elle "donne toujours la même consigne avec la même voix, le même ton". Mme Barbulescu souhaite désormais effectuer un test clinique officiel, suivi d'une publication dans des journaux scientifiques, afin qu'Emoface puisse être labellisé. Elle espère un million de téléchargements gratuits d'ici à trois ans, et envisage un coût d'abonnement pour le contenu premium de l'ordre de 10 euros par mois comprenant une réactualisation permanente.