Il y aura bientôt dans tous les carnets de santé des enfants un questionnaire approfondi pour détecter des troubles éventuels du neurodéveloppement (TND) : autisme, TDAH, dys, troubles du déficit intellectuel… C'est l'une des mesures de la stratégie autisme 2023-2027, rebaptisée TND, qui a été dévoilée par Emmanuel Macron le 14 novembre 2023 (Lire : Stratégie autisme/TND 2023-2027 : les premières mesures).
Jusqu'à maintenant, dans le carnet de santé du jeune enfant, on trouvait sa courbe de poids, ses vaccins et quelques éléments pour permettre « d'apprécier son développement et de déceler d'éventuelles anomalies » avec un questionnaire sommaire sur ses aptitudes psychomotrices. Mais l'intervention précoce initiée dans la stratégie 2018-2022, au cœur des enjeux, imposait d'aller plus loin, avec un repérage de grande ampleur…
Déjà un guide existant
Il existe déjà un guide « Détecter les signes d'un développement inhabituel chez les enfants de moins de sept ans », disponible en version papier et en ligne. Une grille en 20 pages à remplir par le médecin via une série de « signes d'alerte » pour chaque âge. « Ces questions très simples ont déjà fait leurs preuves », assure Etienne Pot, délégué interministériel à la stratégie autisme, fraîchement nommé en novembre 2023 (Lire : Le Dr Etienne Pot nommé délégué interministériel autisme/TND). Elles portent sur quatre domaines : motricité globale, motricité fine, langage oral et socialisation. Par exemple, à 6 mois, « Sourit en réponse au sourire de l'adulte », à 12 mois, « Fait des gestes sociaux (au revoir, bravo) », à 3 ans « Prend plaisir à jouer avec des enfants de son âge ». Deux « non » dans deux domaines différents peuvent alerter. C'est donc l'intégralité de ce livret qui doit être insérée dans le carnet de santé papier et numérique de manière « systématique », « au cours de l'année 2024 », selon le ministère délégué au Handicap. Ce bilan sera mis en œuvre pour tous les enfants de 0 à 6 ans lors des visites médicales obligatoires, en libéral et dans les écoles maternelles.
Secret médical préservé
Si certains redoutent une stigmatisation des enfants, « fichés » dès le plus jeune âge, avec des « risques élevés de fuite de données et de discriminations », Etienne Pot, en tant que médecin, se dit « très surpris car ces informations sont totalement confidentielles et ne seront éventuellement divulguées au sein de l'école qu'au médecin scolaire ». Il promet donc que le « secret médical sera respecté », précaution « valable pour les TND comme pour n'importe quel autre trouble y figurant ». « J'aurais sans doute préféré que des cases à cocher dans un carnet de santé permettent de voir que je ne me développais pas comme les autres enfants, témoigne Aurélie. Ça aurait peut-être raccourci mon errance. »
Vers une orientation précoce
Après analyse du médecin, ce dernier peut en effet décider d'adresser l'enfant à une plateforme de repérage ou prescrire des examens complémentaires chez différents professionnels (kiné, ophtalmo, ergo, psychomotricien…). Cette mesure vise donc à « mieux informer parents et professionnels de santé sur les facteurs de haut risque de TND (prématurité, poids de naissance, antécédents familiaux, toxiques…) afin de proposer un suivi attentif dès les premiers mois », affirme la Stratégie. Rappelons qu'au 1er juillet 2023, 55 000 enfants ont été adressés vers l'une des 122 plateformes de coordination et d'orientation (PCO), contre 150 en 2019. Reste à savoir si, au-delà des (bonnes) intentions, le système actuel est en mesure de faire face à cet afflux inéluctable. On estime à 17 % le nombre de personnes avec un TND en France.