« 2 500 solutions nouvelles sont installées ou programmées en France pour prévenir les départs non souhaités des personnes en situation de handicap en Belgique », contre les 1 000 places initialement prévues, annonce le secrétariat d'Etat au Handicap le 2 février 2022.
8 500 Français
A ce jour, 7 000 adultes et 1 500 enfants français sont accueillis dans des établissements belges wallons. Cette mesure permettra-t-elle d'accélérer un plan qui, déployé depuis 2016, peine encore à produire ses effets ? En effet, au 31 décembre 2019, ils étaient 6 820 adultes et 1 413 enfants. Un an plus tôt, ils étaient 6 109 adultes. Il est vrai que le dossier est complexe ; si des départs se font contre la volonté de certaines familles, d'autres, et elles sont nombreuses, continuent de préférer l'option belge, faute de solutions de qualité en France. Alors ces nouvelles opportunités vont-elles enfin changer la donne ?
Pour mettre fin aux « exodes forcés », le gouvernement a adopté une stratégie double : mettre en place un moratoire sur la création de places en établissement médico-social belge au 28 février 2021 et accélérer le déploiement de solutions adaptées en France, pour « permettre aux personnes de poursuivre leur parcours de vie auprès de leurs proches, près de chez elles », selon Sophie Cluzel, tout en respectant le « libre choix » de ceux qui veulent rester en Belgique, notamment les familles qui vivent près de la frontière.
Une démarche qualité ?
Notre secrétaire d'Etat au Handicap s'est entretenue le 31 janvier avec son homologue wallonne, Christie Morreale, à l'occasion de la commission mixte qui se tenait le même jour que le 2e comité de suivi. La réunion de travail a porté sur l'accueil des ressortissants français, la démarche de conventionnement en cours avec les établissements wallons qui accompagnent des adultes français et le dispositif d'inspections conjointes franco-wallon. Alors que certains établissements sont parfois qualifiés « d'usines à Français », les ministres ont réaffirmé leur « ambition commune (...) d'un accompagnement de qualité », notamment via la démarche de conventionnement menée par l'Agence régionale de santé Hauts-de-France, qui a déjà permis de valider 80% des 171 établissements wallons (foyer d'accueil médicalisé et maison d'accueil spécialisée) concernés par le moratoire. Le gouvernement français entend apporter « une réponse forte de l'Etat pour faire face à ces départs parfois organisés en filières ou répondant à des démarches commerciales ». Toute nouvelle admission dans des établissements qui n'ont pas conventionné dès ce 1er février 2022 sera suspendue, prévient Sophie Cluzel. Une mise en opérationnalité « qui va dans le bon sens », selon les associations présentes au comité de suivi.
3 régions concernées
Depuis 2020, 90 millions d'euros sont engagés sur trois ans pour permettre aux trois régions les plus touchées par ces départs de créer des accueils sur leur territoire, cofinancés par l'Etat et les départements. Ces 2 500 solutions nouvelles sont réparties de la façon suivante : 1 600 en Ile-de-France, 630 dans les Hauts-de-France et 270 dans le Grand-Est. Il peut s'agir d'extensions de place en établissement, d'habitats inclusifs, de services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés (Samsah)... Sophie Cluzel déplore néanmoins que tous les appels à projets n'aient pas trouvé preneur, notamment dans deux départements d'Ile-de-France.
Une maison pour tous à Paris
La ministre a cité en exemple « Une Maison pour tous », dispositif porté par la Fondation Elan retrouvé, qui propose des solutions inclusives en plein de cœur de Paris (19ème) pour les personnes souhaitant revenir de Belgique ou en manque de places en Ile-de-France. Ouverte le 1er janvier 2021, elle accompagne vingt jeunes adultes avec d'importants troubles du spectre autistique vers l'autonomie dans des appartements de quatre résidents. Charles, l'un d'entre eux, a fait sa scolarité au collège dans des classes spécialisées puis a intégré le milieu ordinaire pour obtenir un bac professionnel commerce au lycée. Ensuite, à cause de certaines difficultés, il a dû se résoudre à aller dans un établissement belge durant quelques années. « Je suis revenu en France, j'ai eu la chance d'intégrer une Maison pour tous, solution qui me permet de vivre un peu comme tout le monde à Paris », témoigne le jeune homme.