Par Gabriel Bourovitch
Le fameux "trou de la Sécu" n'est pas encore comblé, mais en attendant l'extinction de la dette sociale prévue pour 2024, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2019 devrait rester comme celui de la fin des déficits. Un excédent est en effet attendu, ce qui serait inédit depuis 2001 et la célèbre "cagnotte" du gouvernement Jospin, dont tous les successeurs ont promis de rétablir l'équilibre des comptes de la Sécu, sans succès.
De bons auspices ?
Le premier budget de l'ère Macron n'a pas dérogé à la règle : voté fin 2017, il tablait sur un déficit de 2,2 milliards d'euros cette année, puis un solde global positif de 800 millions l'an prochain pour les quatre branches du régime général (vieillesse, maladie, famille, accidents du travail) et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV). L'objectif est à présent à portée de main, d'autant plus que les prévisions pour 2018 ont été nettement améliorées, avec un déficit désormais attendu autour de 400 millions d'euros. Même si ce montant pourrait être révisé en baisse à cause du ralentissement de la croissance et de l'emploi, le PLFSS 2019 a pu être préparé sous de bons auspices.
Tour de vis
Cette manne annoncée sera bienvenue pour concrétiser les quatre grands plans dévoilés ces derniers mois par l'exécutif, en faveur des Ehpad (établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes), du "reste à charge zéro" sur certains soins (optique, dentaire, audioprothèses), contre la pauvreté et sur la "transformation" du système de santé. Sans oublier d'autres mesures qui feront encore grimper l'addition : revalorisation du minimum vieillesse, "correction" de la hausse de CSG pour les retraités modestes, exonération des heures supplémentaires, coup de pouce pour la garde d'enfants handicapés, allongement du congé maternité pour les travailleuses indépendantes...
400 millions de rallonge
Pour financer cette cascade de promesses, le gouvernement a d'ores et déjà décidé de desserrer l'étau budgétaire sur les dépenses de santé, qui augmenteront de 2,5% au lieu des 2,3% programmés, soit une rallonge de 400 millions d'euros. Mais les vannes sont loin d'être grandes ouvertes et d'importantes économies sont encore attendues en 2019. Car "sans mesures nouvelles", le déficit replongera à 3 milliards d'euros l'an prochain, prévient la Commission des comptes de la Sécu. Comme chaque année, l'Assurance maladie devra freiner l'évolution spontanée de ses dépenses, estimée à 4,5%. Elle devra donc trouver 3,8 milliards d'euros sur les prix des médicaments, les arrêts de travail et la chirurgie "ambulatoire", entre autres.
La Sécu toujours dans le rouge
Cet effort, au même niveau que les années précédentes, ne suffira toutefois pas à sortir la Sécu du rouge. L'objectif sera atteint grâce à un tour de vis sur les pensions de retraite servies par l'Assurance vieillesse et sur les allocations familiales, qui seront revalorisées de 0,3%, bien en-deçà de l'inflation. Rien que pour les retraites, l'économie attendue s'élève à 2 milliards d'euros, selon Bercy. Des coupes qui serviront aussi à compenser un désengagement de l'Etat: à partir de 2019, les nouvelles exonérations de cotisations décidées par l'exécutif ne seront plus compensées intégralement à la Sécu. Ce sera ainsi le cas de la suppression du "forfait social" de 20% sur l'intéressement dans les entreprises de moins de 250 salariés. Une mesure en faveur des entreprises chiffrée à 500 millions, pour laquelle il n'y aura "pas de compensation", précise le ministère des Comptes publics.