Lettre ouverte signée par plus de 70 associations, personnalités, professionnels du cinéma et citoyens engagés (Collectif Handicaps, UNANIMES, CFHE, CFPSAA, Michaël Jérémiasz, Virginie Delalande, Arnaud de Broca…)
Le Festival de Cannes – vitrine du cinéma mondial – bat son plein. Depuis le 13 mai 2025, les projecteurs illuminent la Croisette : tapis rouge, stars, paparazzis, standing ovations… Mais derrière cette façade de rêve, une réalité invisible persiste : le cinéma, en France, reste inaccessible à des millions de personnes.
Trop peu de films et de séances accessibles
Le 11 février dernier, la loi de 2005 sur l'égalité des droits et des chances a eu 20 ans. Si des avancées ont été obtenues dans certains domaines, la culture - et notamment le cinéma - demeure en marge de cette dynamique. Trop peu de films sont accessibles, trop peu de séances incluent le sous-titrage, l'audiodescription, la langue des signes ou des conditions d'accueil adaptées. Même les films qui disposent d'une version accessible ne sont que rarement projetés, et souvent à des horaires contraignants comme le mardi à 10h.
Des technologies mais un manque de volonté politique
En France, 12 millions de personnes vivent avec un handicap. Parmi elles, plus de sept millions sont sourdes ou malentendantes - soit 10 % de la population - et deux millions sont aveugles ou malvoyantes. Malgré cela, l'accessibilité du cinéma reste l'exception, jamais la règle. Ce n'est pas la technologie qui manque. Elle existe :
• Le sous-titrage pour sourds, malentendants et sourdaveugles.
• L'audiodescription pour les personnes aveugles, malvoyantes et sourdaveugles.
• La Langue des signes française (LSF) pour les sourds, malentendants et sourdaveugles.
• Les solutions comme les boucles à induction magnétique, l'Auracast, etc.
• L'accessibilité des espaces, de l'accueil, des informations…
Tout est là, prêt à l'emploi. Ce qui manque, c'est la volonté politique et que le secteur du cinéma se saisisse pleinement et réellement du sujet de l'accessibilité.
Cinémas accessibles : un décret attendu depuis 20 ans
Il est temps de rappeler un fait juridique majeur : la loi de 2005 prévoyait la publication d'un décret d'application pour garantir l'accessibilité des établissements culturels, dont les cinémas. Ce décret n'a jamais vu le jour malgré les rappels répétés des associations concernées. Vingt ans plus tard, nous attendons toujours. Cette absence bloque la mise en œuvre concrète des droits, et laisse les personnes concernées à la merci du bon vouloir de chaque exploitant ou programmateur. Vingt ans, c'est trop. Nous demandons la publication immédiate de ce décret.
Un secteur encore trop frileux
Certains cinémas s'engagent, des festivals innovent, des institutions comme le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) en connaissent les freins techniques (standardisation des Digital cinema package (DCP), signalement des versions Open captions (OCAP)… Mais il n'y a pas de déploiement à la hauteur. Le véritable blocage, c'est l'absence d'un élan commun, l'oubli - ou le refus - de considérer l'accessibilité comme une exigence normale, non comme un privilège.
Un appel fort pour Cannes 2025
Il faut un signal. Fort. Maintenant. Nous appelons à ce que le Festival de Cannes 2025 fasse de l'accessibilité un thème central, visible, assumé. Ce festival, qui célèbre l'excellence artistique, peut et doit aussi incarner l'excellence sociale. Ce serait un symbole - et un levier concret - pour initier une nouvelle ère du cinéma français, enfin réellement inclusif et accessible.
100 % de films accessibles d'ici fin 2025 !
En 2025, l'Homme est déjà allé sur la Lune. Mais pour de nombreuses personnes en situation de handicap, aller au cinéma reste encore un combat. La loi impose l'accessibilité. La société l'attend. Il est temps d'agir. 100 % des films peuvent être accessibles d'ici fin 2025. Pas un de moins. Parce que l'émotion du cinéma n'a de sens que si elle peut être partagée par toutes et tous. Alors, à quand un cinéma français accessible et inclusif ?
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