En vue des élections présidentielles de 2017, handicap.fr souhaite donner la parole à tous les candidats aux primaires des grands partis, ainsi qu'aux candidats déclarés, sur leur politique handicap. Nous leur avons soumis le même questionnaire, par écrit, et publions les réponses telles qu'elles nous ont été rendues, sans retouche.
Handicap.fr : Contrairement aux élections précédentes, plusieurs candidats aux prochaines présidentielles semblent vouloir davantage s'exprimer sur la question du handicap. Certains politiques auraient-ils pris conscience que 10% de la population, c'est un électorat qu'on ne peut pas se permettre de négliger ?
Jean-François Copé : La question du handicap nous renvoie à la question des limites de l'Homme dans un monde obsédé par la compétition, l'exigence de performance. Elle nous recentre sur l'essentiel : la défense de la dignité inaliénable de toute personne humaine. Chaque Français compte, chaque Français est important. 10% de la population, ce sont près de 10 millions de Françaises et de Français qui connaissent une situation particulière de handicap. Accompagner chacun en fonction de sa situation pour assurer l'égalité des chances et l'épanouissement de tous est un devoir pour les responsables politiques. Un devoir que je me suis donné depuis des années en tant que maire de Meaux mais dont certains commencent tout juste à prendre conscience.
H.fr : Dans cette primaire, qu'est-ce qui vous distingue des autres candidats LR sur la question du handicap ?
JFC : La politique du handicap est aujourd'hui peu ambitieuse et sectorisée. Pour impulser une véritable dynamique de prise en compte du handicap dans tous les domaines, je souhaite l'intégrer systématiquement à toutes les politiques publiques, et ce dès leur conception. C'est uniquement par une approche globale et transversale que nous parviendrons à obtenir des résultats rapides.
J'ai réalisé à quel point cette transversalité était indispensable tout à la fois à travers mon expérience de maire et de président de parti. En tant que maire, quand il s'est agi de prendre en compte la différence dans la conception urbanistique, la bataille pour l'emploi et l'accès à l'éducation, à la culture et au sport. En tant que président du parti, quand j'ai organisé la tenue d'une convention nationale en 2014 sur la politique du handicap.
Il faut bien avoir à l'esprit que la politique du handicap relève tout particulièrement de la solidarité nationale et de la responsabilité de l'Etat. Elle ne peut dépendre ni de la responsabilité assurantielle ni de la responsabilité individuelle. Ainsi, on ne doit pas avoir une approche comptable de cette politique ; bien au contraire, nous devons sanctuariser son budget.
H.fr : Quelle serait votre mesure phare en matière de handicap si vous accédiez au pouvoir ?
JFC : L'urgence est de permettre aux personnes en situation de handicap de développer au maximum leur autonomie, et cela passe avant tout par l'accessibilité des lieux publics ou des transports. Prévu depuis 2005, cet objectif ne cesse d'être repoussé. On estime aujourd'hui à 40% la proportion d'établissements recevant du public accessibles aux personnes handicapées. C'est excessivement insuffisant ! D'autant plus que de nouveaux délais ont été octroyés à l'été 2015 ; neuf ans par exemple en ce qui concerne les transports ferroviaires… Cela ne me semble pas acceptable. Je propose donc de mobiliser un milliard d'euros par an pour rendre au plus vite les lieux publics accessibles et pour financer durablement des projets pour le handicap. Faciliter la vie quotidienne des personnes handicapées, c'est cela aussi l'égalité des chances.
H.fr : Faut-il réellement jeter la pierre au gouvernement de Manuel Valls en matière d'accessibilité des lieux publics quand il hérite d'une situation qui a pris du retard sous d'autres majorités que la sienne ?
JFC : Report de l'exigence d'accessibilité générale des établissements recevant du public, forte hausse du chômage des personnes handicapées, volonté de confier la politique du handicap aux départements… Une chose est sûre : la politique du handicap est loin d'être la priorité du quinquennat de François Hollande.
H.fr : Parce que l'école est le nerf de la guerre en termes d'inclusion, « une » mesure phare pour la scolarité des enfants handicapés ?
JFC : Pour renforcer l'accès à l'éducation et à l'école, je pense qu'il est fondamental d'améliorer l'accompagnement de chaque enfant handicapé en milieu scolaire. Cette amélioration repose sur trois piliers. Tout d'abord, il faut évaluer systématiquement et de manière approfondie les besoins de l'enfant à chaque rentrée scolaire. Ensuite, nous devons former les enseignants à toutes les questions relatives au handicap dès leur formation initiale. Enfin, je souhaite augmenter le nombre d'assistants à la vie scolaire individuels et collectifs pour qu'ils soient en nombre suffisants et pleinement intégrés au projet d'accompagnement de l'enfant. Par ailleurs, il faudra également renforcer l'accès à l'enseignement supérieur pour les jeunes handicapés le désirant et assurer la continuité entre l'enseignement scolaire et l'enseignement supérieur.
H.fr : Parce que le chômage des personnes handicapées est deux fois supérieur à la moyenne nationale, quelle serait votre mesure prioritaire ?
JFC : Je veux démultiplier la possibilité d'avoir recours à des auxiliaires de vie professionnelles sur le modèle des assistants à la vie scolaire. Cela viendrait renforcer l'autonomie professionnelle de la personne avec un handicap et favoriserait donc l'embauche, le maintien dans l'emploi et la création d'entreprise.
H.fr : Les Républicains avait la particularité d'être le seul parti à avoir un mouvement associatif militant comme Handipop, qui portait la parole des personnes handicapées. Aurait-il disparu ?
JFC : Handipop existe toujours et doit absolument être pérennisé ! Hélas, depuis que je ne suis plus président du parti, Handipop ne siège plus au sein du bureau politique, ce qui signifie qu'Handipop n'est plus entendu, ce qui est très regrettable…
La priorité est de le réintégrer au sein du bureau politique et de relancer chez Les Républicains des rendez-vous réguliers sur le handicap, comme je l'avais fait par la tenue d'une convention nationale en 2014. L'attention portée au handicap est inscrite dans l'identité de la Droite, à l'exemple de tout ce que Jacques Chirac a accompli dans ce domaine.
H.fr : Contrairement aux candidats américains qui n'ont pas brillé par l'accessibilité de leur campagne, comptez-vous faire un effort dans ce sens, par exemple vélotypie lors des conférences, sites internet aux normes, accessibilité des meetings, pour que les personnes handicapées puissent elles aussi prendre part au débat démocratique ?
JFC : C'est une nécessité absolue. Nous devons déployer tous les moyens possibles pour que chaque citoyen puisse participer à la vie démocratique et en particulier à la campagne présidentielle.
H.fr : Autre chose à ajouter ?
JFC : Je suis persuadé que l'égalité des chances est possible dans une France solidaire et responsable. À mes yeux, on mesure le degré d'humanité d'une société moderne à la place qu'elle accorde aux personnes les plus vulnérables. La France ne doit oublier aucun de ses enfants.