Plongée intimiste dans le quotidien d'une personne schizophrène, le documentaire Les mondes de Vincent surprend par son honnêteté. Frontal, parfois mélancolique, ce film est un « voyage initiatique au pays de la folie », comme le définit sa réalisatrice, Rozenn Potin. Arrivée du Québec pour rendre visite à son frère aîné Vincent, Rozenn décide de partir une semaine avec lui retrouver leur ancien lieu de vacances, dans le sud de la France, ce lieu plein de souvenirs où Vincent passait l'été durant son enfance, avant de tomber malade, à 21 ans.
Filmer sans filtre
Sur place, le handicap prend parfois le dessus : siestes interminables, alcool comme échappatoire malgré un « pacte de sobriété », besoin de « réfléchir » seul et de fumer en permanence, anxiété, questionnements, manque d'énergie et de concentration… Tout est dévoilé, sans pudeur, à celui qui regarde. Les crises passagères de Vincent sont filmées sans pathos car Rozenn, tout sauf condescendante, se montre sans pitié pour le handicap de son aîné. Franche, agacée parfois, elle laisse la caméra allumée même lorsque filmer semble soudainement plus compliqué… Une façon de montrer la différence sans filtres, qui fait beaucoup de bien.
Amour et handicap psychique à l'écran
« Parfois il faut que je me batte, c'est épuisant… J'ai l'impression d'être un vrai Don Quichotte. Je me bats contre des pensées incontrôlées », explique Vincent. Face caméra, Vince, comme le surnomme sa sœur, accepte de témoigner de ses délires, des voix qu'il entend, de sa fatigue, de son traitement, de ses relations aux autres et de son quotidien. Des « colocataires dans son crâne » qui peuplent son monde. Ponctué d'images d'archives de leur enfance, ce documentaire saisit avec brio l'avant et l'après la maladie d'un grand frère adoré, tout en laissant la place aux témoignages de l'entourage : parents, copains, petite amie… Un film percutant sur l'amour, la famille et le handicap psychique, disponible en ligne à la location (site en lien ci-dessous).
© Rozenn Potin