« Des rires peuvent être aussi révélateurs de souffrance ». Ce constat, Odile Delbegue l'a fait pour la première fois à la suite des ateliers de sensibilisation à la douleur chez les personnes handicapées peu ou non communicantes, proposés par l'Adapei (association de parents d'enfants en situation de handicap) de Corrèze (19). Cette aidante avait auparavant des difficultés à percevoir et interpréter les ressentis physiques de son fils qui ne peut pas s'exprimer. Or, l'absence d'expression de la douleur ne signifie pas qu'elle n'existe pas. « Lorsqu'elle concerne une population en situation de handicap qui rencontre des difficultés pour communiquer, le soin qui en découle s'avère d'emblée beaucoup plus complexe », prévient la Fondation Apicil, dédiée à la prise en charge de la douleur, qui soutient le projet de l'Adapei. Un pied mal placé dans une chaussure conduisant à une escarre, une constipation liée à une déshydratation ou un problème dentaire non repéré… Résultat, des sur-handicaps et des maladies chroniques émergent parfois faute d'une prise en charge adaptée. De même, si la gêne physique survient au moment des soins, elle peut s'accompagner d'anxiété ou de comportements inhabituels qui, là encore, doivent attirer l'attention.
40 proches-aidants formés
Comme quarante aidants familiaux, Odile a ainsi pu bénéficier, de septembre à novembre 2021, d'une formation à la carte animée par le docteur Chantal Wood, anesthésiste-réanimateur au CHU de Poitiers, spécialiste de la douleur. Objectif ? Maîtriser les techniques de repérage de la douleur et les stratégies à mettre en place pour y faire face. La phase théorique a ainsi permis de poser des diagnostics dans des situations « simples » qui nécessitent des traitements appropriés tels que le paracétamol ou des anti-inflammatoires non stéroïdiens. Durant la phase pratique, les stagiaires ont appris à mettre en place des méthodes basiques de communication ou de distraction dont le but est avant tout de rassurer la personne. Odile et les autres ont découvert l'importance du toucher ou encore des procédés de relaxation ou d'hypnoanalgésie qui permettent de mettre à distance une souffrance physique ; des techniques non-médicamenteuses qui ont déjà fait leurs preuves, notamment en pédiatrie.
Une remise à niveau des pros
Les professionnels de santé et du médico-social ne sont pas en reste. L'Adapei et la fondation Apicil se sont associés au centre hospitalier de Brive pour intégrer la thématique de la douleur dans le parcours de soins du patient handicapé. Six ans après la première formation délivrée auprès de 29 professionnels de l'Adapei de Corrèze, une remise à niveau a également été proposée à ces mêmes équipes. Ces derniers ont ainsi pu réinterroger leurs pratiques en matière d'évaluation de la douleur, intégrer de nouveaux outils et protocoles, mais aussi mettre en place une organisation optimale, avec notamment la nomination d'un référent douleur pour faire le lien avec le corps médical.
Si la formation est d'ores et déjà terminée, une série de 17 vidéos (voir ci-contre) publiées sur la chaîne YouTube de l'Adapei de Corrèze reprend les principaux éléments théoriques dispensés durant les ateliers.