Erasmus : quelles études à l'étranger en cas de handicap ?

Thibaud a sauté le pas ou plutôt franchi la frontière. Etudiant à Strasbourg, il a intégré, durant 1 an, une école allemande. Comment concilier handicap, aménagements et mobilité internationale ? Erasmus, c'est une vie étudiante à fond.

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Comment avez-vous préparé votre voyage, concrètement ?
Je suis passé par une voie un peu différente des démarches officielles. En effet, l'Ecole de Management (EM) Strasbourg a normalement des écoles partenaires dans le monde entier. Chaque étudiant peut choisir parmi elles selon son classement lors du 1er semestre. Mais, pour des raisons pratiques, j'ai préféré ne pas partir trop loin. J'ai trouvé une petite école en Forêt-Noire, dans le sud de l'Allemagne. J'ai donc demandé à mon école de pouvoir y faire mon année Erasmus. L'EM m'a aidé à les contacter et quelqu'un m'a accompagné pour rencontrer le directeur. Nous avons eu un très bon accueil.

Mais a-t-il fallu faire des démarches particulières liées à votre handicap ?
En effet, car j'ai besoin d'une auxiliaire de vie au quotidien. Et même si cette université n'était pas très loin de Strasbourg, je souhaitais prendre un logement sur place. La loi prévoit ce cas de figure et un étudiant français à l'étranger dans le cadre de ses études peut bénéficier d'une PCH (Prestation de compensation du handicap) pour aide humaine à l'étranger. Ces démarches ont été longues et difficiles, d'autant plus que mon cas n'est apparemment pas très courant.

Vous avez même dû décaler votre départ d'une année car votre demande auprès de la MDPH n'avançait pas…
Oui, en effet. Et j'avoue que je n'ai pas eu le réflexe de passer par la mission handicap de l'université. Par contre, le service de l'Université qui s'occupe des bourses Erasmus m'a contacté à propos d'une bourse pour besoins spécifiques réservée aux étudiants handicapés. L'objectif étant de compenser les frais supplémentaires occasionnés par mon année à l'étranger et qui ne seraient pas pris en charge par un autre organisme.

Aviez-vous des inquiétudes avant le départ ?
Oui, nombreuses. Ce qui m'a aidé, c'est que l'année précédent mon départ, j'ai choisi de m'installer dans un appartement à Strasbourg. Cela m'a permis d'apprendre à vivre en autonomie. Après, même si je connaissais déjà la région dans laquelle j'allais m'installer, on a toujours des inquiétudes sur différents points. J'avoue que je me faisais plus de soucis sur la vie quotidienne (appartement, auxiliaires…) que sur les études. Finalement, la vie s'est très bien déroulée, mais les débuts à l'Université ont été un peu difficiles.

Avez-vous pu bénéficier de tous les aménagements dont vous aviez besoin en Allemagne ? Etait-ce compliqué de les « reproduire » d'une école à l'autre ?
Je bénéficie surtout de l'accompagnement d'auxiliaires de vie. Elles m'aident pour mes repas, l'habillage et autres tâches quotidiennes. Pour les études à proprement parler, j'ai le droit d'utiliser mon ordinateur lors les examens et bénéficie du tiers temps, comme en France. Le seul bémol est que l'école n'est pas accessible ! Du coup, je suis obligé de laisser mon fauteuil en bas des escaliers et de marcher toute la journée avec mon sac sur le dos. Mais j'ai choisi cette école en connaissance de cause et, avec un peu de volonté, on réussit pas mal de choses.

Etes-vous satisfait de ce séjour ? Que vous a-t-il apporté ?
Oui, très content, sur tous les plans car, malgré les difficultés, j'ai fini par être très bien intégré au sein de l'université et de la vie en générale. Tout le monde me connait et je me sens vraiment appartenir à l'école. Mais cette expérience m'apporte aussi un petit plus au niveau personnel.  En fait, ma famille est originaire de cette région, je suis Allemand à la base mais n'avait jamais vécu ici auparavant. Ce séjour est donc un peu un retour aux sources. C'est vraiment très enrichissant de redécouvrir sa propre culture sous un autre angle.

Quel conseil donneriez-vous à un étudiant handicapé qui souhaite faire une partie de ses études ou un stage à l'étranger ?
Un conseil qui me paraît fondamental, c'est le temps. Il ne faut pas hésiter à anticiper son séjour très à l'avance en prenant en compte l'ensemble des acteurs qui vont entrer en ligne de compte. Parfois, repousser de six mois ou un an permet de mieux se préparer. L'inclusion est parfois bien développée en France mais ce n'est pas forcément le cas dans tous les pays, il faut en avoir conscience. Les débuts seront peut-être un peu difficiles mais, très vite, les autres comprennent et viennent vers nous.

Pour finir, quel regard portez-vous sur l'importance de l'accessibilité de la vie étudiante ?
Aussi curieux que cela puisse paraître, mon université est dans un milieu assez rural. Du coup, la vie étudiante reste limitée mais j'arrive tout de même à m'intégrer et à avoir une vie sociale en dehors aux études. Mais il est vrai que l'accessibilité est centrale pour s'intégrer et vivre sa vie étudiante à fond. Car, Erasmus, c'est aussi cela !

Si vous êtes étudiant et avez des projets de mobilité à l'étranger, Thibaud se propose de répondre à vos questions par mail : thibaud.bry@etu.unistra.fr

Ce témoignage s'inscrit dans les actions menées lors de la Campagne Handivalides, organisée par l'association Starting-Block (lien ci-dessous), qui mobilise chaque année les universités et grandes écoles françaises à l'inclusion des étudiants handicapés. Sa 10ème édition aura lieu de février à avril 2015.

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