Par Annabel Symington
Un Australien en fauteuil roulant a pour ambition de devenir le premier paraplégique à atteindre un camp de base de l'Everest sans aide lors d'un trek. Scott Doolan, 28 ans, se lance le 16 mars 2018 à la conquête du versant sud, côté népalais, à 5 364 mètres d'altitude, généralement accessible seulement à pied ou en hélicoptère. L'homme cherche à prouver que ce sommet peut être atteint aussi en fauteuil roulant.
Comme un jeu d'enfant ?
Pour tenter d'y arriver, il va utiliser un fauteuil roulant conçu spécialement avec des roues tout-terrain pour emprunter des sentiers où le passage est possible. Mais il pense se servir principalement de ses mains avec un ami qui va lui porter les jambes, comme dans le jeu d'enfant de la brouette, dit-il. "Je vais sortir de mon fauteuil et mon ami Matt va me tenir en me prenant par les chevilles, et je vais en fait marcher sur mes mains", ajoute-t-il. Depuis huit mois, M. Doolan s'entraîne pour ce trek, avec des exercices cardiovasculaires et musculaires. Il a aussi passé du temps sur les sentiers des Montagnes Bleues en Australie, en portant un masque qui limite l'apport d'oxygène pour se mettre dans les conditions de la haute altitude qui l'attendent dans les montagnes de l'Himalaya.
Une série de ponts suspendus
Le trek du camp de base de l'Everest commence à Lukla, à 140 km à l'est de Katmandou, et suit une ancienne route de commerce qui reliait naguère le Tibet au Népal. Une série de ponts suspendus traverse le fleuve qui longe le fond de la vallée de Khumjung, avant une pente ardue vers le camp de base de l'Everest. Les grimpeurs y escaladent des rochers parfois dans la neige ou la boue, à une altitude où l'oxygène se raréfie, ce qui peut provoquer des maux de tête et des nausées. "Je ne sais pas du tout comment ça va être. Il va bien sûr y avoir des passages que je ne pourrai pas emprunter en fauteuil roulant. Je vais donc en descendre et utiliser mes mains. Ce sera probablement la partie la plus difficile. J'espère que je ne vais pas avoir le mal des montagnes", dit-il.
Le double de temps
Environ 5 000 personnes effectuent chaque année ce trek au pied du glacier Khumbu, en mettant huit à dix jours, selon le ministère népalais du tourisme. M. Doolan s'attend à avoir besoin du double du temps pour arriver au sommet. L'homme est en fauteuil roulant depuis l'âge de 17 ans, à la suite d'une fracture de la colonne vertébrale consécutive à un accident de moto. Il ensuite a fallu quelques années à ce jeune sportif pour refaire de la gym. Mais ça l'a aidé à prendre conscience de son handicap, dit-il. Par la suite, il a rencontré son ami Matt Laycock, créateur de la marque de vêtements Apexgen, qui s'est également donné pour mission philanthropique de sensibiliser à la santé mentale et au handicap sous le slogan "Dépasse-le". C'est Matt qui a suggéré à Doolan l'idée d'être le premier paraplégique à atteindre le camp de base de l'Everest pour l'essentiel avec ses propres moyens.
L'imagination pour seule limite
L'aventure, qui coûte 70 000 dollars australiens (44 000 euros), incluant 15 000 dollars australiens (9 500 euros) pour le fauteuil roulant, est parrainée par la société de M. Laycock. C'est en prenant un café avec son ami que M. Laycock lui a donné l'idée. Dans un premier temps, M. Doolan a décliné. Mais au bout de quelques semaines, il s'est rallié à l'idée. "On peut faire n'importe quoi si on le veut vraiment. C'est ce que j'ai appris jusqu'ici. Votre imagination est votre seule limite", conclut M. Doolan en parlant du défi qui l'attend.
En 20 octobre 2017, c'est un Français, Yann Jondot, paraplégique, qui se lançait à l'assaut du Kilimandjaro, en Tanzanie (article en lien ci-dessous). Pour cet exploit, il était accompagné par l'explorateur Arnaud Chassery qui avait relié les cinq continents à la nage avec l'aventurier quadri-amputé Philippe Croizon.
© Instagram Scott Doolan