« Les fauteuils roulants, électriques et manuels, seront intégralement remboursés dès 2024. » Un an après l'annonce tonitruante d'Emmanuel Macron lors de la dernière Conférence nationale du handicap, où en est cette mesure, particulièrement attendue par les personnes en situation de handicap et les associations ?
Les modalités en détail annoncées cet été
« La promesse du Président sera tenue », assure le cabinet de Fadila Khattabi, ministre déléguée aux Personnes handicapées et âgées, lors d'une réunion presse le 11 avril. « Dans quelques mois, les personnes à mobilité réduite pourront bénéficier d'une prise en charge par l'Assurance maladie et les complémentaires santé », confirme-t-il. Les modalités de sa mise en œuvre seront inscrites dans un arrêté de la direction de la Sécurité sociale (DSS) et annoncées par Emmanuel Macron cet été, « avant les Jeux olympiques (26 juillet-11 août) ou, au plus tard, paralympiques (28 août-8 septembre) ».
2 ministres chez un fabricant de fauteuils roulants
En attendant d'en connaître les détails, Mme Khattabi et Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, effectuent, le 12 avril 2024, un déplacement commun dans le cadre de cette mesure. Au programme : visite de l'usine de fabrication InvaCare, leader français en la matière, avant d'échanger avec tous les acteurs concernés lors d'une table-ronde. Elles seront notamment accompagnées de Pascale Ribes, présidente d'APF France handicap, et de Sébastien Peytavie, député écologiste de Dordogne, en situation de handicap moteur, qui s'inquiétait des contours de cette réforme, en janvier 2024 (Lire : Fauteuils roulants remboursés à 100% : une (vaine) promesse?).
Un remboursement qui fait « consensus »
Ce déplacement est aussi l'occasion pour les ministres de faire un point d'étape sur cette « réforme de longue haleine, sur laquelle nous planchons depuis 2021, avec les associations, distributeurs, fabricants... », rappelle le cabinet de Fadila Khattabi. Selon le cabinet, cette mobilisation de tous les acteurs et personnalités politiques montre que le remboursement des fauteuils roulants « fait consensus ». Reste à parvenir à un accord...
Une enveloppe renflouée
C'est tout l'enjeu du second mandat de négociation qui débute ce 12 avril. Le premier, qui a duré un an, a notamment permis de « revoir la nomenclature, qui n'avait pas évolué depuis vingt ans », selon le cabinet. « Ces dernières semaines, après avoir pris connaissance des revendications des associations et des industriels, les deux ministres ont pu établir un diagnostic des besoins complémentaires pour finaliser cette réforme », ajoute-t-il. Elles ont sollicité, auprès du Président et de Matignon, un nouvel arbitrage afin d'augmenter l'envelopper financière dédiée (estimée à 300 millions d'euros), jugée « insuffisante au regard des besoins ». Le nouveau mandat a été communiqué à la DSS fin mars/début avril 2024 mais, pour l'heure, son montant ne peut être dévoilé, « sous peine de grever le travail de fond qu'elle devra mener dans les prochaines semaines ».
Mobilisation accrue des associations
Au-delà de l'augmentation du budget consacré à cette réforme, Fadila Khattabi réclame, auprès de l'administration et de l'ensemble des acteurs, de donner plus de places aux organes qui représentent les personnes en situation de handicap dans ces négociations. « Elles doivent être force de proposition ! » Alors que, fin 2023, APF France handicap et d'autres associations regrettaient de ne pas avoir été conviées aux réunions tarifaires et autres assemblées, le cabinet assure les avoir reçues ces dernières semaines, mentionnant des « échanges nourris et nombreux ».
Supprimer le prix limite de vente ?
APF France handicap salue cette annonce et se réjouit de « commencer à être enfin entendue et d'avoir des interlocuteurs politiques afin de faire aboutir cette réforme ». Cependant l'association reste « très vigilante et en attente de précisions sur les modalités concrètes de mise en œuvre de la réforme ». Elle demande également le retrait de la disposition du Prix limite de vente, « véritable obstacle à la garantie de remboursement de l'ensemble des fauteuils roulants », selon elle.
Plafond de remboursement en négociation
Autre point de crispation : un plafond de remboursement de 2 600 euros (contre 600 euros aujourd'hui), pour les fauteuils manuels, et 18 000 euros (contre 5 200), pour les électriques, avait été évoqué quelques mois auparavant, privant les propriétaires de modèles avec un montant supérieur de tout remboursement. Le cabinet se veut rassurant : « Ces inquiétudes ne sont plus à considérer car ce montant n'avait pas de valeur officielle, il s'agissait d'une porte d'entrée pour les négociations, il sera très certainement plus élevé ». Le montant réel sera communiqué après négociations entre les fabricants et la direction de la Sécurité sociale.
Simplifier le parcours des usagers
« Cette dernière s'appuie sur des études économiques précises, notamment sur les marges des fournisseurs, pour fixer un plafond acceptable », explique le cabinet de Mme Khattabi, indiquant que sa « priorité est le remboursement des fauteuils les plus complexes qui sont également les plus coûteux et les moins bien remboursés par la Sécurité sociale ». L'objectif est de simplifier le parcours des usagers, qui sont parfois contraints de faire la demande d'un remboursement via la Prestation de compensation du handicap (PCH) ou même créer des cagnottes en ligne. L'enjeu ? « Un remboursement plus rapide, passant de plusieurs mois voire années, à quelques semaines. » A noter qu'actuellement, le prix d'un fauteuil manuel peut atteindre 10 000 euros et celui d'un électrique jusqu'à 50 000 euros.
Des fauteuils en location ?
Par ailleurs, le cabinet souhaite « casser le mythe du 100 % santé ». « Il s'agit d'un remboursement de dispositif médical avec une prise en charge par l'Assurance maladie obligatoire, à titre quasiment exclusif, et une mobilisation des complémentaires santé, complète-t-il. Nous souhaitons notamment aborder la question de la location avec elles. »
Mise en place d'un comité de suivi
Après la mise en vigueur de cette réforme, le ministère s'est engagé à mettre en place un comité de suivi, qui permettra à l'ensemble des parties prenantes (fabricants, distributeurs et associations) d'analyser son déploiement et de procéder à des modifications éventuelles. « Le but n'est pas de créer un système absolu et immobile, au contraire », conclut le cabinet.
© Stocklib