La jeune femme devenue paraplégique après avoir été défenestrée par son compagnon au Mans en 2013 a obtenu en appel l'indemnisation totale de son préjudice, la cour considérant qu'elle ne pouvait pas être tenue comme en partie responsable, a-t-on appris le 11 juillet 2019. "C'est la fin d'un combat que nous n'aurions pas dû avoir à mener. On est passé d'une violence conjugale à une violence institutionnelle", a réagi l'avocat de la plaignante, Me Mathias Jarry.
Aucun lien de causalité
Aïda (nom d'emprunt), 32 ans, a obtenu une provision de 90 000 euros sur le montant total qui lui sera alloué à l'issue de l'évaluation complète de son préjudice, selon un arrêt rendu le 9 juillet par la cour d'appel d'Angers, consulté par l'AFP. Les juges estiment "qu'il n'existe aucun lien de causalité directe entre les faits de violences de nature criminelle dont Aïda a été victime et la décision de rejoindre son compagnon dans l'appartement qu'elle avait quitté quelques heures plus tôt". "Même si le comportement de la victime peut être considéré comme rationnellement risqué ", précisent-ils, "cette simple imprudence commise par une jeune femme sous l'emprise de son compagnon et se retrouvant sans solution d'hébergement ce soir-là ne peut être qualifiée de faute et ne saurait limiter l'indemnisation d'un dommage auquel elle n'a contribué en aucune façon".
Le parquet général tranche
Le 24 août 2013, au Mans, des policiers interviennent dans l'appartement d'Aïda et de son compagnon, qui avait agressé un ami commun, et conseillent à la jeune femme, victime de violences conjugales régulières, de ne pas rester dormir à son domicile. Aïda cherche en vain une solution d'hébergement puis revient passer la nuit chez elle, à court d'option. Elle sera découverte par la police, inconsciente, au pied de son immeuble... Aïda reste paraplégique et son agresseur est condamné à 15 ans de prison en juin 2016. Dans son arrêt civil, la cour d'assises fixait une avance de 90 000 euros sur le montant total de l'indemnisation à venir. Mais le Fonds de garantie des victimes (FGTI) saisi par les avocats, avait proposé une indemnisation partielle, estimant qu'il y avait partage de responsabilités, Aïda ayant commis une imprudence en décidant de passer la nuit à son domicile. Saisie par les avocats, la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions (Civi), qui siège auprès de chaque tribunal, avait retenu le partage de responsabilités, proposant, le 13 février 2018, de verser 67 500 euros (article en lien ci-dessous). A l'audience d'appel, le 27 mai, le parquet général avait requis l'indemnisation totale.