Film " Habités " : de l'hôpital psy vers l'autonomie

Roger, Wilfreed, Nicolas et Kadidja sortent de l'hôpital psychiatrique de Marseille. Dans "Habités", Séverine Mathieu filme leur quête d'indépendance et leur façon d'habiter le monde. Un documentaire nécessaire, en salle depuis le 19 octobre 2022.

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Les fous, les fadas, les bizarres, les timbrés... Les adjectifs pour nommer la folie ne manquent pas. Derrière ces mots fourre-tout stigmatisants, il y a Roger, Wilfreed, Nicolas et Kadidja, quatre protagonistes du film Habités, signé Séverine Mathieu, en salle depuis le 19 octobre 2022. S'ils sont tous « habités » par un trouble psychique, ils sont avant tout habitants de Marseille. Dans ce documentaire d'1h25, la réalisatrice montre quatre trajectoires de vie, dessinées en pointillés, entre l'hôpital et le « monde ordinaire ». Elle filme des fuites, des arrêts, des tentatives et surtout leur façon d'habiter le monde, rappelant que l'accès au logement est une des conditions du rétablissement en cas de handicap psychique (article en lien ci-dessous). « Trouver un appartement est difficile, mais l'habiter représente une autre difficulté, encore plus complexe », affirme Dolorès Torres, psychiatre à Marseille.

Montrer la réinsertion

Le film explore cette complexité. Il interroge l'après, les murs blancs de l'appartement qui semblent étrangers, les petits gestes du quotidien qu'il faut réapprendre : marcher, s'habiller, prendre un médicament… « L'accompagnement à se reconstruire dans une vie au quotidien se fait pas à pas, avec la personne, des visites à domicile, un soutien de l'équipe, les éducateurs, les psychologues, les psychiatres », poursuit le docteur Torres. Car, derrière ces difficultés d'accès à l'habitat, se cache l'exclusion. Une double peine à laquelle est confrontée la majorité des personnes en situation de handicap psychique. La caméra de Séverine Mathieu ose infiltrer ce monde parallèle pour faire le lien entre deux mondes qui peinent à communiquer.

Un projet de cinéma inclusif

C'est aussi un projet de cinéma « inclusif » auquel les quatre personnages ont pris part. Pendant trois ans, ils se sont réunis une fois par semaine pour échanger avec la réalisatrice. Chacun a partagé son expérience de l'habitat. Kadidja a, par exemple, reconstitué la façon dont elle a habité un local à poubelles et Wilfreed s'est inspiré du foyer où il logeait. « Ces ateliers mʼont permis de vivre au contact des participants, et cela m'a fait comprendre que leur sensibilité m'était nécessaire, affirme Séverine Mathieu. J'aime voir le monde avec leurs yeux ». Le long-métrage respecte ainsi leur point de vue. La folie n'est définie qu'à travers leur vision, poétique mais lucide. « Je la connais (la maladie, ndlr) sans vouloir la connaître », précise pudiquement Wilfreed. Quant à Nicolas, il se voit comme un « soleil noir ».

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Clotilde Costil, journaliste Handicap.fr"
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