Aurélien est charmant mais tourmenté. Il est volubile mais solitaire. Il se sent inadapté mais a tout compris. Aurélien est autiste Asperger. Filmé lors de la feria de San Fermin, à Pampelune (Espagne), dans la brutalité d'une foule grouillante et bruyante, il délie sa parole, libérant un chant d'une « intensité prodigieuse », un miroir tendu vers nous. Son ami Diego Governatori dresse son portrait dans le documentaire Quelle folie, en salle le 2 octobre 2019.
Comportement « bizarroïde » ?
« Les moteurs, ça me rend fou ! » Un aboiement, une voiture qui démarre, un klaxon, des cris... Le moindre bruit au-dessus de 80 décibels, et c'est la panique... Une blessure au pied, et c'est le drame. « J'ai failli me transpercer le pied, j'aurais pu me tuer ! » Ses réactions, Aurélien ne les contrôle pas, pas plus que ses débordements émotionnels. « La condition autistique, c'est de ne pas comprendre que la douleur est dans le pied et ne va pas nous anéantir, nous submerger ». C'est à l'adolescence, qu'il prend conscience de sa différence. « J'ai compris qu'il y avait quelque chose de bizarroïde chez moi à 11 ou 12 ans, en jouant avec des amis. Tous avaient des choses à raconter, et moi j'étais prostré dans une zone qui s'appelle l'autisme », révèle-t-il.
Tribu lointaine
Parmi les symptômes, une utilisation atypique du langage qui complique son intégration dans la société. Selon lui, l'humanité est un « spectacle » dont il est « exclu ». Depuis le diagnostic, le monde qui l'entoure ne cesse de lui renvoyer sa différence en pleine figure. Réservé, voire effrayé, les relations humaines ne sont pas son fort, y compris avec les membres de sa famille. « L'autiste regarde ses proches, les gens qui devraient lui être familiers, comme appartenant à une tribu lointaine », estime-t-il. « Sa parole témoigne d'une certaine difficulté à incorporer les codes qui régissent les liens et les interactions sociales, ce qui l'exclut de ce fait de toute altérité durable, explique le réalisateur. Au-delà de ce que l'autisme peut expliquer, au-delà aussi des hypothèses que je pourrais formuler, il est un témoignage à son propos qui m'intéresse vivement : le sien. Comment se voit-il, se pense-t-il, s'impressionne-t-il, se vit-il ? » Réponse en 87 minutes, prochainement dans les salles obscures... Une folie ?