Entre nageur et cycliste, ça roule. A fortiori lorsque le nageur concerné s'appelle Philippe Croizon, l'homme amputé des quatre membres qui a traversé la Manche puis relié les cinq continents à la nage. Dans son fauteuil roulant aux couleurs de sa dernière expédition, Nager au-delà des frontières, il a rendu visite aux coureurs de l'équipe de la Française des Jeux (FDJ.fr), invité sur l'étape Saint-Gildas-Saint-Malo. « Ils avaient entendu parler de mes traversées et savaient que cette invitation me ferait plaisir. »
Regonfler le moral des troupes
Car lorsqu'il s'agit de dépassement de soi, ce nageur de l'extrême en connait un rayon. Il a donc eu le privilège de monter dans le bus de l'équipe, quelques minutes avant la course, et en a profité pour regonfler le moral des troupes FDJ.fr qui accusaient un petit coup de mou après les Pyrénées. Les hommes aux trèfles à quatre feuilles (le symbole porté sur leur nouveau maillot en bleu-blanc-rouge) ont été attentifs à l'enthousiasme à la mode Croizon, sans en perdre une miette. « Je leur ai expliqué mon parcours et comment j'avais remonté la pente après mon accident. Comment j'avais réussi sans bras ni jambe. Comment mon équipe m'avait porté vers la victoire. » Ils connaissaient le doute car un des leurs, le sprinter Nacer Bouhanni, champion de France 2012, avait dû abandonner à cause d'une méchante gastro. « Je voyais, dans leurs yeux, qu'ils étaient touchés par mes propos. Certains sont venus me voir pour me dire que cette rencontre leur avait fait du bien. » Le résultat ne se fait pas attendre, sur l'étape du jour, William Bonnet finit cinquième au sprint tandis que Jérémy Roy accroche la huitième place du contre-la-montre.
Pas de victoire sans équipe
Philippe a donc eu le privilège de monter dans la voiture du directeur de course de la FDJ, Marc Madiot. Au plus près du peloton, surtout lors des ravitaillements en eau, lorsqu'un coureur de l'équipe doit slalomer à fond les gamelles entre motos et voitures d'assistance pour venir chercher quelques bidons pour ses coéquipiers. Il y a quelques mois encore, c'était Philippe qui expérimentait cette belle solidarité. Pour eux comme pour lui, la tête dans le même guidon, celui d'un effort intense et constant, au nom de l'équipe.
Un souk super bien organisé
Dans le village-départ, on le reconnait, on le félicite, on l'encourage. Certains veulent être pris en photo avec le nageur ; Philippe ne refuse jamais. Une ambiance joviale... « Le Tour de France, c'est un immense bordel super bien organisé, au départ, sur la route comme à l'arrivée. Un vrai village composé de 5 000 personnes et de centaines de voitures qui se déplacent d'étapes en étapes. Un souk sans nom mais où chacun retrouve toujours son chemin. C'est impressionnant ! ». Philippe Croizon dit avoir puisé tout au long de cette journée une belle énergie : « On prétend que c'est la crise, que les Français sont moroses mais, pendant 200 km, je n'ai vu que des sourires. Des Français heureux qui ont attendu des heures en plein cagnard pour voir passer les champions pendant quelques secondes. Une bonne ambiance, un peu franchouillarde, mais qui met du baume au cœur ! »
Un rêve : le Galibier !
Fasciné par cette expérience, Philippe en profite pour faire part d'un rêve au sommet : assister à la course sur une étape de montagne, vers le Galibier ou Alpes-d'Huez. « Pour moi, ce serait le nec plus ultra. » Il lui suffira, peut-être, pour réaliser son rêve, de cueillir un trèfle à quatre feuilles...
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