Le handicap, un sujet fun à la mode ?

Rire du ou avec le handicap ? Question souvent posée, mêlée de compassion et de préjugés. L'actualité médiatique ou artistique ne s'en prive pas et, de l'aveu des personnes concernées, c'est plutôt une très bonne chose.

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Le handicap serait-il devenu un sujet fun ? A voir, depuis quelques années, la déferlante d'inspiration sur ce thème, c'est certain ! La ville de Yutz, en Lorraine, lance un festival inédit « Humour et handicap », les 4, 5 et 6 octobre 2013. Quinze troupes et artistes, qu'ils soient handicapés ou valides, promettent de faire sa fête à la différence (lire article complet en lien : 1er Festival humour et handicap : bidonnez-vous en Moselle !). Une initiative qui s'inscrit dans une tendance plus globale qui pourrait bien débarrasser la vision du handicap de ses clichés, quitte à faire grincer quelques dents...

Ça passe ou ça casse !

Mais le principe de l'humour n'est-il pas justement de n'épargner personne ? En 1999, Patrick Timsit a fait ce pari et s'est pris une sévère déconvenue, avec le procès d'une association de personnes trisomiques à la clé. Depuis, l'humour semble nettement moins « handicapé » ! Même Stéphane Guillon, qui prend pour cible les athlètes des Jeux paralympiques de Pékin avec son style vitriolé, s'en tire à plutôt bon compte, suscitant surtout l'indignation de quelques « valides ».

Les incontournables

Citons, parmi les incontournables, le film « Intouchables » qui a filé la banane à plus de 20 millions de spectateurs, ou le programme court « Vestiaires » diffusé sur France 2 qui nous plonge dans les coulisses d'un club de natation handisport sans concession ou encore le Ondar Show de Jérémy Ferrari qui propose dans « Handicap ou handi pas cap » à des personnes handicapées de relever des défis perdus d'avance. Quant à la série « J'en crois pas mes yeux » (déjà trois éditions, disponibles sur le net), elle déride le handicap en entreprise partant du principe que, en matière d'inclusion, un bon fou rire vaut parfois mieux qu'un long discours !

Le cinéma s'en mêle

Côté cinéma, même tendance. En 2008, « Rumba », un film drôle, poétique et décalé, fait la part belle à deux héros bien esquintés qui se laissent porter par l'envie de vivre. Quatre ans plus tard, « Hasta la vista » raconte les tribulations de trois copains handicapés qui tentent de rejoindre l'Espagne pour aller à la rencontre de prostituées. Début septembre 2013, le film « Grand départ » avec Eddy Mitchell, aborde quant à lui le thème de la folie sur le ton de la comédie. Tel est le parti-pris du réalisateur, Nicolas Mercier : « Mettre de la drôlerie en tout, y compris en rendant compte d'une expérience douloureuse. Le rire reste une formidable porte de sortie face à la tragédie humaine. » Dès l'automne 2013, sur NBC, c'est l'acteur américain Mikael J. Fox qui décide d'assumer sa propre maladie à l'écran. Après une longue absence, il campe un père de famille atteint de la maladie de Parkinson dans une série éponyme. Rien ne lui sera épargné !

Une bonne dose d'autodérision

La pub ne se prive pas, à son tour, de cette source d'inspiration pareille à d'autres, surtout dans certains pays, notamment du Nord, où l'on aborde le handicap de manière plus décomplexée. Même si quelques « bien-pensants » s'insurgent en clamant qu'il n'est pas juste de se moquer des personnes handicapées, il y a certainement tout lieu de s'en réjouir. D'autant qu'il ne s'agit pas de « rire de » mais de « rires avec » puisque, dans cette escouade de trublions, les artistes handicapés ou concernés directement par le handicap ne sont pas en reste. Ils pratiquent avec bonheur l'autodérision. C'est le cas de Laurent Savard qui dans « Le bal des pompiers » aborde avec un esprit décapant l'autisme et l'hyperactivité de son fils. Entre humour noir et rose tendresse, il s'attaque pourtant à un sujet hautement sensible : le handicap d'un enfant. Serge Van Brakel, est, quant à lui, IMC (Infirme moteur cérébral), avec d'importants problèmes d'élocution, ce qui ne l'empêche pas de faire pouffer des salles entières.

Lorsque la littérature s'en mêle

La littérature s'est, elle aussi, attaquée au filon. Tout a peut-être commencé avec Cyrano de Bergerac qui acceptait volontiers de se moquer de son appendice nasal, un privilège qui lui était néanmoins réservé. Spirituel mais sans humour ! En 2008, Jean-Louis Fournier reçoit le Prix du roman Femina pour « Où on va, papa ? ». A travers ce livre, il rend hommage à ses deux fils handicapés. Une déclaration d'amour à la fois drôle et incisive. Un an plus tard, Paul Samanos, journaliste, édite son premier recueil de dessins « Fauteuils en état de siège ». Un cocktail détonnant en 112 pages inspiré par une muse en fauteuil roulant. En 2010, Luc Leprêtre signe avec « Club VIP », comme « Very invalid person », un ouvrage irrévérencieux et pétillant sur trois « handicapés » sans scrupules et subversifs. De vraies crapules !

Au musée ou sur les réseaux sociaux

En 2012, rire et handicap entrent même au musée. En novembre, dans le cadre du Mois extraordinaire organisé chaque année à Paris, le Carrousel du Louvre affiche sur son « Mur de rire », le sourire de personnes déficientes intellectuelles sur écran géant, preuve que leur handicap n'altère en rien leur capacité à être heureux. Et aujourd'hui, par la magie des réseaux sociaux, les personnes handicapées, parfois artistes en devenir, se mettent en scène, dans des vidéos impertinentes, pour faire tomber les préjugés. Pour qu'enfin elles apparaissent conformes à la réalité, ni héros ni victimes, et pourquoi pas drôles tout simplement !

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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