Clients, salariés, membres de la direction… En début de soirée, le 25 septembre 2017, les locaux d'Handishare situés à Limonest (Rhône) ne désemplissent pas. Pour cause, cette entreprise adaptée, initialement spécialisée dans les ressources humaines et les achats, fête ce jour-là son cinquième anniversaire.
L'expérience de grosses entreprises
Près d'un buffet, derrière une petite foule de personnes, Patricia Gros-Micol, à la tête de l'entreprise, salue les nouveaux arrivants. C'est elle qui, début 2012, a fondé la société après 25 ans d'expérience au sein de grands groupes. « J'ai moi-même été concernée par le handicap à la suite d'un accident de train à l'âge de 17 ans, tout en étant atteinte d'une maladie auto-immune, confie-t-elle. Ayant longtemps travaillé pour de grosses entreprises, j'avais une certaine vision de ce qui manquait en termes d'assistance aux fonctions support et d'adaptation. »
Une soixantaine de clients
À la suite d'une opération humanitaire menée à Madagascar en parallèle de son poste de salariée, Patricia se lance dans l'aventure Handishare, auxquels une soixantaine de clients font aujourd'hui appel pour des missions récurrentes. Pour fêter cet anniversaire, le buffet et la décoration portent d'ailleurs les couleurs de l'île (vert et rouge). Issues d'un livre réalisé dans le cadre de la mission bénévole de Patricia, et vendu à plus de 4 000 exemplaires, de grandes photographies prises lors du voyage ornent les murs.
22 salariés, tous en situation de handicap
Open space, cuisine, salle de réunion, baby-foot… Ici, les locaux ont été agrandis récemment pour les besoins de l'entreprise qui compte désormais 22 salariés, tous reconnus travailleurs handicapés. Du 100% alors qu'une entreprise adaptée doit en accueillir au minimum 80%. « Nous avons tous des pathologies très différentes mais ce n'est pas vraiment le sujet. Nous fonctionnons ici comme dans n'importe quelle entreprise, explique Maria Teixera, agent administratif venue chez Handishare après avoir enchaîné deux contrats aidés. Nous sommes tous en CDI, généralement à plein temps. Si je n'étais pas arrivée là, je ne sais pas ce que j'aurais fait. »
Miser sur la polyvalence
Accident de vie, handicap sensoriel, maladie dégénérative… Tous les handicaps se confondent puisque les compétences, bien sûr, priment. Sylvain, employé chez Handishare depuis décembre 2013, est atteint de mucoviscidose. Lui est arrivé via Pôle Emploi, après une formation en comptabilité. Le jeune homme s'enthousiasme de la polyvalence de ses activités. « Mes missions sont très variées : contrôle et validation de factures, gestion des ressources de candidatures et de visites médicales, mise à jour de documents légaux… ». L'entreprise diversifie aujourd'hui son secteur d'activité, entre administration, gestion et marketing.
Un emploi en accord avec ses compétences
Également recruté par Patricia, Jean-Baptiste, non voyant de naissance qui a décroché ici son premier emploi, est passé par Cap Emploi (réseau national d'organismes de placement professionnel pour personnes handicapées) avant d'effectuer une évaluation en milieu de travail (on l'appelle désormais PMSMP), qui a abouti à un CDI. « J'ai eu un très bon feeling avec l'environnement, la direction et le poste », explique-t-il. Lui s'occupe, entre autres, de la rédaction de compte-rendus de CHSCT (Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail). Titulaire d'une maîtrise de sciences politiques, il estime occuper un poste qui lui correspond : « Comme j'ai développé des compétences rédactionnelles, c'est un travail qui me va ».
Le sens d'une mission sociétale
Parmi les clients de l'entreprise, on compte des groupes issus de différents secteurs : agences de recrutement, spécialistes de l'énergie et de l'habitat, établissements d'enseignement supérieur… L'Université catholique de Lyon par exemple, souhaite faire à nouveau appel aux services de l'entreprise adaptée. Maud Georget, cheveux rouges et longue jupe plissée, est responsable des ressources humaines au sein de l'université. Pour elle, faire appel à Handishare prend tout son sens : « Nous avons besoin de plusieurs employés pour numériser nos archives, explique-t-elle. Cette mission s'est très bien passée la dernière fois, nous étions pleinement satisfaits du travail accompli. Pour nous, c'est une véritable mission sociétale qui a du sens, en plus de la qualité du travail fourni. » Et Patricia Gros-Micol d'ajouter : « Nos clients s'aperçoivent qu'il y a une réelle valeur ajoutée au niveau des compétences et des missions effectuées, au-delà du handicap. C'est ce que nous défendons activement ».
© Aimée Le Goff