Le diagnostic. Attendu. Redouté. Libérateur pour certains, pesant pour d'autres, il n'en reste pas moins une étape clé du parcours de soins. Un moment délicat, a fortiori en cas de handicap psychiatrique sévère, mais crucial car il doit permettre à chaque patient de mieux appréhender sa maladie et de devenir acteur de sa prise en charge afin d'améliorer son état de santé et sa qualité de vie. Or, par la complexité des troubles et du diagnostic, qui est à ce jour exclusivement clinique, cette annonce gagne à être soigneusement préparée. Pour accompagner les professionnels dans cette démarche qui nécessite « une certaine prudence », la Haute autorité de santé (HAS) publie, le 7 octobre 2022, un guide de 55 pages énonçant les différents « facteurs de réussite ».
Une démarche collaborative
Chaque patient, tout comme chaque trouble, étant unique, il n'existe pas de méthode universelle. Les informations « utiles » à fournir au patient varient selon les situations et dans le temps. Toutefois, certains impératifs demeurent. Cette annonce doit avant tout être « collaborative », selon la HAS. « Un dialogue constant, au cours duquel le savoir du médecin et le savoir issu de l'expérience du patient se croisent, doit favoriser le partage d'un même diagnostic. En reprenant par exemple les mots ou expressions du patient, le psychiatre contribue à la création d'un langage commun, facilitant ainsi la compréhension et l'acceptabilité des symptômes », explique-t-elle dans un communiqué.
Pour aider le patient à surmonter ses difficultés, le psychiatre doit ainsi créer les conditions d'une alliance thérapeutique en l'impliquant dès l'annonce, qui passe notamment par une écoute attentive de son vécu, de ses troubles ou encore de ce qu'il a entrepris pour y faire face. L'adhésion de la personne dans la durée passe également par la prise en compte de son environnement et l'intégration de l'entourage dans cette alliance thérapeutique, avec son accord. La HAS recommande « d'appréhender notamment la présence ou non d'un entourage et la capacité et le souhait des proches de s'impliquer ».
Prendre le temps et prévenir le risque de stigmatisation
L'aspect « progressif » de la démarche, conduisant à parler de « processus d'annonce », est également indispensable, selon l'autorité scientifique. Il doit notamment intégrer un délai nécessaire pour confirmer le diagnostic, gommer les difficultés d'acceptation par le patient, favoriser l'appropriation des symptômes, mais aussi influer bénéfiquement sur l'évolution de la maladie. « L'évaluation de l'état clinique du patient, de sa disponibilité à entendre et à parler de ses troubles indiqueront si les conditions de l'annonce du diagnostic sont réunies », ajoute-t-elle.
Il faut, ensuite, prévoir un temps suffisant et un espace adapté, nécessitant une certaine planification, anticipation. « Ce temps est nécessaire pour informer (correctement) le patient, le laisser s'exprimer et poser toutes ses questions. Il convient de rester à l'écoute, de s'assurer qu'il a bien compris les informations, d'aborder les éventuelles représentations péjoratives et/ou erronées qu'il peut avoir sur la maladie et ses conséquences », détaille le guide qui préconise d'aborder « les risques d'assignation, de stigmatisation, d'autostigmatisation et de discrimination ».
Tenir compte du niveau de conscience des troubles
« L'annonce doit aussi tenir compte, d'une part, du niveau de conscience des troubles par le patient, et d'autre part, des éventuels troubles cognitifs. Cela peut impliquer une reformulation et une répétition de l'annonce lors de consultations ultérieures », souligne le guide qui ajoute qu'elle doit aussi prendre en considération la nature de la pathologie, dont les troubles de la personnalité. Outre la dénomination de la maladie, sa description, ses évolutions possibles et notamment la survenue éventuelle de récidives ou rechutes, d'autres points doivent être abordés, comme l'évolution possible du diagnostic : les effets bénéfiques attendus du traitement, les délais d'action et les effets secondaires éventuels mais aussi les approches non médicamenteuses complémentaires (psychothérapie, réhabilitation psychosociale, programmes d'éducation thérapeutique...).
Les ressources à disposition
Le médecin doit également aborder les multiples ressources existantes : associations, groupes d'entraide mutuelle (GEM), service social pour aider la personne à comprendre ses droits et à remplir les dossiers administratifs, hébergement, accompagnement vers l'emploi ou études pour les plus jeunes... « Un document écrit qui récapitule les éléments communiqués oralement devrait idéalement être remis au patient afin qu'il puisse améliorer sa compréhension et disposer d'informations utiles et pratiques », recommande la HAS. Patient qui, par ailleurs, « ne doit jamais être réduit ni désigné par son diagnostic », rappelle-t-elle.
Enfin, la réussite de l'annonce passe par une étroite coordination entre les professionnels concernés (psychiatres, médecins généralistes, addictologues, urgentistes, psychologues, infirmiers, pharmaciens, assistants sociaux…), en ville comme à l'hôpital, pour optimiser l'accompagnement et le suivi sur le long terme.
Une fiche pour informer le patient
Après l'annonce, le patient doit faire l'objet d'un accompagnement pour disposer des réponses à toutes les questions pratiques que lui et sa famille peuvent se poser et des perspectives envisagées pour améliorer son état de santé. Certaines réponses figurent notamment dans une fiche d'information publiée, en complément, par la HAS à destination des patients (en lien ci-dessous). Ce document regorge également de conseils pratiques.