Dans la mouvance des médecines alternatives en plein développement, on découvre que l'hypnose thérapeutique peut permettre d'éviter l'anesthésie générale, parfois peu recommandée, notamment en cas d'interventions à répétition. En se focalisant sur un souvenir et sur un sens, l'ouïe (ou le toucher pour les personnes malvoyantes), le professionnel de santé emmène le patient vers un état à mi-chemin entre veille et sommeil mais toujours en pleine conscience.
Une solution alternative
Déjà utilisée dans la Grèce Antique, l'hypnose thérapeutique était très pratiquée par les chamans avant de disparaître au profit de l'injection de produits anesthésiants. Depuis une vingtaine d'années, le procédé revient dans les blocs opératoires, offrant une solution moins invasive à ceux qui doivent, notamment, enchaîner les opérations à cause d'une maladie chronique, d'un handicap, de malformations... Récemment, le handi-grimpeur Philippe Ribière a fait parler de lui et expliqué dans la presse que, né avec des malformations, il a subi, dès l'âge de quatre ans, une série d'interventions afin d'assurer la mobilité fonctionnelle de ses mains et de ses pieds (article lien ci-dessous). Un exemple parmi d'autres…
Des conséquences moins nocives
À l'occasion de la conférence « L'hypnose pour soulager la douleur », à l'Université catholique de Lyon, le 17 octobre 2018 (vidéo de la conférence en lien ci-dessous), Stéphane Bouvier et Jérôme Schweitzer sont venus faire part de leur expérience en tant que médecins anesthésistes formateurs en hypnose ericksonienne. Depuis une dizaine d'années, cette pratique se développe comme une alternative moins nocive. Outre les problèmes cardiaques, pulmonaires, allergiques et autres complications, l'anesthésie générale pourrait avoir des conséquences néfastes sur la mémoire et les capacités de raisonnement des patients. Pour le corps médical, il est donc judicieux de se tourner vers d'autres solutions, quand cela est possible. Jérôme Schweitzer explique : « L'hypnose est un outil complémentaire, il aide à soulager les patients en complément d'autres médecines. Ils restent acteurs et sont sensibles à l'environnement. C'est une thérapie active, le thérapeute travaille avec le patient et pas sur le patient ».
Une meilleure récupération
Stéphane Bouvier poursuit : « Le principal intérêt est de limiter au maximum l'injection de drogues anesthésiques dans le sang, voire ne pas en injecter du tout, comme lors de coloscopies. Outre le fait de diminuer la douleur, l'hypnose médicale réduit aussi l'anxiété avant, pendant et après l'intervention, ainsi que les effets secondaires et les nausées post-opératoires. Les patients ont également une meilleure récupération, plus rapide. ». Depuis 2015, l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) reconnaît l'efficacité de la pratique. Jean-Pierre Lavignon, médecin urgentiste au centre hospitalier Saint Joseph-Saint Luc, à Lyon, rassure : « Certains sont sceptiques sur l'efficacité de la technique mais rares sont les patients qui refusent d'en tester la pertinence. On fait preuve de pédagogie en expliquant qu'elle ne comporte aucun danger, qu'il s'agit juste d'un état physiologique naturel déclenché par le patient lui-même. Parfois, ce dernier conserve les yeux ouverts. Ce n'est pas du micro sommeil ni de la somnolence, plutôt une forme d'état second. Lorsque le patient « décroche », il est prêt physiquement et psychologiquement à subir l'intervention ».
Des résultats bluffants
Organisée par la Fondation Apicil, la conférence s'est déployée autour de trois vidéos d'interventions dans lesquelles les patients étaient sous hypnose. Que ce soit avec des enfants ou des adultes, les résultats dans les différents services hospitaliers ont fait leurs preuves. Stéphanie, une trentenaire, a eu l'occasion de tester l'hypnose médicale à Lyon. Après une mauvaise chute en skateboard, son coude est luxé et fracturé. Elle raconte : « J'ai lâché prise et, à mon réveil, mon bras était remis en place. Je n'ai rien senti. Aucune douleur, aucune sensation. Je n'ai même eu aucune notion de temps. Combien a duré l'intervention, je n'en ai aucune idée… ». Pour l'instant, une telle pratique n'est prise en charge que partiellement et sous certaines conditions par l'Assurance maladie et les complémentaires santé mais les praticiens espèrent que, bientôt, cette démarche deviendra banale.
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