De plus en plus d'enfants handicapés, avec de graves troubles du comportement, sont aujourd'hui scolarisés dans des écoles ordinaires où ils ne peuvent recevoir les soins nécessaires, laissant les enseignants en plein désarroi, a alerté le 17 octobre 2017 le Syndicat national unifié des instituteurs, professeurs des écoles et directeurs Force ouvrière (FO) Paris.
Au nom de l'inclusion systématique
Il assure avoir reçu au cours des derniers mois de nombreux témoignages de directeurs, d'enseignants ou de parents faisant état d'une situation devenue «ingérable» dans de plus en en plus d'écoles parisiennes. Au nom de «l'inclusion systématique» des enfants handicapés, depuis la loi de février 2005, ceux qui nécessiteraient des soins adaptés dans des établissements spécialisés sont en fait scolarisés dans des écoles ordinaires. Conséquence : des situations de violence sont fréquemment signalées par des enseignants désemparés et non formés pour y faire face.
Enfants en danger
« J'ai dans ma classe un enfant de 6 ans avec des tendances suicidaires, qui est dangereux pour lui-même et pour les autres enfants», a par exemple témoigné Sophie, enseignante, lors de la conférence de presse du SNUDI FO. Un auxiliaire de vie scolaire (AVS) devrait arriver dans l'école pour l'accompagner après les vacances de la Toussaint mais selon elle, « ce ne sera pas suffisant ; il devrait être pris en charge par un hôpital de jour ». « Dans l'école où je suis, il y a un élève lourdement handicapé qui hurle au fond de la classe», témoigne une autre prof, qui se dit «totalement impuissante » pour assurer la sécurité de cet enfant et celle des autres élèves.
Un point de rupture
Le syndicat a rappelé que le coût d'un élève en classe ordinaire s'élevait à environ 3 600 euros par an, contre 20 000 à 50 000 en établissement spécialisé. Or, pour faire des économies, le nombre de places dans des classes ou établissements spécialisés a été réduit au cours des dernières années, déplore-t-il. «On arrive aujourd'hui à un point de rupture», a alerté Bernard Lempereur, secrétaire départemental du syndicat. «Des enfants sont aujourd'hui abandonnés à leur handicap, les enseignants sont en plein désarroi et les familles dans l'incompréhension», a-t-il dit.
Réaction indignée
Face à ces déclarations, Olivia Cattan, présidente de SOS autisme France, a souhaité réagir, rappelant à « Mr Lempereur que la France a été condamnée par le Conseil de l'Europe de nombreuses fois parce qu'aujourd'hui trop peu d'enfants en situation de handicap bénéficient de cette inclusion scolaire à laquelle ils ont droit » et que « l'Education est un droit pour tous, non négociable ». Selon elle, le véritable problème est le manque de formation des professeurs, d'AVS formées et payées correctement et de volonté de certains enseignants d'accueillir au mieux les élèves handicapés en adaptant leur apprentissage comme la loi le stipule. Elle rappelle que seuls 20% des enfants autistes sont admis l'école primaire, un taux « bien faible » comparé aux pays voisins.
Faits de violence ?
Olivia Cattan insiste également sur le fait que, selon une étude parue dans Le Parisien, 442 faits de violence par jour sont répertoriés dans les écoles sur tout le territoire français. Or aucun d'eux n'a été commis par des enfants en situation de handicap. « Va-t-on pour autant renvoyer tous ces enfants de l'école et les placer dans des hôpitaux ? », questionne cette maman d'un enfant autiste. Elle déplore, enfin, que FO conseille aux parents de mettre leurs enfants dans des hôpitaux de jour, arguant que ce syndicat d'enseignant n'est pas « compétent en la matière, ni habilité à le faire ». Elle invite à une rencontre pour éviter, à l'avenir, de relayer de tels préjugés… Dans le même temps, une experte mandatée par l'Onu pour passer le système français au crible (article en lien ci-dessous) recommande au gouvernement français de lancer « un plan d'action pour fermer progressivement ces institutions et les transformer en services implantés dans la communauté ». Besoin d'un compromis ? Quelle solution ?