« Je pensais que lire, c'était poser ses yeux sur un texte. Le jour où j'ai perdu la vue, j'ai réalisé qu'il existait tant d'autres façons d'entrer en relation avec les mots… » Anne-Sarah Kertudo est malentendante depuis l'adolescence, et a perdu la vue en 2013. Cette juriste spécialisée dans le droit des personnes en situation de handicap s'est récemment lancée dans le projet des Lectures singulières. Onze soirées réparties sur un an, avec, à chaque fois un thème différent, toujours axé sur le handicap. Des lectures dans le noir, en langues des signes, chuchotées, à écouter… Autant de façons de découvrir les mots autrement. La deuxième lecture intitulée « Ecouter un film » se déroulera le mercredi 21 février à 19h à la librairie Les nouveautés (45 bis rue du Faubourg du Temple, Paris 10).
Deux premières soirées
Anne-Sarah Kertudo, auteure du livre Est-ce qu'on entend la mer à Paris, souhaitait mettre en place un projet sous forme de résidence en collaboration avec cette librairie. Il a démarré en janvier 2018 grâce au soutien du Conseil régional d'Ile-de-France. Lors de la première soirée, qui a eu lieu le 20 janvier 2018, deux auteures ont lu des textes érotiques tirés de leurs écrits. Deux interprètes assuraient la traduction en langue des signes. La deuxième lecture portera sur l'audiodescription : une soirée de lectures audio destinées aux personnes malvoyantes. Ces soirées sont ouvertes au public sourd mais s'avèrent aussi passionnantes pour les entendants et offrent une nouvelle manière de percevoir les mots, les expressions. Le handicap propose des manières innovantes de lire, de comprendre, qui rapprochent les gens. Il décuple les émotions et la sensualité autour des textes.
Dire le handicap haut et fort
Anne-Sarah a pour ambition de dire le handicap haut et fort et de ne pas avoir peur de l'assumer. « Chez les homosexuels, on parle de coming-out. Eh bien, pour le handicap c'est pareil. On passe de la honte à la fierté lorsqu'on en parle ». Ces soirées offrent l'occasion d'aborder ce sujet librement, sans gêne ni apitoiement. Elle espère que ces échanges vont permettre au grand public de dédramatiser le handicap, de l'aborder via une autre image que celle que donnée par les médias, souvent dramatique. Son projet n'en est qu'à ses débuts mais elle a déjà reçu de nombreux retours positifs. Son seul regret ? La diversité des expériences fait que chaque animation est axée sur un seul handicap et toutes ne sont donc pas accessibles à tous, tout le temps.
© Facebook Les lectures singulières