Loi immigration : durcissement PCH et AEEH retiré du texte

Le 19 décembre 2023, la loi immigration a été votée par le Parlement. Le durcissement pour percevoir la PCH et l'AEEH n'est plus à l'ordre du jour. Mais d'autres prestations sociales sont impactées. Le point après une journée houleuse.

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Assemblée nationale à Paris derrière un panneau mentionnant Invalides.

Le 19 décembre 2023, lors d'une journée mouvementée, le Parlement a définitivement adopté la loi immigration (349 votes pour et 186 contre), après accord trouvé entre députés et sénateurs en commission mixte paritaire le même jour. Qu'en est-il des mesures qui ciblaient particulièrement les personnes en situation de handicap et avaient été adoptées par les sénateurs en novembre 2023 ? Dans le texte adopté, la PCH (Prestation de compensation du handicap) et l'AEEH (Allocation d'éducation de l'enfant handicapé) ne sont plus concernées par l'article 1er N, qui allonge les conditions de résidence pour l'obtention de certaines prestations sociales (Lire : PCH: les étrangers devront attendre 5 ans pour la toucher?). Pour la PCH, il faudra trois mois de résidence en France, comme auparavant. Et il n'y a pas de délai pour l'AEEH, ainsi que pour l'allocation en cas de décès d'un enfant.

Durcissement sur les prestations sociales

Et pour d'autres prestations sociales ? La CMP a finalement trouvé un accord sur un délai de 5 ans de résidence sur le sol français (ou 30 mois pour ceux qui travaillent) pour les citoyens en situation régulière non ressortissants de l'Union européenne, ceux ayant le statut de réfugié ou d'apatride ou les titulaires d'une carte de résident permanent ou de dix ans. Les étrangers en situation irrégulière en sont toujours exclus. Cela concerne : l'Allocation personnalisée pour l'autonomie (Apa), la Prestation d'accueil du jeune enfant, les allocations familiales, le Complément familial, l'Allocation de soutien familial, l'Allocation de rentrée scolaire et l'Allocation journalière de présence parentale. Pour les APL (aides au logement), il faudra disposer d'un visa étudiant (sans délai), de trois mois d'activité professionnelle ou de cinq ans de résidence.

Et l'aide médicale d'Etat ?

Concernant l'Aide médicale d'Etat (AME), dont peuvent bénéficier les personnes en situation irrégulière sur le territoire français, une mesure très polémique a finalement été retirée du projet de loi immigration. Les sénateurs avaient en effet acté sa suppression en la remplaçant par l'AMU (Aide médicale d'urgence) qui n'aurait concerné que quelques pathologies lourdes ou des douleurs aiguës. Elisabeth Borne a assuré qu'il n'était « pas question de supprimer » ce « dispositif nécessaire » et a annoncé qu'il ferait l'objet d'une réforme à part entière en 2024.

Réactions

Le Défenseur des droits rappelle que « le droit des étrangers régulièrement établis sur le territoire à ne pas subir de discriminations à raison de leur nationalité a été consacré par le Conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l'Homme ». Selon lui, « de telles dispositions auront des effets redoutables de précarisation des personnes présentes sur notre territoire, au détriment de la cohésion sociale. Les retombées du dispositif envisagé sont d'autant plus inquiétantes qu'elles vont spécifiquement affecter des personnes particulièrement vulnérables compte tenu de la nature des prestations sociales concernées. »  A son tour, la Commission nationale consultative des Droits de l'Homme dénonce le fait que « priver les personnes immigrées, en situation régulière ou non, de l'accès aux droits fondamentaux, c'est risquer de les placer dans des situations de précarité intolérables ». Selon le Collectif handicaps, « les personnes en situation de handicap ne se limitent pas aux allocations liées à leur handicap ». Il se dit donc « fermement opposé à ce texte, qui exclut les personnes immigrées et va l'encontre de toutes les valeurs républicaines de solidarité et de fraternité ».

Mais rien n'est définitivement joué. Emmanuel Macron et d'autres vont saisir le Conseil constitutionnel car des mesures du texte seraient manifestement contraires à la Constitution. De son côté, l'Uniopss, qui rassemble les acteurs associatifs des secteurs sanitaire, social et médico-social, se mobilise avec ses partenaires pour suivre les conditions d'application concrètes de cette loi, et, dans un premier temps, soutenir les démarches menées auprès du Conseil constitutionnel.

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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