« Quand j'étais petite, on me demandait : 'Tu veux faire quoi quand tu seras grande ?', je répondais : 'Mimie mathy !' ». Une trentaine d'années plus tard, le souhait de Marie-Aude Cariou est exaucé… à quelques centimètres près ! Rebaptisée MAK, la jeune femme se produit sur scène, ce soir-là à la Comédie de Paris. Ses amis, ses amours, ses emmerdes… MAK est « comme tout le monde… à un poil près ». Dans son spectacle éponyme, elle aborde le handicap avec humour et autodérision et dévoile ses astuces pour contourner les obstacles liés à sa « différence ». Elle est atteinte d'une forme unique de dysplasie ectodermique -« 110 points au Scrabble ! »-, une maladie génétique qui impacte la peau, les cheveux et les dents, cumulée à une atrophie rénale. Mais sur scène, elle ne laisse paraître aucune faille et se contente de profiter de ce « rêve qui devient réalité ». Résultat : un spectacle 0 % pathos et 100 % authentique !
Forcer le destin
Voir le verre à moitié plein, c'est presque une religion chez les Cariou, qui se transmet de mère en fille. Son credo lui vient de sa maman : « On respire, on y va, on est fort ! » Les moqueries, les regards insistants… Elle en fait son affaire ! Son hymne : « I am what I am » (je suis qui je suis). Si, aujourd'hui, sa différence est sa plus grande force, au départ, c'était « plutôt mal barré ! » « Comment gérer la naissance d'un enfant ovni quand on est parents provinciaux, avec des médecins peu compatissants ? Comment expliquer aux gens que son handicap est invisible ? Comment s'autoriser à rêver lorsque la vie vous met des barrières à chaque étape de votre vie ? » « A ma naissance, les médecins ont dit à ma mère : 'Entre votre incompétence et l'inconnu, son pronostic vital est quasi nul. Mais bonne nouvelle : elle aura une tête, deux bras, deux jambes et des dents ! Par contre, elle ne fera pas maths sup' » Sa plus grande hantise ? L'école. « Je ne veux pas y aller, je veux disparaître », réclamait-elle plus jeune. Aujourd'hui, elle remercie toutes les personnes qui lui ont mis des bâtons dans les roues et invite le public à les applaudir. « C'est comme du fumier, c'est grâce à eux que l'on grandit ! »
RQTH : facilitateur d'emploi
Malgré les pronostics peu optimistes des médecins, MAK fait son petit bonhomme de chemin ; puis vient le jour où elle doit trouver du travail. Son idéal ? Devenir danseuse. Elle écarte rapidement cette piste mais a encore de beaux restes et n'hésite pas à se déhancher devant son public « en mode Beyonce ». Après avoir envisagé brièvement de devenir « mannequin piscine », elle se lance finalement dans une carrière dans la communication. Son poste de responsable, elle le doit notamment à sa détermination, sa positive attitude et son énergie communicative. Modeste, elle attribue tout le mérite à son « pass pour l'emploi » : la RQTH (Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé). « Avant, avec ce bout de papier, on ne voulait pas de toi et, maintenant, on ne veut que de toi. Merci les quotas ! », ironise-t-elle en faisant référence aux entreprises de vingt salariés et plus qui doivent répondre à une obligation d'emploi de 6 % de travailleurs handicapés.
A Paris cet été
« C'est aussi pour ça que je suis là, pour répondre au quota de personnes handicapées dans les théâtres, imposé par Macron… Ca donne un petit côté RSE (Responsabilité sociétale des entreprises) ! », poursuit-elle avant de s'octroyer une « pause » sur scène. « C'est un spectacle d'handicapé donc j'ai le droit à deux minutes ». Mais MAK ne s'arrête jamais bien longtemps. Après avoir réhydraté son rein greffé « flambant neuf » et « assoiffé », elle repart de plus belle ! Entre ses chorégraphies endiablées et ses anecdotes qui poussent à la réflexion, ce spectacle plein d'émotions est un hymne à la différence et à l'acceptation de soi… A retrouver à Saint-Quentin (Aisne) du 25 au 28 avril 2019 et à Paris cet été. En attendant, « on respire, on y va, on est fort ! »